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04/02/2016 | FRANCE | N°14-24050

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 février 2016, 14-24050


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a travaillé successivement au service de la société de droit allemand Meggle Milch Gmbh à partir de septembre 1991, puis à partir d'avril 1997 au service de la société de droit français Meggle France, qui commercialisait en France les produits de la société Meggle Gmbh, appartenant toutes deux au même groupe Meggle, la société Meggle France étant une filiale à 100 % de la société Mol

kerei Meggle, elle-même filiale de la société mère Meggle AG ; qu'il a été lice...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a travaillé successivement au service de la société de droit allemand Meggle Milch Gmbh à partir de septembre 1991, puis à partir d'avril 1997 au service de la société de droit français Meggle France, qui commercialisait en France les produits de la société Meggle Gmbh, appartenant toutes deux au même groupe Meggle, la société Meggle France étant une filiale à 100 % de la société Molkerei Meggle, elle-même filiale de la société mère Meggle AG ; qu'il a été licencié le 16 février 2010, en raison de la cessation d'activité de la société Meggle France et qu'il a contesté cette mesure en saisissant la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour déclarer la société de droit allemand Meggle Gmbh coemployeur du salarié et dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société Meggle France avait pour unique objet de prospecter la clientèle pour l'exportation des produits de la société mère, laquelle s'est immiscée dans la gestion de la société Meggle France en fixant ses objectifs, en établissant le montant des provisions annuelles qu'elle lui versait conditionnant directement sa viabilité, en appliquant les stratégies qu'elle seule élaborait, en décidant de sa dissolution, en intervenant au contrat de travail en souscrivant au profit du salarié une assurance couvrant le risque accidents du travail et accidents privés, ce dont il découlait qu'il y a avait une confusion d'intérêts, d'activités et de direction ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, par des motifs qui ne caractérisent pas une immixtion de la société Meggle Gmbh, notamment dans la gestion sociale de la société Meggle France, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Meggle France.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société Meggle France à payer au salarié la somme de 96.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il appartient à l'employeur de prouver la réalité du motif de licenciement ; qu'il est constant que le droit de mettre fin à son activité sans avoir à s'en expliquer est l'un des éléments de la liberté d'entreprendre ; que la cessation totale d'activité est un motif économique au sens de l'article L. 1233-3 du code du travail dès lors qu'elle n'est pas due à une faute de l'employeur ou à sa légèreté blâmable, non invoquées en l'espèce ; que dés lors, la SARL Meggle France était fondée à procéder au licenciement pour motif économique de ses salariés du fait de sa cessation d'activité ; que monsieur X... soutient cependant qu'existait une situation de co-emploi le liant tant à la SARL Meggle France qu'à la société de tête du groupe Meggle ; qu'or, lorsque le salarié a pour co-employeurs des entités faisant partie d'un même groupe, la cessation d'activité de l'une d'elle ne peut constituer une cause économique de licenciement qu'à la condition d'être justifiée par des difficultés économiques, par une mutation technologique ou par la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel elles appartiennent ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats par les parties que la SARL Meggle France avait pour unique objet de prospecter la clientèle française pour l'exportation de la production de la société mère, laquelle s'est immiscée dans la gestion de la SARL Meggle France en fixant ses objectifs, en établissant le montant des provisions annuelles qu'elle lui versait, qui conditionnaient directement la viabilité de la SARL, en appliquant les stratégies qu'elle seule élaborait et en décidant de sa dissolution ; qu'iI y a bien confusion d'Intérêts, d'activités et de direction ; qu'en outre, la société allemande Meggle GmbH est directement Intervenue au contrat de travail liant les parties, lequel indique, en son article 7, que la société allemande a souscrit au profit du salarié une assurance couvrant le risque accidents du travail et accidents privés pour une somme de 100,000 DM en cas de décès et de 200,000 DM en cas d'invalidité ; que de même, l'article 8 du contrat de travail prévoit que monsieur X... bénéficie d'une "prévoyance vieillesse" souscrite par la société Meggle GmbH ; que ces éléments caractérisent une situation de co-employeurs de la SARL Meggle France et de la société de droit allemand Meggle GmbH à l'égard de Monsieur X... ; que la situation de co-emploi étant caractérisée, il revient à l'intimée de démontrer la réalité de la cause économique du licenciement au niveau du secteur d'activité du groupe, ce qu'elle ne fait pas, le groupe allemand Meggle continue à présenter une santé économique florissante, sans avoir à prendre de mesure destinée à sauvegarder sa compétitivité ni à s'adapter aux évolutions technologiques ; que la SARL Meggle France soutient que sa condamnation à des dommages-intérêts porterait atteinte à la territorialité du droit, en appliquant le droit français à une entreprise allemande, puisque plus aucun lien ne permet de rattacher le litige à la France ; que cependant, la SARL Meggle France, partie défenderesse puis intimée, survit à sa cessation d'activité autant que nécessaire à le liquidation de son patrimoine ; qu'en outre, le licenciement doit être examiné selon le droit applicable à la date où la décision de licencier a été prise, en l'espèce le droit français ; que la SARL Meggle France soutient enfin que soumettre la décision de cessation d'activité en France aux exigences du droit français en matière de licenciement économique porte une atteinte directe à "la liberté d'établissement garantie par l'article 43 du traité CE" ; que cependant, aucune restriction n'a été formulée à l'encontre de la décision de la société de droit allemand Meggle de créer en France une SARL destinée à assurer son service de prospection commerciale, ni à l'encontre de sa décision de cesser l'activité de sa filiale française, le seul fait de devoir respecter le droit du pays d'accueil, dont il n'est pas soutenu qu'il ne serait pas conforme au droit européen, n'étant contraire à aucune disposition d'aucun traité européen ; qu'en conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a dit le licenciement de monsieur X... fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le salaire mensuel moyen brut de monsieur X... est fixé à 8 011,47 €, calculé à partir du cumul brut apparaissant sur la fiche de paie de décembre 2008 ; que vu l'article L.1235-3 du code du travail, du fait de l'existence d'une situation de co-emploi, les effectifs à prendre en compte pour déterminer les dispositions applicables ne sont pas limités à ceux de la SARL Meggle France ; que monsieur X... demande que la somme de 400.000 € lui soit allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la SARL Meggle France conclut au débouté sans développer aucun moyen ; qu'il appartient au juge d'arbitrer le montant des dommages-intérêts ; que monsieur X... avait près de 18 ans d'ancienneté à la date de son licenciement ; qu'il était âgé de 50 ans ; qu'il ne donne pas d'indication sur sa vie professionnelle dans les suites de son licenciement, hormis le fait que son épouse a été licenciée en même temps que lui, ce dont il ne justifie aucunement ; que compte tenu de ces éléments, la somme de 98.000 euros sera allouée à monsieur X... à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QUE QU'au delà de la communauté d'intérêts et d'activités inhérentes à l'appartenance à un groupe, la reconnaissance de la qualité de co-employeur suppose une véritable confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre deux sociétés, que ne saurait caractériser la simple existence de liens capitalistiques ou de représentation commerciale ; que pour retenir la qualité de co-employeur de la société allemande Meggle Gmbh, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que la société Meggle France avait pour unique objet de prospecter la clientèle française pour l'exportation de la production de la société mère, « laquelle s'est immiscée dans la gestion de la société française en fixant des objectifs, en établissant le montant des provisions annuelles qu'elle lui versait, en appliquant des stratégies qu'elle seule élaborait et en décidant de sa dissolution » ; qu'en statuant par des motifs impropres à caractériser une véritable confusion de direction entre les sociétés Meggle France et Meggle GmbH, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°) ALORS QU'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction n'existe que dans le cas d'une confusion de gestion sociale, laquelle conduit les salariés à travailler indistinctement pour le compte de l'une ou l'autre des sociétés sans qu'il soit possible de déterminer laquelle est l'employeur ; que la cour d'appel, qui a seulement constaté que la société de droit allemand avait souscrit au profit du salarié une assurance couvrant le risque accidents du travail et accidents privés ainsi qu'une prévoyance vieillesse, n'a pas caractérisé la confusion de gestion sociale entre les deux sociétés permettant de retenir leur qualité d'employeurs conjoints, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE lorsque le salarié a pour co-employeurs des entités faisant partie d'un même groupe, la cessation d'activité de l'une constitue une cause économique de licenciement si elle est justifiée par des difficultés économiques, par une mutation technologique ou par la nécessité de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont elle relèvent ; qu'en se bornant à affirmer que l'exposante ne démontrait pas la réalité de la cause économique du licenciement au niveau du secteur d'activité du groupe, « le groupe allemand Meggle continuant à présenter une santé économique florissante, sans avoir à prendre de mesure destinée à sauvegarder sa compétitivité », la cour d'appel a statué par voie de simple affirmation sans motiver sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE dans ses conclusions d'appel (cf. p 10 et 11), la société Meggle France faisait valoir que le licenciement était motivé par la nécessité de sauvegarder la compétitivité du groupe dès lors que le marché français générait des pertes croissantes, soit moins 105 K€ pour l'exercice clos le 31 décembre 2007, moins 182K€ pour l'exercice clos le 31 décembre 2008 et moins 106K€ au 30 juin 2009, que le groupe contraint de financer une filiale déficitaire était moins compétitif qu'un groupe ne supportant pas cette charge et que les études entreprises pour redynamiser le marché démontraient un risque financier important en cas d'échec ; qu'en jugeant que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse sans avoir répondu à ces moyens pertinents des conclusions d'appel de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur les bilans et comptes de résultats de la société Meggle France, les résultats de l'étude de la société IMP sur l'état du marché français et les divers courriers des partenaires informant l'exposante de la non reconduction des conventions de distribution des produits Meggle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-24050
Date de la décision : 04/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 01 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 fév. 2016, pourvoi n°14-24050


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.24050
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