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27/04/2017 | FRANCE | N°15-24561

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 avril 2017, 15-24561


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au mois de juin 2010, la société Celimat, fabricant de circuits imprimés pour cartes électroniques, a souscrit auprès de la société Axa France IARD (l'assureur) une police d'assurance "responsabilité civile entreprise" ; que, le 7 novembre 2011, un incendie a dévasté les locaux loués par la société Celimat, entraînant la destruction de biens que des tiers lui avaient confiés ; que la société Celimat a déclaré le sinistre à l'assureur et sollicité la prise

en charge des dommages causés aux biens confiés en relevant qu'elle avait sou...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'au mois de juin 2010, la société Celimat, fabricant de circuits imprimés pour cartes électroniques, a souscrit auprès de la société Axa France IARD (l'assureur) une police d'assurance "responsabilité civile entreprise" ; que, le 7 novembre 2011, un incendie a dévasté les locaux loués par la société Celimat, entraînant la destruction de biens que des tiers lui avaient confiés ; que la société Celimat a déclaré le sinistre à l'assureur et sollicité la prise en charge des dommages causés aux biens confiés en relevant qu'elle avait souscrit à ce titre une extension de garantie ; que l'assureur a refusé de prendre en charge le sinistre en invoquant les dispositions de l'article 4.1 des conditions générales excluant de la garantie les dommages matériels et immatériels causés par un incendie ; que contestant cette position, la société Celimat a assigné l'assureur en exécution du contrat ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société Celimat fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, que les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance prévalent sur celles des conditions générales au cas où les premières sont inconciliables avec les secondes ; qu'en l'espèce, la société Celimat avait souscrit, dans les conditions particulières, à l'extension de garantie « Dommages aux biens confiés » (selon laquelle « la garantie s'applique aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile incombant à l'assuré en raison des dommages causés aux biens qui lui sont confiés dans le cadre des activités définies aux conditions particulières » ; que la cour d'appel a décidé que l'exclusion générale stipulée à l'article 4.10, qui concernait « les dommages matériels et immatériels causés par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux […] ayant pris naissance dans l'enceinte des établissements dont l'assuré est propriétaire, locataire ou occupant », s'appliquait à cette extension de garantie dès lors que le préambule du chapitre III des conditions générales relatif aux extensions de garantie prévoyait que ces extensions étaient « accordées dans les termes, limites, et exclusions du contrat, auxquels il n'est pas expressément dérogé », l'extension ne dérogeant qu'à la clause d'exclusion stipulée à l'article 4.26 des conditions générales ; qu'en se prononçant ainsi, par la seule référence à une clause d'articulation des conditions générales et particulières, sans rechercher, comme elle y était invitée par la société Celimat, si les conditions particulières devaient prévaloir sur les conditions générales en ce cas précis, dans la mesure où elles étaient inconciliables puisque l'extension de garantie souscrite, en ce qu'elle couvrait les dommages causés aux biens confiés à la société Celimat, concernait nécessairement des dommages survenant dans les locaux de cette société à la suite de sinistres procédant de causes telles que l'incendie, l'explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant décrit l'articulation des différentes stipulations de la police d'assurance, ce dont il résultait que l'extension de garantie des dommages causés aux biens confiés prévue dans les conditions particulières n'était pas inconciliable avec l'exclusion générale des dommages causés dans l'établissement par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche dont fait état le moyen que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, qui est recevable pour être né de la décision attaquée :

Vu l'article L. 113-1 du code des assurances ;

Attendu que pour débouter la société Celimat de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt, après avoir rappelé que selon l'article 4.10 des conditions générales ne sont pas garantis les dommages matériels et immatériels causés par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux ayant pris naissance dans l'enceinte des établissements dont l'assuré est propriétaire, locataire ou occupant, retient qu'il n'y a pas de raison pour écarter cette exclusion de garantie, claire, précise et limitée, qui ne vide pas la clause litigieuse de son contenu, la responsabilité de l'entreprise pouvant être engagée à l'égard des biens confiés pour bien d'autres causes qu'un incendie survenu dans ses locaux ;

Qu'en se déterminant ainsi, par voie d'affirmation générale, sans préciser l'étendue de la garantie subsistant après application de la clause d'exclusion, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Celimat la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Celimat

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SARL Celimat de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation au titre des dommages subis par les biens à elle confiés lors de l'incendie de ses locaux survenu le 7 novembre 2011, dirigées contre la société Axa France Iard, dont le contrat d'assurance « Responsabilité civile entreprise » exclut cette garantie ;

AUX MOTIFS QUE les demandes de la Sarl Celimat sont fondées exclusivement sur l'application de la police d'assurance de la responsabilité civile de l'entreprise (nº4668865804) avec une option de garantie au titre des biens confiés à l'entreprise par des tiers, souscrite à effet du 22 juin 2010 auprès de la SA AXA France Iard, à la suite d'un sinistre d'incendie survenu dans ses locaux professionnels le 7 novembre 2011 ; […] que, par contre, son moyen subsidiaire d'exclusion des dommages causés par un incendie (pages 5 et 6 des conclusions) apparaît bien fondé ; que l'exclusion générale de garantie des dommages causés par un incendie (article 4.10 des conditions générales nº460642 B, visées dans les conditions particulières du 15 septembre 2010 - pièces nº3 et 4) n'est pas visée expressément par la dérogation figurant dans l'option de garantie spécifique des biens confiés souscrite, laquelle ne vise que l'article 4.26. des conditions générales, justement relative aux biens confiés, uniquement ; que l'extension de garantie spécifique relative aux biens confiés, figurant au chapitre III des conditions générales, intitulé « Extensions de garantie », est ainsi rédigée : « Par dérogation à l'article 4.26 du chapitre IV - Exclusions générales - la garantie s'applique aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile incombant à l'assuré en raison des dommages causés aux biens qui lui sont confiés dans le cadre des activités définies aux conditions particulières » ; mais que l'article 1.1 des conditions générales précise clairement à cet égard : « Le contrat garantit l'assuré, sous réserve des exclusions visées au chapitre IV «Exclusions générales», contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile découlant de l'activité définie aux conditions particulières, et résultant de dommages corporels, matériels et immatériels, causés aux tiers avant ou après la livraison d'un produit ou l'achèvement d'une prestation de travaux » ; que l'article 4.10 des conditions générales, au sein du chapitre IV intitulé « Exclusions générales » stipule en effet : « Les dommages matériels et immatériels causés par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux, ayant pris naissance dans l'enceinte des établissements dont l'assuré est propriétaire, locataire ou occupant à un titre quelconque pour une période supérieure à 30 jours consécutifs (Ne sont pas garantis) » ; que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de commerce de Montpellier, il n'y a pas de raison pour écarter cette exclusion de garantie, claire, précise et limitée, qui ne vide pas la clause litigieuse de son contenu, la responsabilité de l'entreprise pouvant être engagée à l'égard de biens confiés pour bien d'autres causes qu'un incendie survenu dans ses locaux ; qu'en effet, le préambule du chapitre III des conditions générales de la police d'assurance, relatif aux extensions de garantie, est ainsi rédigé notamment : « Les garanties explicitées ci-après sont accordées, si mention est faite aux conditions particulières du contrat. Elles sont accordées dans les termes, limites et exclusions du contrat, auxquels il n'est pas expressément dérogé et sous réserve des dispositions particulières ci-après » ; qu'il convient donc, infirmant le jugement déféré, de débouter la Sarl Celimat de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation des conséquences dommageables de l'incendie survenu dans ses locaux, à [Localité 1], le 7 novembre 2011, concernant des biens qui lui avaient été confiés par des tiers, susceptibles d'engager sa responsabilité civile envers ces derniers ;

1) ALORS QUE les clauses des conditions particulières d'une police d'assurance prévalent sur celles des conditions générales au cas où les premières sont inconciliables avec les secondes ; qu'en l'espèce, la société Celimat avait souscrit, dans les conditions particulières, à l'extension de garantie « Dommages aux biens confiés » (selon laquelle « la garantie s'applique aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile incombant à l'assuré en raison des dommages causés aux biens qui lui sont confiés dans le cadre des activités définies aux conditions particulières » (p. 6 art. 3.1 CG) ; que la cour d'appel a décidé que l'exclusion générale stipulée à l'article 4.10, qui concernait « les dommages matériels et immatériels causés par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux […] ayant pris naissance dans l'enceinte des établissements dont l'assuré est propriétaire, locataire ou occupant », s'appliquait à cette extension de garantie dès lors que le préambule du chapitre III des conditions générales relatif aux extensions de garantie prévoyait que ces extensions étaient « accordées dans les termes, limites, et exclusions du contrat, auxquels il n'est pas expressément dérogé », l'extension ne dérogeant qu'à la clause d'exclusion stipulée à l'article 4.26 des conditions générales ; qu'en se prononçant ainsi, par la seule référence à une clause d'articulation des conditions générales et particulières, sans rechercher, comme elle y était invitée par la société Celimat (concl., p. 6), si les conditions particulières devaient prévaloir sur les conditions générales en ce cas précis, dans la mesure où elles étaient inconciliables puisque l'extension de garantie souscrite, en ce qu'elle couvrait les dommages causés aux biens confiés à la société Celimat, concernait nécessairement des dommages survenant dans les locaux de cette société à la suite de sinistres procédant de causes telles que l'incendie, l'explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QU'une clause d'exclusion doit être réputée non écrite lorsqu'elle prive la garantie de sa substance ; qu'en l'espèce, l'article 4.10 des conditions générales, dont la cour d'appel a rappelé la teneur excluait la garantie des « dommages matériels et immatériels causés par un incendie, une explosion, un phénomène d'origine électrique ou les eaux ayant pris naissance dans l'enceinte des établissements dont l'assuré est propriétaire, locataire ou occupant à un titre quelconque pour une période supérieure à 30 jours consécutifs » ; qu'à supposer que cette exclusion ait pu inclure les dommages aux biens confiés sans être incompatible avec la souscription d'une extension de garantie de ce type de dommages, dès lors qu'ils survenaient dans les locaux de l'assuré et procédaient d'une des causes énumérées, il en résultait nécessairement, au regard de l'activité de la société Celimat, qui consistait notamment dans l'implantation, dans ses locaux, de circuits électroniques sur des matériels confiés par des clients, que la clause d'exclusion litigieuse privait l'extension de garantie souscrite de toute réelle substance ; qu'en affirmant que la clause d'exclusion « ne vide pas la clause [d'extension] litigieuse de son contenu, la responsabilité de l'entreprise pouvant être engagée à l'égard de biens confiés pour bien d'autres causes qu'un incendie survenu dans ses locaux », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 113-1 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-24561
Date de la décision : 27/04/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 23 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 avr. 2017, pourvoi n°15-24561


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.24561
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