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20/03/2024 | FRANCE | N°12400140

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 mars 2024, 12400140


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


MY1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 20 mars 2024








Cassation




Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 140 F-D


Pourvoi n° M 22-23.305




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



r> ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2024


La société MKM, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 22-23.305 contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2022 p...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mars 2024

Cassation

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 140 F-D

Pourvoi n° M 22-23.305

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 20 MARS 2024

La société MKM, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 22-23.305 contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2022 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Patrick Metz et Caroline Huck notaires associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de lasociété MKM, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Patrick Metz et Caroline Huck notaires associés, après débats en l'audience publique du 30 janvier 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1.Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 23 septembre 2022), suivant acte établi le 19 avril 2012 par la SCP notariale Patrick Metz et Caroline Huck (le notaire), la société MKM, exerçant une activité de location d'immeubles, a acquis de la société Antonin un bien immobilier à usage commercial comprenant un local libre de toute location et occupation et un local donné à bail commercial.

2. Au titre des déclarations fiscales, l'acte mentionnait que le vendeur déclarait, d'une part, être assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), que l'immeuble vendu était achevé depuis plus de cinq ans et que son acquisition lui avait ouvert droit à déduction de la TVA, de sorte que la présente vente en était exonérée en application de l'article 261 5. 2° du code général des impôts (CGI), d'autre part, vouloir toutefois opter pour le régime de la TVA sur le prix total, ainsi que l'article 260 5° bis du même code lui en laissait la possibilité.

3. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de la TVA en se fondant sur l'article 257 bis du CGI qui prévoit que les ventes de l'universalité totale ou partielle de biens sont exonérées de plein droit de la TVA, sans option pour le contribuable, lorsqu'elles sont réalisées au profit d'une personne qui entend exploiter l'universalité.

4. La société MKM a engagé une action en responsabilité contre l'Etat pour obtenir une indemnisation à hauteur de la TVA dont elle s'est acquittée et dont le remboursement lui a été refusé et la réparation de préjudices moral et financier. Par arrêt du 30 novembre 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a jugé que l'administration avait remis en cause à bon droit la déductibilité de la TVA appliquée à tort à l'occasion d'une acquisition qui devait être regardée comme un transfert d'une partie autonome d'une entreprise au sens de l'article 257 bis du CGI.

5. La société MKM a assigné le notaire en responsabilité et indemnisation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. La société MKM fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de dommages et intérêts, alors « que le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires, se prononcer en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, domaine qui relève de la compétence du juge administratif ; qu'en se fondant, pour débouter la société MKM de son action en responsabilité dirigée contre la SCP Patrick Metz et Caroline Huck, sur la consultation établie le 31 mai 2018 par le Centre notarial d'assistance fiscale concluant que l'article 257 bis du code général des impôts ne s'appliquait pas à la vente litigieuse et en relevant que cette argumentation, qui n'avait pas été soumise à la juridiction administrative, n'apparaissait pas en contradiction avec l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 30 novembre 2017 quand il appartenait au juge administratif, exclusivement compétent pour en connaître, de trancher la question portant sur le champ d'application de la dispense de TVA prévue par l'article 257 bis du code général des impôts, dont dépendait la solution du litige opposant l'acquéreur et le notaire, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, ensemble l'article L. 199 du livre des procédures fiscales. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

7. Le notaire conteste la recevabilité du moyen comme étant contraire à la thèse soutenue par la société MKM devant la juridiction du fond.

8. Le moyen n'est cependant pas contraire à l'argumentation développée par la société MKM qui soutenait que, si le jugement de la juridiction administrative était contestable, il établissait néanmoins la responsabilité du notaire.

9. Le moyen est donc recevable

Bien-fondé du moyen

Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et l'article L. 199 du livre des procédures fiscales :

10. Il résulte de ces textes qu'il appartient au juge judiciaire, compétent pour se prononcer sur la responsabilité d'un notaire, de transmettre à la juridiction administrative, exclusivement compétente pour en connaître, la question du champ d'application de la dispense de TVA prévue à l'article 257 bis du CGI, dont dépend la solution du litige et de surseoir à statuer jusqu'à la décision sur cette question.

11. Pour rejeter la demande indemnitaire de la société MKM, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi qu'en soumettant la vente à la TVA sur option du vendeur le notaire a fait application d'un régime fiscal inapplicable, qu'il se prévaut d'une consultation postérieure à l'arrêt du 30 novembre 2017 établie par le Centre notarial d'assistance fiscale considérant que le bien ne pouvait être qualifié de local affecté à une activité locative, de sorte que la dispense de taxation n'avait pas vocation à s'appliquer et que le vendeur était fondé à opter pour l'application de cette taxe et en déduit que, sur la base d'autres éléments de preuve, le redressement aurait pu être invalidé.

12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Patrick Metz et Caroline Huck notaires associés aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Patrick Metz et Caroline Huck notaires associés et la condamne à payer à la société MKM la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400140
Date de la décision : 20/03/2024
Sens de l'arrêt : Cassation

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 23 septembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 mar. 2024, pourvoi n°12400140


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Françoise Fabiani - François Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400140
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