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02/04/2012 | FRANCE | N°T1203864

France | France, Tribunal des conflits, 02 avril 2012, T1203864


N° 3864

Conflit positif

Préfet de l'AudeSARL Soleil Energie plus c/ Electricité de France

M. Jacques Arrighi de CasanovaRapporteur

M. Didier Boccon-GibodCommissaire du gouvernement

Séance du 5 mars 2012Lecture du 2 avril 2012

LE TRIBUNAL DES CONFLITS

Vu la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant la SARL Soleil Energie plus à la société anonyme Electricité de France (EDF) ;

Vu le déclinatoire de compétence adressé le 13 septemb

re 2011 au procureur de la République de Carcassonne par le préfet de l'Aude ;
Vu l'ordonnance du vice-prési...

N° 3864

Conflit positif

Préfet de l'AudeSARL Soleil Energie plus c/ Electricité de France

M. Jacques Arrighi de CasanovaRapporteur

M. Didier Boccon-GibodCommissaire du gouvernement

Séance du 5 mars 2012Lecture du 2 avril 2012

LE TRIBUNAL DES CONFLITS

Vu la lettre par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant la SARL Soleil Energie plus à la société anonyme Electricité de France (EDF) ;

Vu le déclinatoire de compétence adressé le 13 septembre 2011 au procureur de la République de Carcassonne par le préfet de l'Aude ;
Vu l'ordonnance du vice-président du tribunal de commerce de Carcassonne du 24 octobre 2011 qui a rejeté ce déclinatoire de compétence et a statué au fond ;
Vu l'arrêté du 28 octobre 2011 par lequel le préfet a élevé le conflit ;
Vu, enregistré le 17 novembre 2011 au parquet du tribunal de grande instance de Carcassonne, le mémoire présenté par la SARL Soleil Energie plus et tendant à l'annulation de l'arrêté de conflit aux motifs qu'il est irrecevable, que la société EDF a partiellement fait droit aux demandes présentées au tribunal de commerce et que le litige avait été engagé avant la loi du 12 juillet 2010 ;
Vu le mémoire présenté pour la société EDF, tendant à ce que le Tribunal des conflits décide qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la question de compétence en raison du désistement de son appel contre l'ordonnance du 24 octobre 2011 ;
Vu le nouveau mémoire présenté par la SARL Soleil Energie plus, tendant à ce que le Tribunal des conflits décide qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la question de compétence en raison du protocole transactionnel conclu entre elle et la société EDF ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 ;
Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 ;
Vu le code de l'énergie ;
Vu le code de l'organisation judiciaire ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jacques Arrighi de Casanova, membre du Tribunal,- les observations de la SCP Coutard, Munier-Apaire, pour Electricité de France, - les conclusions de M. Didier Boccon-Gibod, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 314-1 du code de l'énergie, codifiant l'article 10 de la loi du 10 février 2000, la société Electricité de France (EDF) est tenue de conclure, lorsque les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l'achat de l'énergie électrique photovoltaïque ; que, selon l'article L. 314-7 de ce code, qui reprend les dispositions ajoutées à cette loi par celle du 12 juillet 2010, les contrats conclus en application de l'article L. 314-1 sont des contrats administratifs ;
Considérant que la société Soleil Energie plus a assigné EDF devant le juge des référés du tribunal de commerce de Carcassonne, le 26 août 2011, en se prévalant de l'obligation d'achat résultant de ces dispositions, afin qu'EDF soit condamnée à lui verser une provision au titre des sommes résultant de cette obligation ; que le préfet de l'Aude, estimant que cette contestation relevait de la juridiction administrative, a présenté au tribunal, le 13 septembre 2011, un déclinatoire de compétence ; que, par ordonnance du 24 octobre 2011, le président du tribunal de commerce de Carcassonne a rejeté ce déclinatoire comme irrecevable et a statué sur les prétentions de la société Soleil Energie plus ; que, par arrêté du 28 octobre 2011, le préfet a élevé le conflit ;
Considérant, en premier lieu, que, si EDF a fait appel de cette ordonnance, puis s'en est désistée, cette circonstance est sans incidence sur la procédure de conflit qui n'a pas perdu son objet, dès lors, d'une part, qu'en raison de l'intervention d'un arrêté de conflit, l'extinction de la procédure d'appel ne saurait rendre définitive l'ordonnance rejetant le déclinatoire et que, d'autre part, le préfet n'a pas rapporté son arrêté ; que, pour le même motif, la transaction conclue le 28 décembre 2011 entre la société Energie plus et la société EDF ne fait pas obstacle à ce que le Tribunal des conflits se prononce sur l'arrêté de conflit dont il demeure saisi ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1970, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 122-2 du code de l'organisation judiciaire, que le procureur de la République près le tribunal de grande instance peut exercer le ministère public devant toutes les juridictions du premier degré établies dans son ressort ; que, les dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 1er juin 1828 pouvant depuis lors s'appliquer devant le tribunal de commerce, c'est à tort que le président du tribunal de commerce de Carcassonne a jugé le déclinatoire irrecevable au motif que ces dispositions ne pourraient s'appliquer à cette juridiction ; que, conformément à l'article 8 de la même ordonnance, il lui incombait de surseoir à statuer pendant le délai laissé au préfet pour, s'il l'estimait opportun, élever le conflit ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Carcassonne du 24 octobre 2011 doit, en tout état de cause, être déclarée nulle et non avenue en tant qu'elle statue au fond sur les prétentions de la société Soleil Energie plus ;
Considérant, enfin, que, dès lors que les contrats en cause ont un caractère administratif en vertu des dispositions législatives mentionnées ci-dessus et que l'action a été engagée après la publication de la loi du 12 juillet 2010, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître du litige dont le tribunal de commerce a été saisi par la société Soleil Energie plus à l'encontre d'EDF ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêté de conflit pris le 28 octobre 2011 par le préfet de l'Aude est confirmé.
Article 2 : Sont déclarées nullles et non avenues la procédure engagée par la société Soleil Energie plus contre la société Electricité de France devant le tribunal de commerce de Carcassonne et l'ordonnance du président de ce tribunal du 24 octobre 2011.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : T1203864
Date de la décision : 02/04/2012

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à un contrat administratif - Contrat administratif - Définition - Qualification donnée par la loi à un contrat conclu entre personnes privées - Cas - Contrat d'achat d'électricité entre EDF et des producteurs autonomes d'électricité - Conditions - Défaut d'instance en cours à la date d'entrée en vigueur de la loi

Dès lors que les contrats d'achat d'électricité visés à l'article L. 314-1 du code de l'énergie, codifiant l'article 10 de la loi du 10 février 2000, ont un caractère administratif en vertu des dispositions de l'article L. 314-7 du même code, qui reprend les dispositions de la loi du 12 juillet 2010, et que l'action a été engagée après la publication de cette loi, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître du litige opposant une société productrice d'électricité à EDF relativement à l'obligation d'achat


Références :

Sur le numéro 1 : article L. 122-2 du code de l'organisation judiciaire

articles 6 et 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828
Sur le numéro 2 : loi des 16-24 août 1790

décret du 16 fructidor an III

loi du 24 mai 1872

ordonnance du 1er juin 1828

ordonnance des 12-21 mars 1831

décret du 26 octobre 1849

articles L. 314-1 et L. 314-7 du code de l'énergie

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Carcassonne, 24 octobre 2011

Sur le n° 1 :Sur la décision nulle et non avenue lorsqu'elle statue au fond après avoir écarté le déclinatoire de compétence, dans le même sens que :Tribunal des conflits, 16 janvier 1995, n° 09-42.938, Bull. 1995, T. conflits, n° 1 (1) ;Tribunal des conflits, 18 juin 2007, n° 07-03.627, Bull. 2007, T. conflits, n° 25 (2), et les décisions citées ;Tribunal des conflits, 12 décembre 2011, n° 11-03.841, Bull. 2011, T. conflits, n° (1). Sur le n° 2 : Dans le même sens que :Tribunal des conflits, 5 mars 2012, n° 12-03.843, Bull. 2012, T. conflits, n° 3


Composition du Tribunal
Président : M. Gallet
Avocat général : M. Boccon-Gibod (commissaire du gouvernement)
Rapporteur ?: M. Arrighi de Casanova
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2012:T1203864
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