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23/04/2024 | FRANCE | N°22/07527

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 4ème chambre 1ère section, 23 avril 2024, 22/07527


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




4ème chambre 1ère section

N° RG 22/07527
N° Portalis 352J-W-B7G-CXJPX

N° MINUTE :




Assignation du :
05 Mars 2019







JUGEMENT
rendu le 23 Avril 2024
DEMANDERESSE

ASSOCIATION POUR LA GESTION DES UTILISATEURS DU RESTAURANT INTERENTREPRISES LE MONGE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocats au ba

rreau de PARIS, vestiaire #P0208


DÉFENDERESSE

S.A.S. PEOPLE AND BABY
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Maître Harmonie RENARD de la SELARL GAIST & RENARD, avocats au ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

4ème chambre 1ère section

N° RG 22/07527
N° Portalis 352J-W-B7G-CXJPX

N° MINUTE :

Assignation du :
05 Mars 2019

JUGEMENT
rendu le 23 Avril 2024
DEMANDERESSE

ASSOCIATION POUR LA GESTION DES UTILISATEURS DU RESTAURANT INTERENTREPRISES LE MONGE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0208

DÉFENDERESSE

S.A.S. PEOPLE AND BABY
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Maître Harmonie RENARD de la SELARL GAIST & RENARD, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #A0850

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Géraldine DETIENNE, Vice-Présidente
Julie MASMONTEIL, Juge
Pierre CHAFFENET, Juge

assistés de Nadia SHAKI, Greffier,

Décision du 23 Avril 2024
4ème chambre 1ère section
N° RG 22/07527 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXJPX

DÉBATS

A l’audience du 06 Février 2024 tenue en audience publique devant Madame DETIENNE, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

L’association pour la gestion des utilisateurs du restaurant interentreprises Le Monge (ci-après l'association des utilisateurs du RIE Le Monge) a notamment pour objet l’aménagement, la gestion et l’administration directement ou indirectement du restaurant interentreprises Le Monge (ci-après le RIE Le Monge) sis [Adresse 1] à [Localité 5]).

Les statuts de l’association prévoient que sont de plein droit membres « Actifs » de l’association, tous les utilisateurs du restaurant interentreprises ou sociétés qui deviendront locataires dans l’ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 5]) en vertu d’un bail donnant vocation à la jouissance de locaux à usage de bureaux.

Par acte du 19 février 2010, la SAS People and Baby a pris à bail des locaux à usage de bureaux commerciaux dépendant de cet ensemble immobilier.

Le 3 juin 2016, la société People and Baby et son bailleur, la société RREEF Investment Gmbh, ont régularisé un nouveau contrat de bail commercial à effet du 1er juin 2016 prévoyant, concernant le restaurant, que le preneur « ne sera redevable d’aucune redevance à ce titre, ni d’aucune charge liée audit RIE ».

Par lettre du 6 octobre 2017, la société Cegestim, mandataire de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge, a mis en demeure la société People and Baby de régler la somme de 53.119,09 euros au titre des redevances et charges lui incombant en vertu de son adhésion à l'association.

Ses démarches amiables ultérieures étant demeurées vaines, l'association des utilisateurs du RIE Le Monge a, par exploit du 5 mars 2019, fait citer la société People and Baby devant ce tribunal.

L'affaire a été radiée le 25 janvier 2022. L'association des utilisateurs du RIE Le Monge a sollicité son rétablissement par conclusions notifiées le 4 mars 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 26 septembre 2022, l'association des utilisateurs du RIE Le Monge demande au tribunal de :
« Vu les articles 1194, 1217 et 1231-6 du Code civil,
Vu les statuts,
Vu les éléments de fait et de droit allégués.
DEBOUTER la société PEOPLE AND BABY de l’intégralité de ses demandes.
CONDAMNER la société PEOPLE & BABY au paiement de la somme de 50.443,86 € au titre des redevances et charges du restaurant interentreprises impayées au 6 février 2019 (provisions charges courante au 1er juillet 2016) avec intérêts au taux légal qui doivent courir à compter:
- du 12 juin 2018, date de la sommation de payer sur un montant de 49.631,78 €,
- de la date de signification du présent acte pour le solde.
CONDAMNER la société PEOPLE & BABY au paiement d’une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts.
ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
CONDAMNER la société PEOPLE & BABY à verser à l’Association des utilisateurs du RIE « Le Monge » une indemnité d’un montant de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens. ».

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par la voie électronique le 19 septembre 2022, la société People and Baby demande au tribunal de :
« Vu les articles 10, 10-1 et 14-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis,
Vu l’article 61-1 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965
Vu l’article L 211-3 du Code de l’organisation judiciaire
Vu les articles 73 et 75 du Code de procédure civile,
Vu les articles 696 et 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
A TITRE LIMINAIRE
PRENDRE ACTE du caractère fantaisiste et infondé des demandes formulées par l’Association du RIE Le Monge
A TITRE PRINCIPAL
DIRE ET JUGER que la société PEOPLE AND BABY n’est redevable d’aucune charge au regard du nouveau contrat de bail commercial conclu,
DIRE ET JUGER que le principe d’exception d’inexécution est pleinement applicable et permet de s’affranchir du paiement des redevances ne présentant aucune contrepartie,
En conséquence,
REJETER l’intégralité des demandes de l’Association du RIE Le Monge,
TOUJOURS A TITRE PRINCIPAL
REJETER l’intégralité des demandes de l’Association du RIE LE MONGE, celle-ci ne présentant pas une créance ayant le caractère certain, liquide et exigible.
CONSTATER que l’Association RIE LE MONGE a imputé, à tort, un montant de charges au titre du 1er semestre 2016

En conséquence,
CONDAMNER l’Association RIE LE MONGE à verser à la société PEOPLE AND BABY la somme de 788,92 € à titre de restitution de l’indu
EN TOUT ETAT DE CAUSE
CONDAMNER l’Association du RIE Le Monge aux entiers dépens
CONDAMNER l’Association du RIE Le Monge au paiement de la somme de 2.500,00 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ».

La clôture de la procédure a été prononcée le 4 octobre 2022. L'affaire, initialement fixée à l'audience du 6 juin 2023, a été renvoyée à l'audience du 6 février 2024 en raison de l'indisponibilité du juge rapporteur.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux dernières écritures des parties conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes tendant à voir « dire et juger », « prendre acte » et « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes. Il ne sera donc pas statué sur ces « demandes » qui ne donneront pas lieu à mention au dispositif.

Il y a lieu également de rappeler qu'en application de l'alinéa 2 de l’article 768 du code de procédure civile, « Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. ».

Le tribunal n'est donc saisi d'aucune demande tendant à voir écarter certaines pièces des débats, demande qui, en tout état de cause, ne pouvait pas prospérer en ce qu'elle était motivée par le fait que les pièces en cause concernaient une période postérieure à celle au titre de laquelle la créance est revendiquée.

Sur la demande en paiement de la somme de 50.443,86 euros

Il ressort du décompte produit par l'association des utilisateurs du RIE Le Monge que la somme de 50.443,86 euros qu'elle sollicite aux termes du dispositif de ses conclusions au titre « des redevances et charges » comporte, d'une part, des redevances et charges des exercices 2010 à 2016 d'un montant total de 49.580,78 euros et, d'autre part, des frais liés à des démarches mises en œuvre aux fins d'obtenir le remboursement de sa créance d'un montant de 863,08 euros. Ces créances de nature différente seront examinées successivement.

Sur les redevances et charges

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge fait valoir que le nouveau contrat de bail signé par la société People and Baby n'ayant pris effet qu'à compter du 1er juin 2016, celle-ci était, jusqu'à cette date, adhérente de l'association et, partant, tenue au paiement des redevances et charges. Elle prétend alors justifier d'une créance certaine, liquide et exigible dès lors que l'ensemble des budgets et comptes de la période en litige a été régulièrement approuvé lors d'assemblées générales qui n'ont pas été contestées.

La société People and Baby oppose, en premier lieu, que les demandes de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge se heurtent à l'accord transactionnel conclu avec son bailleur et au nouveau contrat de bail signé en conséquence, ce nouveau contrat ayant annulé et remplacé le précédent et prévoyant expressément qu'elle ne sera redevable d'aucune somme au titre du RIE.

Elle prétend, en deuxième lieu, au visa des articles 1217 et 1219 du code civil, qu'elle est fondée à ne pas exécuter son obligation de paiement dès lors qu'elle n'a jamais fréquenté le restaurant et n'entendait pas le mettre à disposition de ses salariés, les sommes sollicitées étant de ce fait selon elle dépourvues de toute contrepartie. Elle considère que, pour ce qui concerne l'association des utilisateurs du RIE Le Monge, la gravité de l'inexécution est caractérisée par le fait que celle-ci savait qu'elle n'utilisait pas le restaurant et qu'elle a tardé à solliciter le paiement de sa créance puis à saisir la juridiction de céans.

En dernier lieu, la société défenderesse fait valoir que l'association des utilisateurs du RIE Le Monge ne démontre pas détenir une créance certaine, liquide et exigible à son encontre.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable à la cause, « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi. ».

En application de l’article 1315 du même code, « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. ».

En l'espèce, le contrat de bail signé par la société People and Baby le 9 février 2010 comporte un article 9 « Restaurant Interpertreprises » libellé dans les termes suivants :

« 9.1 Mise à disposition d'un restaurant interentreprises

Le Bailleur met à la disposition du Preneur, ses employés et ses visiteurs, le restaurant interentreprises de l’immeuble.

A cet égard le Preneur s’engage à adhérer à l’Association pour la Gestion des Utilisateurs du Restaurant Interentreprises « Le Monge » (…).

Le Preneur est informé que cette association a donné mandat à un gestionnaire pour organiser et gérer ce restaurant et passer tout contrat.

9.2 Redevances et charges du restaurant interentreprises

Le Preneur supportera en sus de la redevance du RIE telle que visée à l'article 6.1 des présentes sa quote-part des charges dudit restaurant comportant notamment des frais d'entretien, de fonctionnement, de remplacement du petit et du gros matériel, du personnel, la rémunération du traiteur et d'une manière générale tous les frais relatifs à la gestion ainsi qu'à l'exploitation du restaurant, arrêtés et répartis au prorata des superficies par le gestionnaire nommé par les adhérents de l'association, de telle sorte que le Bailleur n'ait à supporter aucune charge liée à l'existence et/ou au fonctionnement dudit restaurant.

Le remboursement des charges s'effectuera par appel de provision du gestionnaire de ladite association. ».

L’article 6.1 du bail prévoit que :

« En sus du loyer et des charges définies au présent bail, le Preneur versera en contrepartie de la mise à disposition des surfaces dédiées au RIE une redevance annuelle hors taxes et hors charges de 12.612,60 € (...), payable par trimestre, en même temps que le loyer.

Elle sera indexée annuellement selon les mêmes modalités que le loyer, prévues à l'article 6.3ci-dessus.

Le premier terme de la redevance RIE sera calculée prorata temporis en fonction du temps restant à courir jusqu'à la fin du trimestre en cours.

La redevance RIE et les charges afférentes au RIE visées à l'article 9 sont entièrement indépendantes du niveau de fréquentation du RIE par le Preneur, qui en sera redevable pendant toute la durée du bail, quand bien même il n'utiliserait pas du tout le RIE. ».

L'article 7 des statuts de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge mentionne :

« Tous les membres « Actifs » seront membres de plein droit à dater du jour de leur entrée en jouissance dans les lieux. Etant précisé, pour les locataires, que cette obligation d'adhésion résulte de l'engagement formel stipulé aux termes de leurs baux. (...)

Le seul fait d’adhérer à l’Association implique l’engagement des adhérents de participer à toutes dépenses et charges du Restaurant interentreprises. ».

Sur l'incidence du nouveau bail conclu par la société People and Baby

Si le contrat de bail signé par la société People and Baby le 3 juin 2016 mentionne en son préambule que les parties ont décidé de conclure un nouveau bail commercial qui « annule et remplace » le bail initial, il prévoit dans le même temps que « les Parties, de manière amiable et par anticipation ont décidé de résilier purement et simplement le Bail initial à compter de la date de prise d’effet du présent Bail », date fixée au 1er juin 2016. Il ressort sans doute possible de ces mentions que le nouveau bail n'a pris effet qu'à compter du 1er juin 2016 et la société People and Baby ne peut se prévaloir d'aucune annulation du bail initial susceptible de la décharger des obligations lui incombant au titre de la période d'application de celui-ci.

Certes, l'article 8 du nouveau contrat indique « Le Preneur ne souhaitant pas bénéficier du RIE, il ne sera redevable d'aucune redevance à ce titre, ni d'aucune charge liée audit RIE ». Cependant, cette disposition, dont les termes sont dépourvus de toute ambiguïté, ne concerne que la période ayant commencé à courir le 1er juin 2016 et aucune autre disposition du contrat ne vient décharger la société People and Baby des obligations lui incombant au titre du RIE pour la période antérieure. Si la société People and Baby prétend qu'elle a pensé être exonérée du paiement des redevances du RIE et qu'il ne fait aucun doute qu'il s'agissait du sens du protocole d'accord transactionnel conclu avec son bailleur, elle ne se prévaut d'aucun élément précis pour justifier de ses allégations, ne citant aucune des dispositions de ce protocole et ne développant aucune argumentation pour démontrer que cet accord puisse être opposé à l'association des utilisateurs du RIE Le Monge qui y est tiers.

Dès lors, c'est à tort que la société People and Baby prétend que les demandes de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge se heurtent aux termes du protocole d'accord transactionnel conclu avec son bailleur et du nouveau contrat de bail.

Sur l'exception d'inexécution et l'absence de contrepartie au paiement des redevances

A titre liminaire, il sera précisé que, compte tenu de la date de conclusion du bail en vertu duquel le paiement des redevances est sollicité, la société People and Baby ne peut pas invoquer les articles 1217 et 1219 du code civil issus de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 entrée en vigueur le 1er octobre 2016, seules les dispositions du code civil dans sa rédaction antérieure étant applicables au litige.

Il est toutefois de principe que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation si l’inexécution invoquée est suffisamment grave.

En l'espèce, la société People and Baby ne peut pas utilement se prévaloir d'une inexécution de ses obligations par l'association des utilisateurs du RIE Le Monge pour s'opposer à la demande en paiement. En effet, si elle affirme que, sur la période objet du litige, ses salariés n'ont pas eu accès au RIE, elle n'invoque aucune difficulté de fonctionnement du restaurant, le défaut d'utilisation de celui-ci résultant du choix des intéressés et l'article 6.1 du bail qui a force obligatoire entre les parties prévoit que la redevance et les charges afférentes au RIE sont « entièrement indépendantes du niveau de fréquentation du RIE par le Preneur, qui en sera redevable pendant toute la durée du bail, quand bien même il n'utiliserait pas du tout le RIE ». Dès lors, ni l'absence de fréquentation du restaurant par les salariés de la société, ni le fait que l'association ait eu connaissance de celle-ci, à les supposer avérés, ne sont susceptibles de caractériser une inexécution grave de ses obligations par l'association justifiant le défaut de paiement de la société People and Baby. Il en est de même du temps que l'association a attendu pour solliciter le paiement des sommes en cause et introduire la présente procédure qui est sans rapport avec l'obligation principale lui incombant en sa qualité d'exploitante du RIE.

Sur les charges des exercices 2010 à 2014

La société People and Baby conteste la créance alléguée à ce titre aux motifs, d'une part, que l'assemblée générale qui a approuvé les charges en cause s'est tenue le 5 mai 2014 alors que l'article 23 des statuts de l'association prévoit la tenue d'une assemblée générale au moins une fois par an dans les six mois suivant l’arrêté des comptes et, d'autre part, que lors de cette assemblée, les règles de quorum et de droit de vote n'ont pas été respectées.

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge explique qu'aucune assemblée générale ne s'est tenue entre 2008 et 2012 et qu'à la suite d'un changement de gestionnaire, les comptes des années 2008 à 2014 ont été présentés à l'assemblée générale qui les approuvés en première et deuxième lecture les 26 mars et 5 mai 2014. Elle conteste alors toute irrégularité dans la tenue de ces assemblées générales dont les votes n'ont pas été contestés.

Sur ce,

Il est constant que l'article 23 alinéa 4 des statuts de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge prévoit que l'assemblée générale se réunit au moins une fois par an dans les six mois suivant l’arrêté des comptes.

Cependant, le non-respect de ces dispositions ne saurait faire obstacle à la demande en paiement de l'association des utilisateurs du RIE Le Monge sous réserve qu'il soit justifié que les charges ont été régulièrement approuvées par l'assemblée générale de l'association.

L'article 29 des statuts de l'association prévoit que :
« Au moins une fois par an, il est tenu une Assemblée Générale Ordinaire.
Elle ne délibère valablement que si les membres « Actifs » présents ou représentés détiennent la moitié des droits de vote.
Elle délibère à la majorité des voix exprimées.
Au cas où le quorum ne serait pas atteint, une deuxième Assemblée serait convoquée dans les QUINZE JOURS. ».

Il ressort des pièces versées aux débats que l'assemblée générale du 5 mai 2014 s'est tenue en raison de l'absence de quorum suffisant lors de l'assemblée générale du 26 mars 2014 de sorte qu'elle pouvait valablement délibérer alors que les membres « Actifs » de l’association présents ou représentés ne détenaient pas la moitié des droits de vote. Quant aux règles de vote, elles ont été respectées dès lors que toutes les délibérations ont été adoptées à l'unanimité des membres actifs présents ou représentés. C'est par conséquent à tort que la société People and Baby se prévaut d'irrégularités à ce titre.

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge affirme en outre sans être contredite qu'aucune contestation n'a été formée à l'encontre de cette assemblée générale et la société People and Baby n'établit, ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité d'exercer un tel recours. Elle ne démontre pas davantage avoir sollicité la transmission des pièces justifiant du montant des charges appelées et s'être alors vu opposer un quelconque refus. L'assemblée générale du 5 mai 2014 a approuvé les comptes des exercices 2010 à 2013, leurs modalités de répartition ainsi que le budget de fonctionnement de l'exercice 2014 et les comptes de cet exercice ont ensuite été approuvés lors de l'assemblée générale du 15 septembre 2015 qui n'est l'objet d'aucune critique en défense. Dans ces conditions, la société People and Baby ne peut pas se prévaloir de l'absence de transmission des pièces justificatives des charges pour s'opposer à la demande en paiement formée dans le cadre de la présente procédure. Il sera au surplus relevé que l'association des utilisateurs du RIE Le Monge produit la facture du lave-vaisselle, seul poste de charges à l'encontre duquel la société People and Baby forme une critique précise.

Sur les charges de l'exercice 2015

La société People and Baby invoque l'irrégularité de l'assemblée générale du 5 mai 2014 qui a procédé au vote du budget prévisionnel de fonctionnement du RIE de l’exercice 2015 et l'absence de transmission dans le cadre de la présente procédure de documents justifiant le montant du budget de fonctionnement du RIE pour l’exercice 2015.

Sur ce,

Pour les motifs précédemment énoncés, les moyens tirés d'une irrégularité de l'assemblée générale du 5 mai 2014 et de l'absence de transmission de documents justificatifs sont inopérants. Le budget de fonctionnement de l'exercice 2015 a donc été régulièrement approuvé lors de l'assemblée générale du 5 mai 2014. Les comptes de cet exercice ont ensuite été approuvés lors de l'assemblée générale du 16 décembre 2016 à l'encontre de laquelle la société People and Baby ne formule aucune critique.

Sur les charges de l'exercice 2016

La société People and Baby fait valoir que faute pour l'association des utilisateurs du RIE Le Monge de produire le procès-verbal de l'assemblée générale ayant approuvé le budget de fonctionnement de l'exercice 2016, elle ignore sur la base de quel budget celle-ci se fonde pour solliciter les deux provisions sur charges figurant à son décompte. Elle soutient également que n'étant plus membre actif de l'association depuis le 1er juin 2016, elle ne peut pas être tenue au paiement des charges postérieures et considère que la somme de 788,92 euros doit de ce fait lui être remboursée.

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge oppose qu'aucune charge n'est sollicitée pour la période postérieure au 1er juin 2016 et conteste en conséquence tout trop-perçu.

Sur ce,

A titre liminaire, il sera relevé que l'article 14-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est inapplicable en l'espèce.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société People and Baby, l'association des utilisateurs du RIE Le Monge produit le procès-verbal de l'assemblée générale qui a approuvé le budget de fonctionnement de l'exercice 2016, en l'occurrence l'assemblée générale du 15 septembre 2015 en sa résolution n°6. Elle justifie également que les comptes de cet exercice ont été approuvés lors des assemblées générales des 17 octobre et 6 novembre 2017 à l'encontre desquelles il n'est formulé aucune critique.

Il ressort du décompte produit par la demanderesse que :
- une provision de 4.733,53 euros a été appelée pour la période du 1er janvier au 30 juin 2016,
- un paiement de 4.733,53 euros a été effectué par la société People and Baby le 17 octobre 2016,
- une provision de 2.179,90 euros a été appelée pour la période du 1er juillet 2016 au 30 septembre 2016,
- une somme de 3.538,31 euros a été portée au crédit du compte de la société le 31 décembre 2016 au titre du solde des charges de l'exercice 2016.

S'il est constant que la provision de 2.179,90 euros a été appelée à tort, elle n'a en définitive pas été imputée à la société People and Baby puisque son montant a été intégralement remboursé par la régularisation effectuée à la fin de l'année 2016, laquelle inclut également le mois de juin 2016. La société People and Baby ne justifie par conséquent d'aucune créance à ce titre et elle sera déboutée de sa demande tendant à voir condamner l'association des utilisateurs du RIE Le Monge à lui verser la somme de 788,92 euros.

Du tout, il résulte que l'ensemble des redevances et charges sollicitées au titre des exercices 2010 à 2016 est justifié, soit un montant total de 49.580,78 euros.

Sur les frais liés au recouvrement de la créance

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge fait valoir que ses démarches pré-contentieuses et contentieuses étaient justifiées par la carence de la société People and Baby qui n'a procédé à aucun règlement depuis quatre ans.

La société People and Baby oppose que la créance alléguée par l'association n'étant pas établie, les dispositions de l'article 10-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont pas applicables. Elle ajoute que les frais en cause ne sont pas justifiés et constituent soit des dépens, soit des frais irrépétibles.

Sur ce,

Sur le décompte produit, les frais en cause, d'un montant total de 863,08 euros, sont mentionnés comme suit :.
- « Frais de Mise en Demeure » : 51 euros,
- « LEROI commandt de payer Aff. People and Baby » : 320,84 euros,
- « Constitut° dossier Transmis à l'avocat » : 150,50 euros,
- « Guerrier & L. Prov. Honos avocat » : 120 euros,
- « Suivi dossier transmis à Maître Guerrier» : 220,74 euros.

En application de l’article 1315 du code civil, il appartient à l'association des utilisateurs du RIE Le Monge de justifier du bien-fondé des demandes qu'elle forme à ce titre tant dans leur principe que dans leur quantum.

Or, il sera relevé, en premier lieu, qu'elle n'invoque, au soutien de cette demande, aucune disposition des statuts ni aucun autre fondement textuel.

En second lieu, elle ne justifie pas du quantum des sommes réclamées, à l'exception de la somme de 320,84 euros dont le montant est justifié par la facture de l'huissier.

En troisième lieu, en l'absence de disposition statutaire particulière, ces sommes constituent des frais devant être pris en charge au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge sera par conséquent déboutée de la demande qu'elle forme de ce chef.

En définitive, la société People and Baby sera condamnée à payer à l'association des utilisateurs du RIE Le Monge la somme de 49.580,78 euros au titre des redevances et charges des exercices 2010 à 2016. Cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 12 juin 2018.

Sur la demande de dommages et intérêts

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge soutient qu'en dépit de ses nombreuses démarches amiables, la société People and Baby n'a procédé à aucun paiement depuis quatre ans et que sa résistance abusive lui a causé un préjudice financier direct et distinct de celui compensé par les intérêts moratoires en ce qu'elle a été privée des fonds nécessaires à une gestion normale et à l’entretien du restaurant.

La société People and Baby s'oppose à cette demande en faisant valoir, d'une part, que l'association des utilisateurs du RIE Le Monge qui a attendu plus d'un an et demi après son retrait de l'association pour solliciter le paiement de sa créance ne justifie pas du préjudice financier qu'elle allègue et, d'autre part, que sa contribution aux dépenses de fonctionnement du RIE n'était pas significative.

Sur ce,

L'association des utilisateurs du RIE Le Monge procédant par voie d'allégations générales et ne produisant aucune pièce susceptible de justifier du préjudice qu'elle prétend subir du fait du retard de paiement et qui serait distinct des intérêts moratoires, elle sera déboutée de la demande qu'elle forme de ce chef.

Sur les demandes accessoires

La société People and Baby qui succombe sera condamnée aux dépens et à verser à l'association des utilisateurs du RIE Le Monge la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L’exécution provisoire étant compatible avec la nature de l’affaire et justifiée par l’ancienneté du litige, il convient de l’ordonner.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

Condamne la SAS People and Baby à payer à l'association pour la gestion des utilisateurs du restaurant interentreprises Le Monge la somme de 49.580,78 euros au titre des redevances et charges des exercices 2010 à 2016 avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2018 ;

Déboute l'association pour la gestion des utilisateurs du restaurant interentreprises Le Monge de sa demande formée au titre des divers frais engagés pour recouvrer sa créance ;

Déboute l'association pour la gestion des utilisateurs du restaurant interentreprises Le Monge de sa demande de dommages et intérêts ;

Déboute la SAS People and Baby de sa demande en paiement de la somme de 788,92 euros ;

Condamne la SAS People and Baby à payer à l'association pour la gestion des utilisateurs du restaurant interentreprises Le Monge la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS People and Baby aux dépens ;

Ordonne l’exécution provisoire ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes comme inutiles ou mal fondées ;

Fait et jugé à Paris le 23 Avril 2024.

Le GreffierLa Présidente
Nadia SHAKIGéraldine DETIENNE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 4ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 22/07527
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;22.07527 ?
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