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10/02/2016 | FRANCE | N°13/05802

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 10 février 2016, 13/05802


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 10 FÉVRIER 2016



(Rédacteur : Madame Isabelle Lauqué, Conseiller)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 13/05802











SAS Vêtir



c/



Madame [N] [B]



















Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :>


LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 5 septembre ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 10 FÉVRIER 2016

(Rédacteur : Madame Isabelle Lauqué, Conseiller)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 13/05802

SAS Vêtir

c/

Madame [N] [B]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 5 septembre 2013 (RG n° F 13/00069) par le Conseil de Prud'hommes - formation paritaire - de [Localité 1], section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 1er octobre 2013,

APPELANTE :

SAS Vêtir, siret n° 322 424 342 04335, agissant en la personne de son

représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 1],

Représentée par Maître Laurent Seyte, avocat au barreau de Toulouse,

INTIMÉE :

Madame [N] [B], née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 2],

de nationalité française, demeurant [Adresse 2],

Représentée par Maître Nicolas Morand-Monteil, avocat au barreau de Bergerac,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 7 décembre 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Maud Vignau, Président,

Madame Marie-Luce Grandemange, Conseiller,

Madame Isabelle Lauqué, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière.

En présence de Madame Lucie Chimits, avocate stagiaire.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

La SAS Vêtir commercialise des chaussures et des vêtements au détail et exploite des magasins sous l'enseigne GEMO.

Elle relève de la Convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d'habillement du 30 Juin 1972 .

Madame [N] [B] a été embauchée en qualité d'employé de magasin par la SAS Vêtir dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée du 11 mai au 17 juin 2007 en raison d'un surcroît exceptionnel d'activité.

Le 18 Juin 2007, Madame [B] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel.

Entre le 18 juin 2007 et le 22 mai 2008, 33 avenants à son contrat de travail ont modifié la durée de son travail.

Par courrier du 21 avril 2008, la SA Vêtir a informé Madame [B] que sa candidature au poste de Responsable de Magasin avait été retenue et une formation lui était proposée à compter du 3 juin 2008 dans le magasin GEMO de Genneviliers.

A l'issue de sa formation, Madame [B] a été nommée en qualité de gérante directrice d'un magasin situé à [Localité 1].

Le 23 juin 2008, les parties ont signé un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, Madame [B] étant embauchée en qualité de Gérant-Directeur de succursale, statut cadre, moyennant une rémunération composées d'une partie fixe mensuelle de 1.144 € et d'une partie variable calculée sur la base du chiffre d'affaires.

Par lettre remise en main propre le 2 décembre 2009, la SAS Vêtir a convoqué Madame [B] à un entretien préalable en vue d'une éventuelle mesure

de licenciement et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 23 décembre 2009, la SAS Vêtir lui a notifié son licenciement pour faute grave en lui reprochant son refus des demandes de congés de son personnel, l'absence d'affichage des comptes-rendus du CE et de la note relative au renouvellement des élections professionnelles, le mauvais entretien des locaux du personnel, l'absence de prise en compte des situations personnelles difficiles, le dénigrement des décisions prises par l'entreprise...

Le 2 décembre 2010, Madame [B] a saisi le Conseil de Prud'hommes de [Localité 1] pour contester le bien fondé de son licenciement, demander la requalification de son contrat de travail de mai 2007 en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et voir juger qu'elle ne bénéficiait pas du statut cadre entre juin 2008 et décembre 2009.

Sur la base de ces contestations, elle formulait diverses demandes indem-nitaires et en rappel de salaires.

Par jugement en date du 5 septembre 2013, le Conseil de Prud'hommes de [Localité 1] a débouté Madame [B] de ses demandes de requalification de son contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, a jugé que Madame [B] bénéficiait du statut employé catégorie H (8) de décembre 2007 à juin 2008, et qu'elle bénéficiait du statut Cadre position B2 de juillet 2008 au 5 janvier 2010 et qu'enfin son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, le Conseil de Prud'hommes de [Localité 1] a condamné la SA Vêtir à payer à Madame [B] les sommes suivantes :

- 1.426,92 € bruts au titre du rappel de salaire et heures supplémentaires, congés

payés inclus, pour la période allant de décembre 2007 à juin 2008,

- 6.671,28 € bruts au titre de l'indemnité de préavis et congés payés y afférent,

- 1.212,96 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 18.000,00 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10.000,00 € de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

D'autre part, le Conseil a condamné la SAS Vêtir à lui remettre son attestation Pôle Emploi, son certificat de travail et son solde de tout compte rectifiés conformément au jugement, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard passé 15 jours à compter de la notification de la décision.

La SA Vêtir a été condamnée à rembourser aux organismes intéressés la totalité des indemnités de chômage versées à Madame [B], du jour de son licen-ciement au jour du prononcé du jugement, dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Le Conseil a débouté les parties de leurs plus amples demandes et a ordonné l'exécution provisoire de son jugement.

La SAS Vêtir a régulièrement interjeté appel de cette décision le 2 octobre 2013.

Par conclusion régulièrement déposées et développées oralement à l'audience du 7 décembre 2015 auxquelles la Cour se réfère expressément, elle conclut à la réformation partielle du jugement attaqué et demande à la Cour de débouter Madame [B] de l'intégralité de ses demandes.

A titre reconventionnel, la SA Vêtir demande à la Cour d'ordonner à Madame [B] de lui rembourser les sommes payées au titre de l'exécution provisoire et de la condamner au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions régulièrement déposées et développées oralement à l'audience du 7 décembre 2015 auxquelles la Cour se réfère expressément, Madame [B] demande à la Cour de juger qu'elle bénéficiait d'un contrat de travail à temps complet 'catégorie 3' de mai à novembre 2007, et de 'catégorie 8' de décembre 2007 à juin 2008 et qu'enfin elle bénéficiait du statut de cadre salarié de juillet 2008 à décembre 2009.

En conséquence de cette requalification et de ces reclassifications, elle demande à la Cour de condamner la SA Vêtir au paiement des sommes suivantes :

- 1.035,28 € à titre de rappel de salaires pour la période de mai à octobre 2007,

- 103,53 € au titre des congés payés y afférents,

- 1.732,10 € à titre de rappel de salaires pour la période de novembre 2007 à mai 2008,

- 173,21 € au titre des congés payés y afférents,

- 16.979,41 € brut à titre de rappel de salaire fixe sur la période de juillet 2008 à

décembre 2009,

- 1.697,94 € au titre des congés payés y afférents,

- 16.000,37 € brut à titre de rappels de salaire pour heures supplémentaires et repos

compensateur pour la période de juillet 2008 à décembre 2009,

- 1.600,03 € au titre des congés payés y afférents,

- 15.000,00 € titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 900,00 € au titre de la participation aux fruits de l'expansion de l'entreprise pour

l'année 2009.

D'autre part, Madame [B] demande à la Cour de confirmer que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et que sa mise à pied conservatoire est nulle.

A ce titre, elle sollicite le paiement des sommes suivantes :

- 8.665,53 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 866,55 € au titre des congés payés y afférents,

- 1.733,10 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 173,31 € à titre de congés payés,

- 35.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause

réelle et sérieuse,

- 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Enfin, Madame [B] demande à la Cour de condamner la SA Vêtir à lui payer la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de juger que la date de son licenciement est le 5 janvier 2010, que les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter de la date d'audience, que les intérêts échus seront capitalisés et que la SA Vêtir devra lui remettre ses documents de rupture rectifiés sous astreinte de 150 € par jour de retard.

DISCUSSION :

- Les demandes formées au titre de l'exécution du contrat de travail':

° Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet':

En application de l'article L 3123-14 du code du travail, le contrat à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

Le contrat doit également prévoir les cas dans lesquels une modification éventuelle de la répartition de la durée du travail peut intervenir.

Toute modification doit être notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu.

En tout état de cause, le temps de travail ne peut atteindre la durée du travail légale ou conventionnelle à temps complet sauf à encourir la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

De même, lorsque le contrat ne détermine pas la durée du travail ou sa répartition entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, le contrat est présumé à temps complet et il appartient à l'employeur de prouver qu'il s'agit d'un emploi à temps partiel mais également que le salarié n'était pas tenu constamment à sa disposition.

Il ne s'agit que d'une présomption simple que l'employeur peut détruire.

En l'espèce, Madame [B] a été embauchée par la SAS Vêtir par contrat de travail à durée déterminée à temps partiel du 11 mai 2007 aux termes duquel la durée du travail hebdomadaire est fixée à 25 heures réparties selon des modalités fixées dans le contrat.

Le 18 juin 2007, un nouveau contrat de travail à durée indéterminée a été signé entre les parties pour un temps partiel fixé à 15 heures par semaine réparties selon des modalités également précisées dans le contrat.

Cependant, par avenant du même jour, les parties ont fixé à 35 heures la durée du travail hebdomadaire de Madame [B] entre le 18 juin et le 23 juin 2007.

Par la suite 28 avenants ont régulièrement modifié la durée hebdomadaire du travail de Madame [B] sans qu'aucun de ces avenants ne précise la répartition du travail entre les jours de la semaine et sans respecter aucun délai de prévenance pour 15 d'entre eux.

Il résulte de ces constatations que dés le 18 juin 2007, la durée du travail de Madame [B] a été portée à 35 heures soit la durée légale du travail et que d'autre part, la modification permanente de la durée du travail hebdomadaire impliquait qu'elle se tienne à la disposition permanente de son employeur d'autant que la plupart des modifications sont intervenues sans délai de prévenance.

Les décomptes de temps produits par la SAS Vêtir prouvent certes, le temps de travail de la salariée mais ne sont pas de nature à démontrer que cette dernière était en mesure de prévoir son rythme de travail au service de la SA Vêtir.

En conséquence de ce qui précède, réformant la décision du Conseil de Prud'hommes de [Localité 1], la Cour requalifie le contrat de travail à temps partiel de Madame [B] en contrat de travail à temps complet à compter du 18 juin 2007.

° Sur la demande de rappel de salaire pour la période de mai 2007 à juin

2008 :

Madame [B] fait valoir que son rappel de salaire pour la période considérée doit être calculée en considération des fonctions véritablement exercées.

Ainsi, elle distingue la période comprise entre mai et octobre 2007 pour laquelle elle ne conteste pas le taux horaire appliqué et la période comprise entre novembre 2007 et juin 2008 pour laquelle elle revendique la classification d'agent de maîtrise catégorie A au motif qu'elle a, sur cette période, remplacé les gérants du magasin.

La classification des emplois est déterminée par la convention collective ou par des accords professionnels.

La détermination de la classification du salarié s'effectue en considération des fonctions réellement exercées et la charge de la preuve pèse sur celui qui élève la contestation.

En l'espèce, Madame [B] qui revendique la classification d'agent de maîtrise catégorie A arguant du remplacement des gérants du magasin fonde ses prétentions sur les seuls avenants au contrat de travail portant sur la durée de son temps de travail et le motif invoqué.

La Cour relève qu'entre novembre 2007 et juin 2008, la durée du travail de Madame [B] a été modifiée à plusieurs reprises au motif indiqué : 'CP gérants, absence gérant, changement gérant,...)

Ces mentions indiquent le motif justifiant l'augmentation de la durée du travail de Madame [B] mais ne sont pas en soi la preuve que cette dernière a exercé effectivement les fonctions d'encadrement attachées à cette qualité.

Rappelant que la charge de la preuve pèse sur celui qui élève la contestation quant à la classification en cause, la Cour juge que Madame [B] ne justifie pas avoir distribué, coordonné et contrôlé le travail d'un groupe d'employés en majorité spécialisés, missions confiées à un agent de maîtrise catégorie A de la convention collective des maisons à succursalles de vente au détail de l'habillement.

Dans ces conditions, réformant la décision du Conseil de Prud'hommes, la Cour déboute Madame [B] de sa demande de classification et juge que son rappel de salaire doit être calculé sur la base d'un temps complet au taux horaire de

8,48 € pour la période du 18 juin 2007 au 1er juin 2008 sous déduction des sommes perçues pour cette même période.

En conséquence, la SAS Vêtir sera condamnée à payer à Madame [B] la somme de 2.156,33 € à titre de rappel de salaire pour la période comprise entre le 18 juin 2007 et le 1er juin 2008 outre la somme de 215,63 € au titre des congés payés y afférents.

° Sur la demande de rappel de salaire pour la période comprise entre juin 2008 et la rupture du contrat de travail :

Les parties conviennent aux termes de leurs conclusions respectives qu'à compter du mois de juin 2008, Madame [B] ne bénéficiait pas du statut de cadre dirigeant mais du statut cadre salarié au coefficient B2 de la convention collective.

En application de l'article 12 de l'avenant cadre de la convention collective du 30 juin 1972, la rémunération des cadres tient compte de l'horaire de l'entreprise et inclut forfaitairement les dépassements d'horaires qu'il pourrait être amené à faire pour remplir sa fonction, dès l'instant que cette rémunération est supérieure au salaire minimum garanti de la catégorie augmenté de la majoration pour dépassement d'horaire régulièrement effectué dans l'entreprise et, éventuellement, de la prime d'ancienneté.

Le salaire minimum conventionnel pour un cadre catégorie B2 de la convention collective était du 1er juin 2000 au 30 novembre 2009 de 1.922,99 € et a été porté à 2.189 € à compter du 30 novembre 2009.

Le contrat de travail de Madame [B] du 23 juin 2008 prévoit que sa rémunération est composée d'une partie fixe de 1.144 € et d'une partie variable calculée sur le chiffre d'affaire.

Il est expressément prévu que les conditions de rémunération sont forfaitaires et comprennent donc le paiement de toutes les heures supplémentaires effectuées et repos compensateur afférents, étant précisé que le forfait versé sera au moins égal au salaire minimum conventionnel augmenté des bonifications ou majorations prévues pour les heures supplémentaires.

Enfin, s'agissant de la durée du travail, le contrat fixait un forfait de

2.024 heures de travail effectif.

Il résulte, donc, des dispositions contractuelles que Madame [B] était rémunérée pour un forfait annuelle de 2.024 heures.

Compte tenu de la convention de forfait annuel en heures, sa rémunération devait être supérieure au salaire minimum garanti de sa catégorie (soit 1.922,99 € du 1er juin 2008 au 30 novembre 2009 et 2.189 € à compter du 30 novembre 2009) augmenté de la majoration pour dépassement d'horaire régulièrement effectué dans l'entreprise (soit 417 heures par an à 14,33 €) et, éventuellement, de la prime d'ancienneté.

Ainsi sur une année, la rémunération de Madame [B] ne pouvait être inférieure à 29.009,79 € soit par mois 2.417,48 € pour la période du 1er juin 2008 au 30 novembre 2009 et à 2.815,54 € pour la période du 1er décembre 2009 à la rupture du contrat.

Ayant moins de trois ans d'ancienneté, elle ne pouvait prétendre à une prime d'ancienneté.

A compter du 1er juin 2008, la SAS Vêtir reconnaît que Madame [B] a perçu une rémunération brute moyenne de 2.073,28 €.

En conséquence, la Cour observe que Madame [B] n'a pas perçu

le minimum garanti par la convention collective augmenté de la majoration pour dépassement d'horaire.

Le calcul de son rappel de salaire sera effectué sur la période du 1er juin 2008 au 1er décembre 2009, la période suivante correspondant à sa mise à pied conservatoire sur laquelle il sera statué ultérieurement.

En conséquence, la Cour juge que la rémunération minimum de Madame [B] pour la période du 1er juin 2008 au 1er décembre 2009, compte tenu de la convention de forfait était de 43.912,70 € alors qu'elle n'a perçu que 37.319,04 €.

La SAS Vêtir sera, donc, condamnée à lui payer la somme de 6.593,66 € à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2008 au 1er novembre 2009 outre la somme de 659,36 € au titre des congés payés y afférents.

° Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période comprise entre juillet 2008 et décembre 2009 :

Les heures de travail accomplies au-delà du forfait annuel en heure sont rémunérées comme des heures supplémentaires.

En revanche , en application de l'article D 3121-14-1 du code du travail qui exclue les salariés en forfait annuel en heures du dispositif du contingent annuel d'heures supplémentaires, ces derniers ne bénéficient pas de la contre partie obligatoire en repos.

Il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fourmis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir, en cas de besoin, ordonné toutes les mesures d'instructions qu'il estime utile.

Ainsi, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par le salarié, qui doivent étayer suffisamment sa demande, et de ceux fournis par l'employeur qui doivent être de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

En l'espèce, Madame [B] produit à la Cour son attestation ASSEDIC établie par la SAS Vêtir qui détaille le nombre d'heures travaillées entre le 12 décembre 2008 et le 30 novembre 2009 soit sur les douze dernier mois, dont le total s'élève à 2.288,29 heures.

La SAS Vêtir produit à la Cour le relevé des heures travaillées de sa salariée de janvier à novembre 2009 pour un total chiffré par la Cour à 2.186,50 heures et non de 1.792 heures comme avancé par l'employeur.

Relevant en outre que ce décompte n'est établi que sur 11 mois et non 12 mois comme celui dont se prévaut la salariée, la Cour retiendra que, des propres déclarations de l'employeur, il est établi que Madame [B] a accomplie sur un an 2.288,29 heures de travail alors qu'elle n'a été rémunérées que pour 2.024 heures de travail.

En conséquence, elle a accomplie 264,29 heures supplémentaires au-delà de son forfait annuel en heures.

La Cour ayant jugé que son salaire horaire moyen dans le cadre de son forfait annuel de 2.024 heures s'élevait à 14,33 €, les 264,29 heures supplémentaires doivent être rémunérées sur la base de 14,33 € majoré de 25 % soit 17,91 €.

En conséquence, pour 264,29 heures supplémentaires hors forfait, la

SAS Vêtir sera condamnée à payer à Madame [B] la somme de 4.733,43 € à titre de rappel de salaire ou la somme de 473,34 € au titre des congés payés afférents.

La demande de Madame [B] au titre de la contre partie en repos obligatoire sera rejetée.

° Sur la demande au titre des fruits de l'expansion de l'entreprise :

A ce titre, Madame [B] forme une demande forfaitaire de 900 € pour l'année 2009.

L'employeur ne conteste pas le principe de la demande qui correspond à un des éléments de la rémunération de la salariée et justifie avoir procédé à un règlement de 1.271,16 € le 16 avril 2010 au titre de la participation aux fruits de l'expansion pour l'année 2009 sur lequel cette dernière ne s'explique pas.

En conséquence, la Cour considère qu'au regard des pièces produites, la SAS Vêtir justifie avoir versé à Madame [B] la participation aux fruits de l'expansion de la société pour l'année 2009 et confirme, en conséquence, la décision

du Conseil en ce qu'elle a rejeté la demande de la salariée.

° Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

Par application des dispositions des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a délivré de façon intentionnelle un bulletin de salaire mentionnant un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Madame [B] a accompli pendant plusieurs mois un nombre d'heures très supérieur à la durée légale du travail mais également aux heures supplémentaires forfaitisées que la SAS Vêtir ne pouvait manquer d'ignorer.

Il ne lui a été proposé aucune régularisation à la rupture du contrat alors que l'employeur avait connaissance d'un dépassement important du forfait annuel d'heures.

Ces éléments démontrent que la SAS Vêtir a, de façon intentionnelle, omis de payer et de déclarer aux organismes habilités l'intégralité des heures de travail accomplies par Madame [B].

En conséquence, cette dernière est fondée en sa demande d'indemnité

pour travail dissimulé et la Cour, réformant la décision des premiers juge sur ce point, condamne la SAS Vêtir à lui payer la somme de 15.000 € à ce titre.

° Sur le licenciement :

La lettre de licenciement pour faute grave dont les motifs énoncés fixent les limites du litige est intégralement reprise dans les conclusions de Madame [B] auxquelles la Cour renvoie expressément.

En application de l'article L1235-1 du code du travail, il appartient au

juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur.

Il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, le doute profitant au salarié.

Toutefois, la charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur et tel est le cas en l'espèce.

La Cour rappelle que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il est formulé plusieurs griefs à l'appui du licenciement pour faute grave de Madame [B] qu'il convient d'examiner.

La SAS Vêtir reproche tout d'abord à Madame [B] d'avoir imputé à la direction la décision de refus de congés d'une salariée en janvier 2010 et celle d'imposer le port de bonnets de Noël aux employés du magasin.

Il n'est pas contesté que le refus d'accorder des congés à un salarié du magasin est une décision qui incombe en dernier lieu au directeur régional et qu'en l'occurrence, Madame [B] qui ne conteste pas avoir refusé d'accorder à Madame [L] qui en atteste, n'est pas en mesure de justifier avoir saisi le directeur régional de la difficulté.

D'autre part, il est reproché à Madame [B] d'avoir imposé le port du bonnet de Noël aux employés du magasin en décembre 2008.

Ce grief n'est établi par aucune pièce du dossier.

La SAS Vêtir reproche également à Madame [B] de ne pas avoir affiché les comptes rendus du comité d'entreprise ainsi que la note relative au renouvellement des élections professionnelles, Mme [B] représentait l'employeur au sein du magasin dont elle avait la direction et devait à ce titre assurer la diffusion des informations relatives aux institutions représentatives du personnel ou syndicales.

Il est établi par les attestations des salariés du magasin et par un délégué syndical que les comptes rendus du CE et les notes relatives aux élections profession-nelles ou syndicales n'étaient pas affichées.

En s'abstenant de procédé à cet affichage, Madame [B] a manqué à ses obligations et ne peut se retrancher derrière son employeur dés lors qu'il lui appartenait, en sa qualité de gérant directeur, de veiller au respect des obligations légales concernant l'information des salariés du magasins dont elle avait la responsabilité.

Il est, d'autre part, reproché à Madame [B] d'avoir eu une altercation téléphonique avec une déléguée syndicale à qui elle reprochait d'être passée au magasin.

En réalité, Madame [B] a reproché à Madame [O] [D], déléguée syndicale, d'être passée au magasin en son absence.

Cette dernière atteste de la réalité de l'altercation téléphonique.

Madame [B] conteste le grief relatif à l'absence d'entretien des locaux réservés au personnel soutenant que ce grief n'a pas été débattu lors de l'entretien préalable, qu'il n'entrait pas dans ses attributions de faire le ménage de ces locaux et qu'enfin, elle avait spontanément nettoyé les locaux lors de son entrée en fonction.

La Cour observe, d'une part, qu'il ne peut être reproché à un gérant directeur de ne pas faire le ménage dans les locaux du personnel mais seulement de ne pas faire procéder à ce nettoyage.

L'état déplorable des locaux du personnel est attesté par les salariés du magasin mais par ailleurs Mme [B] produit des photographies tendant à démontrer qu'elle avait procédé à ce nettoyage.

L'attestation de Madame [E] démontre que Madame [B] lui a imposé des horaires de travail incompatibles avec sa situation de salariée handicapée et elle témoigne d'une ambiance de travail difficile.

Il est reproché par, ailleurs, à Madame [B] d'avoir dénigré son employeur.

La SAS Vêtir justifie de ce grief en produisant l'attestation de Madame [O] [D], déléguée syndicale qui témoigne des propos tenus par Madame [B] 'j'en ai marre de GEMO, je ne veux pas rester dans cette entreprise pourrie'.

Ces dénigrements sont également rapportés par Madame [L].

Enfin, la SAS Vêtir reproche à Madame [B] de ne pas avoir accom-pagné le personnel de son magasin dans la mise en oeuvre des challenges commerciaux.

Sur ce points plusieurs salariés attestent de l'absence d'information relative à ce challenge commercial mis à part un affichage qui n'a pas permis une information de tous les salariés ni une bonne compréhension de l'action.

La Cour considère qu'est établi l'ensemble des griefs fondant le licen-ciement de Madame [B] à l'exception du grief relatif à la décision du port du bonnet de Noël et de celui relatif au nettoyage du local du personnel sur lequel un doute persiste.

Ces griefs sont formulés à l'encontre d'une jeune salariée sans expérience à qui la SAS Vêtir a confié la direction d'un magasin au terme d'un entretien de quelques minutes et d'une formation de quelques jours.

Ces griefs sont suffisamment sérieux pour justifier le licenciement de Madame [B] mais ils n'empêchaient pas le maintien de la relation contractuelle pendant la durée du préavis.

Dès lors, réformant la décision du Conseil, la Cour juge que le licen-ciement de Madame [B] n'est pas fondé sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et qu'en conséquence, la SAS Vêtir doit payer à Madame [B] son indemnité de préavis, les congés payés afférents ainsi que son indemnité de licen-ciement.

Aussi, la SAS Vêtir sera condamnée à payer à Madame [B] les indemnités qui lui sont dues au titre de la rupture du contrat de travail calculées sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 2.815,54 € soit :

- 2.815,54 € à titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire du 2

décembre 2009 au 5 janvier 2010,

- 281,55 € au titre des congés payés y afférents,

- 8.446,62 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 844,66 € pour les congés payés y afférents,

- 1.689,32 € à titre d'indemnité de licenciement.

° Sur les autres demandes :

La demande d'indemnité pour préjudice moral formée par Madame [B] est pas fondée et sera rejetée.

De même, la Cour rejette la demande tendant à la capitalisation des intérêts à compter de la saisine de la juridiction.

La SAS Vêtir devra remettre à Madame [B] ses documents de rupture rectifiés selon les termes du présent arrêt sans que la Cour n'estime nécessaire d'assortir son injonction d'une astreinte.

Enfin, elle sera condamnée à lui payer la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

' Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a débouté Madame [B] de sa demande en paiement d'une indemnité au titre de la participation aux fruits de l'expansion de la société et en ce qu'il a condamné la SAS Vêtir à lui payer la somme de 1.000 € (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' Infirme le jugement attaqué en toutes ses autres dispositions.

Y substituant :

' Requalifie le contrat de travail à temps partiel de Madame [B] en contrat de travail à temps complet à compter du 18 juin 2007.

' Rejette la demande de Madame [B] tendant à se voir reconnaitre la classification afférente à un agent de maîtrise catégorie A de la convention collective des maisons à succursalles de vente au détail de l'habillement pour la période du 18 juin 2007 au 1er juin 2008.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 2.156,33 € (deux mille cent cinquante six euros et trente trois centimes) à titre de rappel de salaire pour la période comprise entre le 18 juin 2007 et le 1er juin 2008.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 215,63 € (deux cent quinze euros et soixante trois centimes) au titre des congés payés y afférents.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de

6.593,66 € (six mille cinq cent quatre vingt treize euros et soixante six centimes) à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2008 au 1er novembre 2009.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 659,36 € (six cent cinquante neuf euros et trente six centimes) au titre des congés payés y afférents.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 4.733,43 € (quatre mille sept cent trente trois euros et quarante trois centimes) à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires accomplies hors forfait.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 473,34 € (quatre cent soixante treize euros et trente quatre centimes) au titre des congés payés y afférents.

' Déboute Madame [B] de sa demande formée au titre de la contrepartie en repos obligatoire.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 15.000 € (quinze mille euros) au titre de l'indemnité pour travail dissimulé.

' Juge que le licenciement de Madame [B] n'est pas fondé sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 2.815,54 € (deux mille huit cent quinze euros et cinquante quatre centimes) à titre de rappel de salaire relatif à la mise à pied conservatoire du 2 décembre 2009 au 5 janvier 2010.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 281,55 € (deux cent quatre vingt un euros et cinquante cinq centimes) au titre des congés payés y afférents.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 8.446,62 € (huit mille quatre cent quarante six euros et soixante deux centimes) à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 844,66 € (huit cent quarante quatre euros et soixante six centimes) pour les congés payés y afférents.

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 1.689,32 € (mille six cent quatre vingt neuf euros et trente deux centimes) à titre d'indemnité de licenciement.

' Déboute Madame [B] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

' Rejette la demande en capitalisation des intérêts à compter de la saisine de la juridiction.

' Dit que la SAS Vêtir sera tenue de remettre à Madame [B] ses documents de rupture rectifiés selon les termes du présent arrêt.

Y ajoutant :

' Condamne la SAS Vêtir à payer à Madame [B] la somme de 1.000 € (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

' Condamne la SAS Vêtir aux dépens.

Signé par Madame Maud Vignau, Président, et par Madame Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Maud Vignau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 13/05802
Date de la décision : 10/02/2016

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°13/05802 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-02-10;13.05802 ?
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