La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/02/2010 | FRANCE | N°07PA01825

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Formation plénière, 12 février 2010, 07PA01825


Vu, sous le n° 07PA01825, enregistrée par télécopie au greffe de la cour le 25 mai 2007 et régularisée le 29 mai 2007, la requête présentée pour la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT, dont le siège est 119 rue des Trois Fontanot à Nanterre (92100), par Me Pintat ; la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319941 et 0500261 du 16 mars 2007 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses demandes tendant, à titre principal, à l'annulation de l'article 6 de la décision du 27 mai 2003 et de l'acte rectificatif du 17 novembre 2004 du

directeur général de l'établissement public pour l'aménagement de la r...

Vu, sous le n° 07PA01825, enregistrée par télécopie au greffe de la cour le 25 mai 2007 et régularisée le 29 mai 2007, la requête présentée pour la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT, dont le siège est 119 rue des Trois Fontanot à Nanterre (92100), par Me Pintat ; la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319941 et 0500261 du 16 mars 2007 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses demandes tendant, à titre principal, à l'annulation de l'article 6 de la décision du 27 mai 2003 et de l'acte rectificatif du 17 novembre 2004 du directeur général de l'établissement public pour l'aménagement de la région de la Défense (EPAD) emportant autorisation d'occupation du domaine public de cet établissement public et tendant, à titre subsidiaire, à l'annulation de ces décisions dans leur totalité ;

2°) d'annuler l'article 6 de ladite décision rectifiée ;

3°) de mettre à la charge de l'EPAD la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 76l-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement ne répond ni au moyen tiré de ce que l'EPAD n'a pas défini les avantages spécifiques justifiant le montant de la redevance ni à celui tiré de l'incompatibilité entre la redevance fixée pour l'occupation du domaine public de l'EPAD et l'accomplissement de sa mission de service public par RTE EDF TRANSPORT ; que les galeries techniques dans lesquelles est installé le réseau n'appartiennent pas au domaine public de l'EPAD dès lors que les règles d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité applicables au domaine public sont incompatibles avec le service public géré par 1'EPAD tel qu'il est défini par l'article 1er du décret n° 58-815 du 9 septembre 1958 créant l'établissement public ; que la redevance pour occupation du domaine public est illégale au regard de son montant qui n'a pas été justifié par l'EPAD ; que la redevance pour service rendu n'est pas plus justifiée ; que l'utilisation des galeries par RTE EDF TRANSPORT répond aux besoins de l'EPAD et non à ses intérêts propres ;

Vu, enregistrés le 2 octobre 2007 et le 16 juin 2008, les mémoires en défense présentés pour l'établissement public pour l'aménagement de la région de la Défense (EPAD), par Me Dadez ; l'EPAD demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de RTE la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que le jugement a implicitement écarté le moyen portant sur la pertinence de la redevance et est ainsi suffisamment motivé ; que les règles de domanialité publique s'appliquent aux biens de l'EPAD, lorsqu'ils sont affectés au service public de l'aménagement de la Défense comme le sont les galeries techniques ; que le montant de la redevance d'occupation domaniale, qui ne constitue pas une redevance pour service rendu, est calculé en fonction de la longueur du réseau implanté ; que l'occupation des galeries techniques procure à RTE des avantages spécifiques liés à un aménagement spécial ; que l'invocation du décret du 27 janvier 1956 est inopérante dès lors que ce décret s'applique au domaine public national ; que les justifications du montant de la redevance ont été communiquées à RTE ; que cette société a un statut de société commerciale et les ouvrages électriques qui lui appartiennent participent à son activité économique ;

Vu la lettre en date du 20 octobre 2008, par laquelle le président de la première chambre informe les parties au litige que la cour est susceptible de soulever un moyen d'ordre public ;

Vu les nouveaux mémoires en défense, enregistrés le 31 octobre 2008 et le 18 novembre 2008, présenté pour l'EPAD ; l'EPAD conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que le moyen d'ordre public communiqué par la cour ne saurait prospérer, faute pour la société requérante d'avoir sollicité l'annulation totale de la décision du 27 mai 2003 ; que la décision du 29 décembre 2000 est dépourvue de caractère réglementaire ; que, concernant seulement les exploitants de réseaux déjà implantés, elle n'est pas, de ce fait, soumise à publicité ; que RTE n'a fourni aucune précision permettant de faire douter de son droit de propriété sur les galeries techniques ; qu'à supposer qu'il existe sur cette question un doute sérieux, ce doute, qui devrait donner lieu à une question préjudicielle, ne pourrait conduire, en tout état de cause, qu'à l'annulation de l'article 1er de la décision attaquée ; qu'en fixant le montant de la redevance litigieuse, l'EPAD a tenu compte de l'avantage spécifique procuré par la jouissance privative de son domaine public ;

Vu l'ordonnance, en date du 20 janvier 2009, du président de la 1ère chambre fixant la clôture de l'instruction au 15 février 2009 à 12 heures en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu, le mémoire, enregistré le 13 février 2009, présenté pour la société RTE EDF TRANSPORT qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 4 février 2010, le mémoire présenté pour l'EPAD, par Me Dadez ;

II. Vu, sous le n° 07PA01856, enregistrée le 29 mai 2007, la requête présentée pour l'ÉTABLISSEMENT PUBLIC POUR L'AMÉNAGEMENT DE LA RÉGION DE LA DÉFENSE (EPAD) dont le siège est Tour Areva, 1 place de la Coupole, La Défense 6, Paris La Défense (92084) par Me Dadez ; l'EPAD demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319941/7 et 0500261/7 du 16 mars 2007 du Tribunal administratif de Paris en ce qu'il a annulé sa décision du 27 mai 2003 rectifiée en tant, d'une part, qu'elle soumet à une redevance pour occupation de son domaine public le réseau transport d'EDF situé hors des galeries techniques dont elle est propriétaire, d'autre part, qu'elle impose au réseau de transport de la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT de supporter à ses frais les modifications de son réseau quand celles-ci sont imposées par d'autres occupants ;

2°) de rejeter la demande d'annulation présentée par la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT devant le tribunal administratif et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 76l -1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la demande de première instance présentée par la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT était irrecevable dès lors que le directeur de l'unité régionale de Paris-Normandie n'avait pas qualité pour ester en justice au nom de la société ; que celle-ci n'a pas apporté la preuve que la redevance portait sur des ouvrages qui n'appartenaient pas à l'EPAD ; que s'il y avait un doute sur la question de la propriété d'une partie des ouvrages, le juge judiciaire aurait dû être saisi par le juge administratif, qui n'était pas compétent pour trancher cette question ; que le tribunal a mal interprété les dispositions de l'article 8-2 de la décision litigieuse en considérant qu'elle imposait à la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT de supporter à ses frais les modifications de son réseau imposées par d'autres occupants du domaine public alors qu'il ne vise que les modifications imposées à la demande de l'EPAD ;

Vu, enregistrés le 6 février et le 6 mars 2008, les mémoires en défense présentés pour la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT par Me Pintat ; la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de l'EPAD de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 76l -1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que le directeur de ladite unité disposait des pouvoirs nécessaires pour présenter la demande ; qu'il appartenait au juge administratif, en l'absence de difficulté sérieuse quant à l'examen d'un titre privé de propriété, de se prononcer sur l'existence du domaine public de l'EPAD ; qu'il appartient à I'EPAD de justifier qu'il est propriétaire des ouvrages hors galeries techniques sur lesquels sont implantés les réseaux électriques ; que l'article 8-2 de la décision litigieuse est contraire au principe selon lequel le bénéficiaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public ne doit supporter les frais de modification ou de déplacement des installations aménagées que lorsque les travaux sont entrepris dans l'intérêt du domaine public occupé et qu'ils constituent une opération conforme à la destination de ce domaine ; que le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne le rejet du moyen portant sur le montant de la redevance ; que les aménagements des galeries dont se prévaut l'EPAD ont un caractère normal, et non spécial, et bénéficient à tous les occupants sans procurer d'avantage spécial à la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT ; que le montant de 9, 5 euros par mètre linéaire est injustifié ;

Vu, enregistré le 16 juin 2008, le mémoire, présenté pour l'EPAD qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que la décision du 14 novembre 2000 ne constitue qu'une délégation de pouvoir qui, au demeurant, n'a pas été publiée ; qu'il produit des documents montrant que l'ensemble des ouvrages sur lesquels porte la redevance lui appartiennent ; qu'il peut seul décider, fût-ce à la demande d'un autre concessionnaire, de l'opportunité d'entreprendre des travaux qu'il ne demandera que s'ils présentent un intérêt pour son domaine ;

Vu la lettre en date du 20 octobre 2008, par laquelle le président de la première chambre informe les parties au litige que la cour est susceptible de soulever un moyen d'ordre public ;

Vu les mémoires, enregistrés le 31 octobre 2008 et le 18 novembre 2008, présentés pour l'EPAD ; l'EPAD conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que le moyen d'ordre public communiqué par la cour ne saurait prospérer, faute pour la société requérante d'avoir sollicité l'annulation totale de la décision du 27 mai 2003 ; que la décision du 29 décembre 2000 est dépourvue de caractère réglementaire ; que, concernant seulement les exploitants de réseaux déjà implantés, elle n'est pas, de ce fait, soumise à publicité ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre, en date du 20 janvier 2009, fixant la clôture de l'instruction au 15 février 2009 à 12 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu, le mémoire, enregistré le 13 février 2009, présenté pour la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 4 février 2010, le mémoire présenté pour l'EPAD, par Me Dadez ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie électrique ;

Vu la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;

Vu le décret n° 58-815 du 9 septembre 1958 ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2010 :

- le rapport de M. Demouveaux, rapporteur,

- les conclusions de M. Bachini, rapporteur public,

- et les observations de Me Pintat, pour la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT, et de Me Beal, pour l'EPAD ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré produite le 9 février 2010 pour l'EPAD ;

Considérant que les requêtes n° 07PA01825 et 07PA01856 tendent à l'annulation d'un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

Considérant que par décision en date du 27 mai 2003, modifiée par une décision rectificative en date du 14 novembre 2004, l'ÉTABLISSEMENT PUBLIC POUR L'AMÉNAGEMENT DE LA RÉGION DE LA DÉFENSE (EPAD) a autorisé la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT (RTE) à occuper son domaine public et notamment les galeries techniques et autres ouvrages d'infrastructures et espaces publics pour les besoins de l'installation et de la maintenance de son réseau de transport d'électricité ; que l'article 6 de la même décision fixait le montant des redevances mises à la charge de la société, d'une part, pour l'occupation du domaine public, d'autre part, pour l'entretien des galeries et le renouvellement des équipements ; que ses articles 1er et 8-2 précisaient les conditions dans lesquelles RTE supporterait le coût des modifications apportées au réseau de galeries et ouvrages à la demande de l'EPAD ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que RTE a soulevé en première instance le moyen tiré de ce que l'EPAD n'a pas défini les avantages spécifiques justifiant que la redevance unitaire annuelle due en contrepartie de l'occupation domaniale soit fixée, par l'article 6.1 de la décision attaquée, à 9, 53 euros par mètre linéaire de canalisation ; que RTE a également soulevé le moyen tiré de ce que l'EPAD n'a pas justifié du montant de la redevance correspondant aux charges d'entretien courant des galeries techniques et de renouvellement de leurs équipements, lequel montant a été fixé, par l'article 6.2 de la même décision, à 3, 33 euros par mètre linéaire de canalisation ; qu'en se bornant à relever que l'occupation des galeries techniques par RTE lui procurait un avantage et que 1'EPAD n'avait pas commis d'erreur d'appréciation en fixant le montant global de la redevance à 12, 86 euros le mètre linéaire, le tribunal, en n'opérant pas de distinction entre la part de la redevance unitaire annuelle correspondant à l'occupation privative du domaine et celle qui correspond aux charges d'entretien, n'a pas suffisamment répondu aux deux moyens sus-analysés, étant précisé que, s'agissant de la redevance d'occupation domaniale, RTE en contestait non pas le principe mais seulement le montant ; que cette insuffisance de motivation justifie l'annulation du jugement ; qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par RTE devant le tribunal administratif ;

Sur la recevabilité des demandes :

Considérant que RTE a demandé au tribunal administratif de Paris, à titre principal, d'annuler les articles 6 et 8.2 de cette convention et, à titre subsidiaire, d'annuler dans son intégralité la décision modifiée du 27 mai 2003 ;

En ce qui concerne les conclusions principales dirigées contre l'article 6 :

Considérant que l'annulation des dispositions de l'article 6 de la décision attaquée, qui déterminent le montant des redevances mises à la charge de la société RTE, bénéficiaire de l'autorisation d'occupation du domaine public prévue par cette décision, méconnaîtrait le principe selon lequel une occupation privative d'une dépendance du domaine public implique le paiement d'une redevance par l'occupant ; qu'il s'ensuit que les conclusions principales de la demande dirigées contre le seul article 6 sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

En ce qui concerne les autres conclusions :

Considérant, en premier lieu, que par décision du 30 octobre 2000, publiée au journal officiel du 13 juillet 2001, le président du conseil d'administration d'Electricité de France a donné au directeur du gestionnaire du réseau public de transport d'électricité (GRTE) pouvoir d'agir devant toutes les juridictions tant en demande qu'en défense dans les matières entrant dans les compétences de son service ; que par décision en date du 14 novembre 2000, le directeur du GRTE a subdélégué ces pouvoirs au directeur de l'unité régionale transport électricité Paris Normandie ; qu'ainsi, ce directeur régional avait bien qualité pour présenter la demande de première instance, la circonstance que la subdélégation n'aurait pas été publiée étant sans incidence sur sa régularité dès lors qu'à la date de la demande, par l'effet de la loi susvisée du 9 août 2004, la requérante, devenue une société anonyme, n'était plus soumise à l'obligation de publication pesant sur les autorités administratives ;

Considérant, en deuxième lieu, que par son recours gracieux du 25 juillet 2003, RTE a contesté en son entier la décision du 27 mai 2003 ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que ce recours n'aurait pas porté sur l'article 8.2 de cette décision doit être écartée ;

Considérant, en troisième lieu, que, par la décision rectificative du 17 novembre 2004, le directeur général de l'EPAD a majoré l'assiette de la redevance pour occupation domaniale applicable à RTE et a confirmé le principe de cet assujettissement ; que, contrairement à ce que soutient l'EPAD, cette décision n'a donc pas eu pour seul objet de rectifier une erreur matérielle ; que, par suite, RTE justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette décision qui lui fait grief ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non recevoir soulevées par l'EPAD doivent être écartées ;

Sur la légalité de la décision du 27 mai 2003 modifiée :

En ce qui concerne l'article 1er :

Considérant que la société RTE soutient que certaines parties de son réseau de transport ne seraient pas implantées sur le domaine public de l'EPAD et qu'en conséquence elles ne pourraient, à due concurrence, être soumises à la redevance litigieuse ;

Considérant, en premier lieu, que le parvis de La Défense, la place de La Défense, l'esplanade du général de Gaulle et l'esplanade de La Défense ont été construits par l'EPAD pour être affectés à l'usage direct du public et ont été spécialement aménagés à cet effet ; que ces espaces, affectés à la circulation piétonne et dont il n'est pas contesté que l'EPAD est propriétaire, font partie du domaine public de cet établissement, ainsi que les galeries techniques aménagées dans leurs tréfonds et destinées à alimenter en réseaux divers les constructions édifiées au pourtour ; que si l'EPAD, en sa qualité d'établissement industriel et commercial, est soumis aux règles du droit privé dans la gestion de son service, cette circonstance ne s'oppose pas à ce qu'il dispose d'un domaine public ; que, par suite, la société RTE n'est pas fondée à soutenir que les galeries techniques aménagées sous les espaces publics susmentionnés ne font pas partie du domaine public de l'EPAD ;

Considérant en deuxième lieu que la décision attaquée porte également sur la partie du réseau électrique située, d'une part, entre l'avenue Gambetta et la rue Guynemer et passant sous le boulevard circulaire et la rue Ségoffin, d'autre part, sur celle située entre la galerie PLPN et la galerie Alsace EDF et passant sous la rue Louis Blanc ;

Considérant que RTE reconnaît, dans le dernier état de ses écritures, que l'EPAD est propriétaire de la rue Louis Blanc ; qu'il était donc en droit d'inclure dans le champ d'application de l'arrêté attaqué la partie du réseau autorisés à occuper les ouvrages qui y sont liés ;

Considérant, s'agissant de la partie du boulevard circulaire comprise entre l'avenue Gambetta et la rue Ségoffin, et de la partie de la rue Ségoffin comprise entre le boulevard circulaire et la rue du Capitaine Guynemer, que ces voies, sises dans le périmètre d'intervention de l'EPAD, ont été construites par lui, dans le cadre de sa mission qui lui a été confiée par le décret susvisé du 9 septembre 1958, de faciliter la réalisation du projet d'aménagement de la Défense ; qu'à ce titre et tant qu'il n'est pas établi que la propriété ou la gestion de tout ou partie de ces ouvrages auraient été dévolus à une autre collectivité publique, l'EPAD doit être regardé comme ayant le droit d'y délivrer des autorisations d'occupation domaniale, moyennant redevance, dans les mêmes conditions que pour son domaine propre ;

Considérant, en troisième lieu, que les dispositions alors applicables de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie électrique, qui ont conféré à Electricité de France le droit d'exécuter sur les voies publiques du quartier de la Défense tous travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages de transport d'électricité, n'ont pas eu pour objet ni pour effet de lui attribuer la propriété des galeries techniques enterrées sous ces voies ou le droit de les occuper gratuitement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'EPAD est compétent pour créer et percevoir les redevances auxquelles sont normalement soumis les occupants privatifs des dépendances de voirie incluses dans son périmètre d'intervention ;

En ce qui concerne l'article 6 :

Considérant qu'il appartient à l'autorité gestionnaire du domaine public de fixer, tant dans l'intérêt de ce domaine et de son affectation que dans l'intérêt général, les conditions auxquelles elle entend subordonner les autorisations d'occupation ; que si aucun texte n'a prévu les conditions dans lesquelles un établissement public peut fixer une redevance pour occupation du domaine qui lui est confié, celle-ci doit être définie en fonction de l'avantage spécifique procuré par la jouissance privative du domaine public ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 6 de la décision attaquée "En contrepartie du droit qui lui est reconnu à l'article 1er de la présente autorisation d'occuper le domaine public de l'EPAD, l'occupant verse une redevance unitaire annuelle de 9,53 euros HT, valeur janvier 2003, par mètre linéaire de canalisations quel que soit le diamètre de celles-ci... " ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce montant a été calculé en tenant compte des avantages spécifiques que procurent à l'occupant, d'une part, la localisation des galeries techniques en cause dans le quartier d'affaires de la Défense, d'autre part, la qualité de leur aménagement, spécialement étudié en vue de la desserte des fluides ; que, notamment, ces galeries sont, pour la plus grande partie d'entre elles, visitables et éclairées, disposent de pompes de relevage, de détecteurs de présence et d'incendie, d'issues de secours balisées, d'un poste central de sécurité fonctionnant 24 heures sur 24 et d'un logiciel de gestion technique centralisée ; que si une faible partie des infrastructures ainsi mises à la disposition de RTE, constituée non de galeries sous dalle mais de galeries en génie civil, ne présente pas les mêmes caractéristiques, il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que cette circonstance serait de nature à remettre en cause la très grande importance de l'avantage global offert à cette société en termes de localisation, d'accessibilité et de sécurité de l'ensemble de son réseau et d'économie du coût de construction ; qu'en l'absence, d'autre part, à la date de la décision attaquée, de tout texte règlementant le montant des redevances d'occupation du domaine public exigibles d'autres exploitants et susceptibles d'offrir des points de comparaison, RTE, qui ne soutient pas que la charge financière des redevances litigieuses l'empêcherait d'exercer son activité dans des conditions économiques satisfaisantes, n'est pas fondée à soutenir que la décision de fixer à 9,53 euros HT par mètre linéaire le montant de la redevance litigieuse serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 2 de l'article 6-1 de ladite décision : " En contrepartie des dépenses d'entretien courant des galeries techniques et de renouvellement des équipements de celles-ci (...) l'occupant versera à 1'EPAD sa quote-part des charges correspondantes sous la forme d'une redevance unitaire annuelle de 3, 33 euros HT, valeur janvier 2003, applicable à la longueur des canalisations en galeries techniques... " ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette redevance a été calculée en prenant en compte les dépenses annuelles d'entretien, dont les postes ont été chiffrés, ainsi que les dépenses de renouvellement des équipements sur dix ans et en affectant à chaque occupant des galeries une quote-part en fonction du volume occupé ; qu'il ne résulte pas de ces éléments qu'en fixant à 3, 33 euros HT le montant de la redevance par mètre linéaire occupé par RTE, l'EPAD ait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que, par suite, et alors même que les galeries techniques litigieuses constitueraient une infrastructure essentielle à l'activité de RTE, cette société n'est pas fondée à contester le montant des redevances auxquelles elle a été assujettie en contrepartie de l'avantage qu'elle tire de l'usage des galeries susdécrites ;

En ce qui concerne l'article 8-2 :

Considérant que le bénéficiaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public doit, quelle que soit sa qualité, supporter sans indemnité les frais de déplacement ou de modification des installations aménagées en vertu de cette autorisation, lorsque ce déplacement est la conséquence de travaux entrepris dans l'intérêt du domaine public occupé et que ces travaux constituent une opération conforme à la destination de ce domaine ; qu'à l'inverse, lorsque les travaux n'ont pas eu pour seul objet l'intérêt de ce domaine et alors même qu'ils seraient nécessaires au bon fonctionnement d'un service public, le permissionnaire est fondé à demander le remboursement de ses dépenses à concurrence de la somme correspondant aux travaux exécutés dans un intérêt autre que celui du domaine qu'il occupe ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8.2 de la décision du 27 mai 2003 : " L'occupant devra, sur simple demande de 1'EPAD, procéder à la modification (...) des éléments de son réseau dans l'hypothèse où cette modification serait rendue nécessaire par des travaux d'aménagement entrepris sur une ou plusieurs parties du domaine public occupées par l'occupant, soit à l'initiative de l'EPAD pour la bonne conservation du domaine public, soit à l'initiative d'autres occupants pour le fonctionnement d'un service public. Dans les cas visés à l'alinéa précédent, les frais de modification seront supportés par l'occupant sans que celui-ci puisse prétendre à aucune indemnité... " ; que, contrairement à ce que soutient l'EPAD, il résulte clairement de ces dispositions qu'elles peuvent conduire à mettre à la charge de l'occupant les travaux de modification de son réseau rendus nécessaires par les travaux d'aménagements entrepris à l'initiative d'autres occupants pour le fonctionnement du service public dont ils ont la charge ; que, dès lors, ces dispositions, qui ont été édictées non pas pour l'intérêt du domaine mais pour celui d'autres occupants, méconnaissent le principe sus-rappelé ; qu'elles doivent dès lors être annulées en tant qu'elles ne se bornent pas à faire supporter à l'occupant les modifications de son réseau rendues nécessaires par les seuls travaux d'aménagement entrepris à l'initiative de l'EPAD pour la bonne conservation du domaine public;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision susvisée est illégale en tant qu'elle impose à RTE de supporter à ses frais les modifications de son réseau quand celles-ci sont imposées par d'autres occupants pour le fonctionnement du service public dont ils ont la charge ; que celle-ci est dès lors fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de l'article 8.2 de la décision du 27 mai 2003 modifiée dont les dispositions litigieuses sont divisibles du reste de la décision ;

Sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire bénéficier l'une ou l'autre des parties de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0319941 et 0500261 du Tribunal administratif de Paris en date du 16 mars 2007 est annulé.

Article 2 : La décision susvisée du directeur général de l'EPAD en date du 27 mai 2003, modifiée par la décision susvisée du 17 novembre 2004, est annulée en tant qu'elle impose à la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT de supporter à ses frais les modifications de son réseau quand celles-ci sont imposées par d'autres occupants pour le fonctionnement de leur service public.

Article 3 : Le surplus des conclusions des demandes présentés devant le Tribunal administratif de Paris et la cour par la SOCIETE RTE EDF TRANSPORT, ainsi que les conclusions présentées par L'EPAD au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société RTE EDF TRANSPORT et à l'ÉTABLISSEMENT PUBLIC POUR L'AMÉNAGEMENT DE LA RÉGION DE LA DÉFENSE.

Délibéré après l'audience publique du 5 février 2010 à laquelle siégeaient :

M. Martin-Laprade, président de la cour,

M. Fournier de Laurière, Mme Lackmann, Mme Helmholtz, Mme Vettraino, M. Roth, M. Stortz, M. Brunet, M. Badie, M. Looten, présidents de chambre,

M. Demouveaux, rapporteur.

Lu en audience publique, le 12 février 2010.

Le rapporteur,

J.-P. DEMOUVEAUXLe président,

B. MARTIN-LAPRADE

Le greffier,

J. MAFFO

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

Nos 07PA01825, 07PA01856


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 07PA01825
Date de la décision : 12/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Anne LECOURBE
Rapporteur public ?: M. BACHINI
Avocat(s) : PINTAT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-02-12;07pa01825 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award