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29/11/2011 | FRANCE | N°10VE01209

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 29 novembre 2011, 10VE01209


Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA SEPUR, dont le siège est 54, rue Alexandre Dumas, BP 53 à Plaisir (78371), venant aux droits de la SA Alexis Bellec, par Me Sarrazin, avocat à la Cour ; la SA SEPUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0709846 du 16 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande aux fins de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles assises sur l'impôt sur les sociétés aux

quels elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 ainsi que de...

Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA SEPUR, dont le siège est 54, rue Alexandre Dumas, BP 53 à Plaisir (78371), venant aux droits de la SA Alexis Bellec, par Me Sarrazin, avocat à la Cour ; la SA SEPUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0709846 du 16 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande aux fins de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles assises sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'avis par lequel les impositions litigieuses ont été mises en recouvrement est irrégulier ; qu'en effet il méconnaît le principe de l'annualité de l'impôt et de spécificité des exercices en tant qu'il ne comporte pas les mentions permettant d'identifier l'année ou l'exercice concerné par le rappel, alors qu'il fait globalement référence à la période vérifiée sans identifier, sur le titre de créance, le rappel des droits spécifiques à chacune des années vérifiées ; que cet avis méconnaît les dispositions des articles 1658, 1659 et 1663-1 du code général des impôts en tant qu'il ne fait pas référence au rôle, qu'il ne comporte pas de date de mise en recouvrement ni de date d'exigibilité des cotisations, informations qui conditionnent l'exercice de garanties substantielles ; que, par suite, elle est fondée à demander l'annulation de l'avis de mise en recouvrement ; que c'est à tort et en statuant contra legem que les premiers juges, en limitant leur examen aux seules conditions de forme de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, ont conclu à l'absence d'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement qui lui a été notifié ; que la SA Alexis Bellec étant la victime des agissements frauduleux commis à son détriment par son dirigeant et n'étant pas partie à l'instance révélatrice des omissions ou insuffisances relevées par l'administration fiscale à son encontre, les délais de reprise prévus par les dispositions de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales ne lui sont pas opposables ; qu'en lui communiquant les extraits des procès-verbaux établis dans le cadre de la mise en examen, à titre personnel et non en tant que dirigeant de société, de M. A, l'administration fiscale a méconnu les dispositions des articles 11 du code de procédure pénale et L. 103 du livre des procédures fiscales ; que le principe fondamental du caractère exclusivement matériel de la preuve en droit fiscal, tel qu'il résulte de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et de la réponse faite à M. Longuet, député, publiée le 22 avril 1981, a été méconnu, dès lors qu'il n'a été procédé à aucun rapprochement matériel entre la comptabilité et les pièces justificatives, d'une part, et les seules informations orales ressortant des procès-verbaux d'audition sur le fondement desquels l'administration fiscale entend asseoir les redressements litigieux, d'autre part ; qu'à supposer que l'administration fiscale ait pris connaissance d'un état récapitulatif des extraits des comptabilités des sociétés dirigées par M. A, celle-ci a alors procédé à la vérification de sa comptabilité, sans l'avoir mis à même de bénéficier de toutes les garanties attachées à cette procédure ; que son engagement auprès des associations collectrices a précédé la mise en place d'un prétendu système de fausses factures ; que, par principe, les dépenses de publicité constituent des frais de gestion déductibles lorsqu'ils sont engagés dans l'intérêt de la société ; qu'il n'est pas plus difficile de mesurer les retombées commerciales de ces prestations que pour d'autres qui ne sont pas remises en cause par l'administration fiscale ; qu'il n'y a pas lieu d'assimiler sa responsabilité pénale et de fait avec celle de son dirigeant ; qu'elle n'est ni auteur principal, ni la complice active ou passive des agissements frauduleux ; qu'en sa qualité de victime, elle ne peut supporter les conséquences, ni pénales ni fiscales, des actes délictueux de son dirigeant ; que l'administration fiscale se fondant sur le détournement ultérieur des fonds, au surplus partiel, au niveau des associations et non pas à son niveau, le caractère déductible des charges ne peut être utilement remis en cause ; que les déclarations de son dirigeant, au demeurant recueillies dans le cadre de l'instruction pénale, ne peuvent lui être opposées ; que les conditions de déductibilité prévues par les dispositions de l'article 238 bis du code général des impôts ont été respectées par les dons aux oeuvres dont la déductibilité est refusée par l'administration fiscale ; que la documentation administrative de base référencée 4 C-712 du 30 octobre 1997 ne lui est pas opposable, dès lors que la SA Alexis Bellec, donatrice, n'a perçu aucune contrepartie à la suite de ses versements ; que l'administration fiscale se contredit en estimant, d'une part, que la SA Alexis Bellec participait activement aux agissements frauduleux de son dirigeant aux fins de satisfaire son propre intérêt et, d'autre part, que M. A a organisé le système frauduleux au préjudice de cette société ; que les premiers juges, faute pour eux de répondre à ses prétentions tenant au respect des conditions de déductibilité des dons prévus par les dispositions du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts et à l'absence d'appréhension occulte par la SA Alexis Bellec des dons opérés par ses soins, ont statué infra petita en méconnaissance des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ; que les éventuelles malversations ont été réalisées à l'insu de la SA Alexis Bellec et que ce n'est qu'en opérant une confusion entre les responsabilités de M. A et de cette société que les premiers juges ont pu conclure au bien-fondé des pénalités pour manoeuvres frauduleuses ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 2004-469 du 25 mai 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2011 :

- le rapport de M. Tar, premier conseiller,

-et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que la SA SEPUR a absorbé, le 30 juin 1998, la SA Alexis Bellec, qui exerçait une activité de collecte d'ordures ménagères ; qu'à la suite du contrôle sur pièces dont la SA Alexis Bellec a fait l'objet au titre de la période allant du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997, l'administration fiscale a assujetti cette société à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos au cours des années 1996 et 1997 ; que la SA SEPUR relève régulièrement appel du jugement du 16 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande aux fins de décharge de ces cotisations supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que la SA SEPUR soutient que le jugement attaqué ne se prononce pas sur les moyens tirés de ce que les dons litigieux respecteraient les conditions de déductibilité prévues par les dispositions du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts et de ce que les sommes détournées des dons opérés par les soins de la SA Alexis Bellec n'ont pas été appréhendées par cette société ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, que les premiers juges ont constaté que M. A avait reconnu avoir reçu en retour des versements effectués par cette société à des associations des sommes en espèces correspondant à 30 % à 50 % du montant de ces versements et en ont déduit que l'administration fiscale pouvait à bon droit refuser la déductibilité de ces versements ; que, ce faisant, les premiers juges, qui ont cité les termes du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable, ont implicitement mais nécessairement considéré que les sommes que la SA Alexis Bellec avait déduit du montant de son bénéfice imposable n'avaient pas la nature de versements effectués au profit d'une oeuvre ou d'un organisme d'intérêt général au sens des dispositions de cet article et ont implicitement mais nécessairement écarté comme inopérants l'ensemble des moyens de cette société fondés sur l'applicabilité à ces versements de ces dispositions ; qu'ainsi, la SA SEPUR n'est pas fondée à soutenir qu'en n'écartant pas explicitement les moyens tirés de ce que les dons litigieux respecteraient les conditions de déductibilité prévues par les dispositions du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts et de ce que les sommes détournées à partir des dons opérés par les soins de la SA Alexis Bellec n'ont pas été appréhendés par cette société, les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une omission à statuer ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales : L'obligation du secret professionnel, telle qu'elle est définie aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal, s'applique à toutes les personnes appelées à l'occasion de leurs fonctions ou attributions à intervenir dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, droits, taxes et redevances prévus au code général des impôts. Le secret s'étend à toutes les informations recueillies à l'occasion de ces opérations. (...) ; que la méconnaissance, par le vérificateur, de l'obligation de secret professionnel à laquelle il est tenu dans l'exercice de ses fonctions en vertu des dispositions de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que les dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale, qui posent le principe du secret de l'instruction, ne créent, au cas où l'administration fiscale exerce son droit de communication et prend ainsi connaissance d'informations recueillies dans le cadre d'une procédure d'instruction, aucune obligation dans le chef des agents de l'administration fiscale qui viendrait s'ajouter à celles qui résultent des dispositions précitées de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, les moyens tirés de la violation du secret de l'instruction et du secret professionnel doivent, en tout état de cause, être écartés ;

Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que l'administration fiscale aurait, en se fondant uniquement sur les déclarations de M. A, gérant de la SA Alexis Bellec, telles qu'elles résultent du procès verbal d'audition de celui-ci du 7 novembre 2001 et du procès verbal d'interrogatoire de sa première comparution du lendemain, méconnu le caractère exclusivement matériel de la preuve en droit fiscal , principe qui résulterait des dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et des termes de la réponse faite à M. Longuet, député, publiée le 22 avril 1981 au Journal officiel des débats de l'Assemblée Nationale, est relatif au bien-fondé des impositions litigieuses et ne met pas en cause la régularité de la procédure d'imposition ; que, par suite, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que l'administration fiscale n'aurait pas corroboré les déclarations évoquées ci-dessus de M. A par des constatations propres à l'entreprise pour soutenir que ladite procédure a été irrégulière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de la notification de redressements, en date du 17 décembre 2002, consécutive au contrôle sur pièces opéré pour la période allant du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997, que l'administration fiscale a seulement pris connaissance auprès des autorités judiciaires des procès-verbaux d'audition de M. A ainsi que d'un état récapitulatif des extraits des comptabilités des sociétés dirigées par lui sans procéder à un examen critique de la comptabilité de la SA Alexis Bellec et à la confrontation de celle-ci avec les déclarations fiscales ; que, dès lors, le contrôle sur pièces ainsi opéré ne peut pas être regardé comme étant constitutif d'une vérification de comptabilité opérée sans l'envoi préalable d'un avis de vérification et sans respect des garanties attachées à cette procédure ;

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement du 7 septembre 2005 :

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du caractère non-conforme à la Constitution des articles 21 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 et 37 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003, a été rejeté par une ordonnance du président de la 3ème chambre de la Cour de céans en date du 7 juillet 2011 ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable de sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) Les modalités d'application du présent article sont fixés par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'article 1 du décret n° 2004-469 du 25 mai 2004 susvisé : A compter du 1er novembre 2004, le recouvrement de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire annuelle, des contributions sur l'impôt sur les sociétés, de la contribution sur les revenus locatifs due par les personnes morales est effectuée par les comptables de la direction générale des impôts (...) ;

Considérant, d'une part, que la seule circonstance que les avis de mise en recouvrement litigieux émis en application des dispositions précitées se bornent à définir des créances d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés correspondant à plusieurs exercices de la SA Alexis Bellec, sans indiquer les montants dus au titre de chaque exercice de cette société ne révèle pas à elle seule que l'administration fiscale aurait établi ces créances autrement qu'en calculant, exercice par exercice, les bases imposables et les impositions dues ; que la SA SEPUR n'établit ni même n'allègue que les montants portés sur les avis de mise en recouvrement litigieux seraient différents de la somme des créances que l'administration fiscale était en droit d'établir exercice par exercice, comme l'exige l'article 36 du code général des impôts ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'annualité et des dispositions consacrant ce principe doit être écarté ;

Considérant que la SA SEPUR fait, d'autre part, également valoir que les avis de mise en recouvrement sont irréguliers au motif qu'ils ne comportent pas de référence au rôle, à la date de mise en recouvrement et à la date d'exigibilité des cotisations, comme le précisent les dispositions des articles 1658, 1659 et 1663-1 du code général des impôts ; que, toutefois, il résulte des dispositions de l'article 21 de la loi de finances rectificative pour 2002 et de l'article 37 de la loi de finances rectificative pour 2003, qui ont institué un transfert de compétences des comptables du Trésor aux comptables de la direction générale des impôts pour le recouvrement de l'impôt sur les sociétés, éclairées par leurs travaux préparatoires, que, s'il a omis de modifier les articles 1657, 1658, 1659 et 1663-1 du code général des impôts, le législateur a cependant entendu harmoniser la procédure de recouvrement de l'impôt sur les sociétés et celle des autres impositions recouvrées par le comptable de la direction générale des impôts et abandonner la procédure de recouvrement par voie de rôle pour y substituer celle par avis de mise en recouvrement, les deux procédures étant exclusives l'une de l'autre ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 1657 et suivants du code général des impôts relatifs à la procédure de recouvrement par voie de rôle, qui ne sont plus applicables au recouvrement de l'impôt sur les sociétés, doit, en tout état de cause, être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la prescription des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales : Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ; qu'il résulte de ces dispositions que les omissions ou insuffisances d'imposition susceptibles de faire courir le délai spécial de reprise, qui doivent avoir été révélées à l'administration par une instance devant les tribunaux, peuvent concerner d'autres contribuables que ceux faisant l'objet de la décision ayant clos l'instance ;

Considérant qu'à la suite de l'exercice de son droit de communication auprès du juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Paris, le 17 octobre 2002, dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 82 C du livre des procédures fiscales, l'administration a disposé en application de l'article L. 170 précité du même livre d'un nouveau délai de reprise lui permettant de corriger les omissions et insuffisances d'imposition révélées par l'instance constituée par la saisine de la juridiction d'instruction ; que ni la circonstance que l'instruction judiciaire ne concernait pas directement la SA Alexis Bellec, mais était conduite contre son dirigeant, ni celle, à la supposer avérée, que cette société a pu être considérée comme la victime des agissements frauduleux de ce dirigeant, ne faisait obstacle à ce que l'administration puisse à bon droit se prévaloir du délai de reprise susmentionné qui n'était pas expiré, le 17 décembre 2002, et notifier à la société requérante des redressements en matière d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles sur l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos au cours des années 1996 et 1997 ;

En ce qui concerne les frais d'annonces et d'insertion :

Considérant qu'aux termes du 1. de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, (...) ; que, pour être admis en déduction, les frais et charges doivent être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise et correspondre à une dépense effective appuyée de justifications suffisantes ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croît fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que l'administration fiscale a remis en cause la comptabilisation en charges de frais d'annonces et insertions correspondant à des factures émises par différentes associations pour un montant de 200 000 F (30 489,80 euros), au titre de l'exercice clos en 1996 et également pour un montant de 200 000 F (30 489,80 euros) au titre de l'exercice clos en 1997 ;

Considérant, en premier lieu, que M. A a reconnu devant le juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Paris avoir participé à un système de fausses facturations lui permettant, contre la remise de chèques à différentes associations par la SA Alexis Bellec en règlement de factures de publicités sur des revues ou des calendriers, de recevoir personnellement, en contrepartie et en espèces, un montant fixé entre 30 % et 50 % du montant hors taxe des factures concernées ; qu'en faisant état de ces déclarations et de la circonstance que les revues et les calendriers dont il s'agit étaient sans aucun rapport avec l'activité développée par la SA Alexis Bellec et ne s'adressaient pas à des personnes faisant partie des cibles commerciales de cette société, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant que les charges correspondant à ces factures n'ont pas été exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation de la SA Alexis Bellec et ne se rattachaient pas à sa gestion normale, la contrepartie de ces charges étant dépourvue d'intérêt pour cette société ; qu'en se bornant à faire état de la circonstance que son engagement auprès des associations collectrices a précédé la mise en place du système de fausse facturations et à évoquer la difficulté intrinsèque de déterminer l'intérêt commercial d'une action publicitaire, la SA SEPUR ne peut être regardée comme établissant que ces charges ont été exposées dans l'intérêt direct de la SA Alexis Bellec ;

Considérant, en second lieu, que les détournements commis par un dirigeant ne peuvent être réputés avoir été commis à l'insu de la société qu'il dirige dès lors qu'il détient le pouvoir de l'engager vis-à-vis des tiers et qu'ils résultent d'un comportement délibéré de celui-ci ; qu'ainsi, la SA SEPUR n'est pas fondée à soutenir que les déclarations de M. A ne seraient pas opposables à la SA Alexis Bellec, ou que les redressements dont il s'agit résulteraient d'une confusion entre la responsabilité de cette société et celle de M. A, ou encore que cette société ne serait pas complice mais victime des agissements frauduleux de celui-ci ;

En ce qui concerne les versements comptabilisés comme dons aux oeuvres :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : Les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés sont autorisées à déduire du montant de leur résultat, dans la limite de 2,25 p. 1000 de leur chiffre d'affaires, les versements qu'elles ont effectués au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises notamment quand ces versements sont faits au bénéfice d'une fondation d'entreprise, même si cette dernière porte le nom de l'entreprise fondatrice (...) ;

Considérant que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de versements comptabilisés comme des dons consentis à des associations pour un montant de 46 000 F (7 012,65 euros) au titre de l'exercice clos au cours de l'année 1996 et pour un montant de 50 000 F (7 622,45 euros) au titre de l'exercice clos au cours de l'année 1997 ;

Considérant que M. A a reconnu devant le juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Paris qu'il a reçu, en retour des versements effectués par la SA Alexis Bellec à ces associations, des sommes en espèces correspondant à 30 % à 50 % du montant des versements en cause ; qu'ainsi, ces sommes n'ont pas le caractère d'un versement effectué au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général au sens des dispositions précitées du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts ; que la SA SEPUR ne saurait, par suite, invoquer utilement la violation de ces dispositions et, notamment, le respect des conditions formelles qu'elles prévoient ;

Considérant, en deuxième lieu, que la documentation administrative de base référencée 4-C 712 du 30 octobre 1997 ne fait qu'interpréter les dispositions précitées du 1. de l'article 238 bis du code général des impôts, qui seules fondent les redressements litigieux, sans ajouter à la loi ; qu'ainsi, quand bien même cette interprétation administrative de la loi fiscale ne serait pas opposable à la SA Alexis Bellec, l'administration fiscale pouvait refuser la déductibilité des dons litigieux ;

Considérant, en troisième lieu que, comme il a déjà été dit, les détournements commis par un dirigeant ne peuvent être réputés avoir été commis à l'insu de la société qu'il dirige dès lors qu'il détient le pouvoir de l'engager vis-à-vis des tiers et qu'ils résultent d'un comportement délibéré de celui-ci ; qu'ainsi, la SA SEPUR n'est pas fondée à soutenir que les déclarations de M. A ne seraient pas opposables à la SA Alexis Bellec, ou que les redressements dont il s'agit résulteraient d'une confusion entre la responsabilité de cette société et celle de M. A, ou encore que cette société ne serait pas complice mais victime des agissements frauduleux de celui-ci ;

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa version applicable aux pénalités en litige : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ;

Considérant que M. A, dirigeant de la SA Alexis Bellec a reconnu avoir associé cette société à des détournements impliquant des associations ; que l'administration fiscale établit qu'eu égard à la nature des détournements, la SA Alexis Bellec, représentée par M. A, ne pouvait ignorer le système de fausses facturations auquel il participait et être regardée comme victime de ces agissements ; que dès lors, c'est à bon droit et sans confondre les responsabilités de la SA Alexis Bellec et de son dirigeant que l'administration fiscale a estimé que cette société s'est rendue coupable de manoeuvres frauduleuses au sens de l'article 1729 du code général des impôts et lui a appliqué la majoration de 80 % prévue dans un tel cas par cet article ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA SEPUR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande à fin de décharge des impositions litigieuses ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse une somme au titre des frais exposés par la SA SEPUR et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA SEPUR est rejetée.

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N° 10VE01209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE01209
Date de la décision : 29/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Garanties accordées au contribuable.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour mauvaise foi.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Divers.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Établissement de l'impôt.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Déduction des impôts et pénalités.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Charges diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : SARRAZIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-11-29;10ve01209 ?
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