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16/01/2020 | FRANCE | N°18DA02492

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 16 janvier 2020, 18DA02492


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011, d'autre part, de prescrire le remboursement, assorti des intérêts moratoires, des sommes versées par lui à ce titre, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement des disposition

s de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011, d'autre part, de prescrire le remboursement, assorti des intérêts moratoires, des sommes versées par lui à ce titre, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1600933 du 22 novembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge de l'ensemble des impositions contestées, a prescrit le remboursement à M. A... des sommes versées par lui à ce titre, majorées des intérêts moratoires, et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 décembre 2018 et le 27 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de M. A... les impositions dont la décharge a été prononcée par ce jugement, en confirmant, à titre principal, le bien-fondé de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts, dont il a été fait application, ou en lui substituant, à titre subsidiaire, la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A de ce code en cas de défaut ou de retard de déclaration ;

3°) de prescrire le reversement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code monétaire et financier ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les associés de la société civile immobilière (SCI) Technopolis, au nombre desquels figure M. A..., ont décidé de créer, le 17 mars 1993, une société à responsabilité limitée (SARL) Technopolis. M. A... a souscrit 150 parts de cette nouvelle société au moyen de liquidités figurant sur le plan d'épargne en actions (PEA) ouvert à son nom le 8 février 1993. Les titres ainsi acquis ont eux-mêmes été inscrits sur ce compte. Le 31 mars 1993, M. A... a cédé à la SARL Technopolis les participations qu'il détenait dans le capital de la SCI Technopolis, de sorte que la première est devenue détentrice de 99,60 % du capital de la seconde. Finalement, M. A... a cédé, le 4 juillet 2011, ses parts de la SARL Technopolis et n'a souscrit aucune déclaration de plus-value dans le délai légal, alors que cette cession avait donné lieu à la réalisation d'une plus-value de 1 008 997 euros, estimant pouvoir bénéficier de l'exonération fiscale attachée aux PEA. M. A... a expressément maintenu sa position, tenant au bénéfice de cette exonération, en réponse à la mise en demeure, qui lui avait été adressée le 7 novembre 2012, de souscrire la déclaration y afférente. Par une proposition de rectification en date du 26 avril 2013, l'administration lui a fait connaître qu'elle entendait soumettre à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux la plus-value de cession ainsi réalisée. Ce document l'informait aussi d'un rehaussement en matière de contribution sur les hauts revenus.

2. Ces rehaussements ayant été maintenus en majeure partie malgré les observations formulées par le contribuable et les impositions correspondantes ayant été mises en recouvrement le 31 juillet 2015, M. A... a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens. Par un jugement du 22 novembre 2018, le tribunal a, d'une part, fait droit aux conclusions de sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011, ainsi qu'à celles tendant au remboursement, assorti des intérêts moratoires, des sommes acquittées à ce titre et a, d'autre part, mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel de ce jugement et demande à la cour de remettre à la charge de M. A... les impositions dont la décharge a été prononcée par les premiers juges et de prescrire le reversement de la somme de 1 500 euros mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. En vertu du 1 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts, les gains nets retirés des cessions, effectuées directement et à titre onéreux, de droits sociaux sont soumis à l'impôt sur le revenu. Le 2 du II du même article précise que ces dispositions du I sont notamment applicables au gain net réalisé depuis l'ouverture d'un plan d'épargne en actions en cas de retrait de titres ou de liquidités ou de rachat avant l'expiration de la cinquième année dans les mêmes conditions. L'article 163 quinquies D du même code dispose que les plans d'épargne en actions sont ouverts et fonctionnent conformément aux dispositions des articles L. 221-30, L. 221-31 et L. 221-32 du code monétaire et financier. Aux termes de l'article L. 221-31 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable à la présente affaire : " I. - 1° Les sommes versées sur un plan d'épargne en actions reçoivent un ou plusieurs des emplois suivants : / (...) / b) Parts de sociétés à responsabilité limitée ou de sociétés dotées d'un statut équivalent (...) ; / (...) ". Enfin, selon l'article 1765 du code général des impôts, si l'une des conditions prévues pour l'application des dispositions législatives relatives au plan d'épargne en actions et désormais insérées au code monétaire et financier, n'est pas remplie, le plan est clos, dans les conditions définies au 2 du II de l'article 150-0 A du code général des impôts et à l'article L.221-32 du code monétaire et financier, à la date où le manquement a été commis et les cotisations d'impôt résultant de cette clôture sont immédiatement exigibles.

4. Pour prononcer, par le jugement attaqué, la décharge des impositions en litige, le tribunal administratif d'Amiens a constaté que l'administration se prévalait de rehaussements précédemment notifiés à M. A... au titre des années 1996 et 1997 et qui avaient donné lieu à des transactions, signées au cours de l'année 2000, devenues définitives. Les premiers juges ont relevé que, selon l'administration, l'intéressé avait reconnu le bien-fondé, dans leur principe, des rectifications opérées et, par suite, l'existence d'un dysfonctionnement affectant son plan d'épargne en actions, de nature à en entraîner la clôture de plein droit. Les premiers juges ont cependant estimé qu'en se limitant à se prévaloir de ces précédents rehaussements, alors que l'autorité qui s'attache aux transactions intervenues à leur suite est, en vertu des dispositions de l'article L. 251 du livre des procédures fiscales, limitée aux droits et pénalités qui en ont fait l'objet, l'administration n'établissait pas que l'inscription au plan d'épargne en actions des parts détenues par M. A... dans la SARL Technopolis présentait un caractère irrégulier de nature à fonder, en application de l'article 1765 du code général des impôts, l'imposition de la plus-value retirée de leur cession en 2011.

5. Le ministre de l'action et des comptes publics soutient tout d'abord que, si, comme l'a retenu le tribunal, les transactions devenues définitives ont une portée relative, l'administration peut néanmoins justifier une rectification ultérieure en faisant référence aux éléments reconnus expressément par le contribuable au sein même de la transaction, à savoir, en l'espèce, la clôture juridique du plan d'épargne en actions dès le 17 mars 1993, date à laquelle M. A... a acquis les parts sociales de la SARL Technopolis et les a inscrites sur son plan d'épargne en actions dans des conditions qui ont été regardées par l'administration comme méconnaissant les règles de fonctionnement d'un tel plan. Toutefois, d'une part, l'acceptation, donnée par M. A..., du principe de ces précédents rehaussements en droits, dans le but de pouvoir obtenir en contrepartie une importante réduction des pénalités dont ces droits étaient assortis, ne saurait suffire à faire présumer une acceptation par l'intéressé de l'ensemble du raisonnement alors tenu par l'administration pour justifier ces rehaussements. D'autre part, l'élément dont le ministre invoque la reconnaissance par M. A... n'est pas une circonstance de fait qui serait susceptible d'être invoquée en dépit de l'effet relatif des transactions, mais une appréciation juridique dont l'intéressé a, dans le cadre de sa contestation du rehaussement en litige, réfuté la pertinence tant devant l'administration que devant les premiers juges. Ainsi, par l'invocation de l'acceptation par M. A... du bien-fondé des précédents rehaussements liés à des opérations inscrites sur le plan d'épargne en actions détenu par lui, le ministre n'établit pas l'irrégularité du fonctionnement de ce compte, au regard des dispositions précitées de l'article 1765 du code général des impôts.

6. Enfin, le ministre de l'action et des comptes publics soutient que M. A..., du fait qu'il avait reçu notification de ces précédents rehaussements, ne pouvait ignorer que son plan d'épargne en actions était, en raison de la méconnaissance des dispositions législatives régissant son fonctionnement et par application des dispositions précitées de l'article 1765 du code général des impôts, clos depuis le 17 mars 1993, de sorte que la cession, en 2011, des parts sociales qui y étaient inscrites n'avait pu bénéficier du régime d'exonération attaché à un tel plan. Toutefois, ce moyen, qui tend à remettre en cause la bonne foi du contribuable mais ne conduit pas à établir l'irrégularité alléguée de la situation du plan d'épargne en actions détenu par M. A..., sur laquelle se fonde le rehaussement en litige, est inopérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1 et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales auxquelles M. A... a été assujetti au titre de l'année 2011, d'autre part, a prescrit la restitution, assortie des intérêts moratoires, des sommes acquittées par l'intéressé à ce titre. En conséquence, le ministre n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du même jugement, le tribunal administratif de Lille a mis, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat après avoir estimé qu'il était la partie perdante. Par suite et en tout état de cause, ses conclusions tendant à ce que la cour prescrive le reversement de cette somme ne peuvent qu'être rejetées. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, sur le même fondement, une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat, qui a la qualité de partie perdante, au titre des frais de procédure exposés par M. A... en cause d'appel.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. B... A....

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°18DA02492


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