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30/01/2020 | FRANCE | N°18LY02021

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 janvier 2020, 18LY02021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012, ou, à titre subsidiaire, d'en prononcer la réduction.

Par un jugement n° 1507837 du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a réduit leurs bases imposables à l'impôt sur le revenu d'une somme de 2 339 euros au titre de l'année 2011 et de 10 376 euros

au titre de l'année 2012, et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012, ou, à titre subsidiaire, d'en prononcer la réduction.

Par un jugement n° 1507837 du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a réduit leurs bases imposables à l'impôt sur le revenu d'une somme de 2 339 euros au titre de l'année 2011 et de 10 376 euros au titre de l'année 2012, et a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 25 mai 2018 et 5 février 2019, M. et Mme C..., représentés par Me Faury, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 mars 2018 en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités correspondantes restant en litige ou à titre subsidiaire, d'en prononcer la réduction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête n'est pas tardive ;

- alors même que leurs enfants majeurs avaient renseigné des déclarations de revenus, ils pouvaient valablement demander le rattachement au foyer fiscal de leurs parents ;

- subsidiairement, le montant de la pension alimentaire déductible, versée à leurs fils Josselin, au titre de l'année 2011 doit comprendre un montant complémentaire de 2 339 euros.

Par un mémoire enregistré le 6 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est tardive ;

- les demandes de rattachement expresses signées par leurs enfants sont antérieures à l'option que ces derniers ont finalement retenue en choisissant le dépôt d'une déclaration personnelle avant l'expiration du délai de dépôt des déclarations fiscales ;

- les requérants ne produisent pas de justificatifs de nature à établir qu'ils auraient versé à leurs fils Josselin des montants supérieurs à celui admis par l'administration.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A..., présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de Me B..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un contrôle sur pièces, par une proposition de rectification du 4 juillet 2014, l'administration a notifié à M. et Mme C..., des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2011 et 2012, en conséquence notamment du rattachement à leur foyer fiscal de trois de leurs enfants majeurs. Par un jugement du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a réduit leurs bases imposables à l'impôt sur le revenu d'une somme de 2 339 euros au titre de l'année 2011 et de 10 376 euros au titre de l'année 2012, et a rejeté le surplus de leur demande. Ils relèvent appel de ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de leur demande.

Sur la recevabilité de l'appel :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4. (...) ". Aux termes de l'article R. 751-3 du même code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le pli contenant la notification du jugement attaqué, qui a été présenté à M. et Mme C... le 21 mars 2018, n'a été retiré au bureau de poste que le 26 mars 2018 par les intéressés. Or, dès lors que le retrait de la lettre au bureau de poste est effectué avant l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la présentation du pli, le délai de recours contentieux ne commence à courir qu'à compter de la date du retrait. Il s'en suit qu'en ce qui les concerne, le délai d'appel n'était pas expiré à la date du 25 mai 2018 à laquelle la requête a été enregistrée au greffe de la cour.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 du code général des impôts : " (...) 3. Toute personne majeure âgée de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans lorsqu'elle poursuit ses études (...) peut opter, dans le délai de déclaration (...) entre : / 1° L'imposition de ses revenus dans les conditions de droit commun ; / 2° Le rattachement au foyer fiscal dont elle faisait partie avant sa majorité, si le contribuable auquel elle se rattache accepte ce rattachement et inclut dans son revenu imposable les revenus perçus pendant l'année entière par cette personne (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'une personne majeure entrant dans le champ d'application du 3 de l'article 6 du code général des impôts peut opter, dans le délai de déclaration, pour l'année entière et pour l'ensemble de ses revenus, entre une imposition de ses revenus dans les conditions de droit commun et le rattachement, avec l'accord du contribuable, au foyer fiscal de ses parents ou de l'un de ses parents, selon le cas et en suivant les règles fixées par ces dispositions. A l'expiration du délai de déclaration, l'option exercée est irrévocable pour l'année au titre de laquelle elle a été souscrite.

6. Lors de la déclaration de leurs revenus au titre des années 2011 et 2012, M. et Mme C... ont rattaché à leur foyer fiscal, leurs enfants majeurs Josselin et Héloïse en ce qui concerne l'année 2011, et Josselin, Héloïse et Alexis, en ce qui concerne l'année 2012. Après avoir constaté que ces enfants avaient déjà déposé des déclarations de revenus séparées au titre de ces mêmes années, l'administration a remis en cause le quotient familial des intéressés, ramené de six parts à quatre pour 2011 et de six parts à trois pour 2012, ainsi que les déductions relatives aux enfants à charge scolarisés dans l'enseignement supérieur.

7. Les requérants produisent la copie des demandes formulées par leurs enfants majeurs en vue de leur rattachement au foyer fiscal de leurs parents pour les années considérées. Il est constant que ces demandes ont bien été signées par les intéressés et établies avant l'expiration du délai des déclarations de revenus des parents valant acceptation du rattachement de ces enfants à leur foyer fiscal. Toutefois, il est également constant que les enfants majeurs concernés ont souscrit des déclarations de revenus à titre personnel postérieurement aux options qu'ils avaient formulées de rattachement au foyer fiscal de leurs parents. Le dépôt de ces déclarations de revenus à titre personnel dans les délais a eu pour effet de révoquer les options pour le rattachement au foyer fiscal des parents en dépit du fait que ces déclarations auraient été remplies par erreur par les intéressés ou qu'elles auraient eu pour seul objet de mentionner l'absence de revenus perçus. Les requérants soutiennent que leurs enfants majeurs ont pu valablement renoncé à l'option pour une imposition personnelle dès lors que les parents ont souscrit, postérieurement aux déclarations de leurs enfants, mais dans les délais requis, les déclarations du foyer fiscal en incluant les revenus de ces enfants conformément aux demandes de rattachement qu'ils avaient formulées. S'il était loisible aux enfants majeurs de revenir, dans les délais requis, sur les déclarations de revenus à titre personnel qu'ils avaient présentées, le seul fait que ces enfants figurent dans les déclarations de revenus de leurs parents ne permet pas d'établir qu'ils auraient finalement renoncé à une imposition personnelle de leurs revenus. Si les requérants produisent des courriers de leurs enfants indiquant qu'ils n'ont jamais eu l'intention de renoncer au rattachement au foyer fiscal de leurs parents, ainsi que des déclarations correctives des intéressés tendant à l'annulation des déclarations de revenus qu'ils avaient déposées, ces documents établis en juillet 2014, soit postérieurement aux délais de déclaration des revenus de l'année en litige ne permettent pas de remettre en cause l'option des enfants pour leur imposition personnelle devenue alors irrévocable.

8. Enfin, les requérants font valoir que la procédure de télédéclaration des revenus de l'année en litige ne comportait pas de dispositif d'alerte permettant de corriger une déclaration lorsqu'une même personne figure sur deux déclarations différentes. Toutefois, une telle circonstance dont les requérants pourraient, s'ils s'y croient fondés, se prévaloir dans le cadre d'une action indemnitaire, est sans incidence sur le caractère irrévocable de l'option exercée quant au rattachement d'un enfant au foyer fiscal.

9. En deuxième lieu, d'une part, l'article 156 du code général des impôts prévoit que " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal désignés aux 1 et 3 de l'article 6, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction : (...) II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil (...). La déduction est limitée, par enfant majeur, au montant fixé pour l'abattement prévu par l'article 196 B. (...) ". Ce montant s'élevait au titre des deux années en litige à 5 698 euros.

10. D'autre part, aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent les aliments à leurs père et mère, ou autres ascendants qui sont dans le besoin. ", aux termes de l'article 207 de ce code : " Les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques. " et aux termes de l'article 208 du même code : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit. ".

11. Il appartient aux requérants, pour déduire de leur revenu global imposable à l'impôt sur le revenu le montant des pensions versées à leurs enfants majeurs, d'apporter la preuve que les sommes étaient nécessaires à la satisfaction de leurs besoins, au sens de l'article 208 du code civil, ainsi que du versement effectif de ces sommes.

12. M. et Mme C... font valoir qu'au cours de l'année 2011, ils ont versé, à leurs fils Josselin, alors étudiant à l'école AgriParis Tech des pensions s'élevant à la somme de globale de 15 426 euros, soit pour un montant supérieur à la somme de 3 359 euros retenue par l'administration à déduire des revenus des intéressés de l'année 2011 à titre forfaitaire pour la pension alimentaire versée à Josselin. Il résulte en effet des relevés de comptes bancaires produits par les intéressés qu'ils ont versé, en 2011, à leurs fils Josselin, dont l'état de besoin n'est pas contesté, des sommes correspondant au montant dont ils font état. Ainsi, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a limité à 3 359 euros, le montant de la somme admise en déduction de leur revenu global au titre de la pension alimentaire versée à leur fils Josselin pour l'année 2011. Par suite, ils sont fondés à demander la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités, à hauteur de la réduction de leurs bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 2011 d'une somme de 2 339 euros, correspondant à la différence entre le montant de l'abattement prévu par l'article 196 B précisé du code général des impôts, fixé à 5 698 euros et la somme de 3 359 euros retenue par l'administration.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C... dans l'instance et non compris dans les dépens en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. et Mme C... de l'année 2011 sont réduites d'une somme de 2 339 euros.

Article 2 M. et Mme C... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu de l'année 2011, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités correspondants, en conséquence de la réduction de leurs bases d'imposition prononcée à l'article 1 ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 20 mars 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme C... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de la requête de M. et Mme C... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... C... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2020.

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N° 18LY02021


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