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19/07/2019 | FRANCE | N°18NT02667

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 juillet 2019, 18NT02667


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme de 1 554 euros correspondant aux honoraires qu'il a d'ores et déjà versés à son cons

eil pour le représenter.

Par un jugement n° 1603545 du 15 mai 2018, le tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme de 1 554 euros correspondant aux honoraires qu'il a d'ores et déjà versés à son conseil pour le représenter.

Par un jugement n° 1603545 du 15 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 juillet 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande préalable d'indemnisation ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme de 4 048,20 euros, à parfaire, correspondant aux honoraires versés à son conseil pour le représenter ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une d'erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation :

* l'attribution de l'échelon exceptionnel résulte directement de la parution du décret n° 2011-1234 du 4 octobre 2011 dont les dispositions ont majoré le contingentement pour l'accession à l'échelon exceptionnel du grade de major portant de fait rétroactivement le nombre de proposables d'un effectif de 111 à 146 ;

* l'administration a fait preuve d'une inertie fautive dans le délai de traitement de l'attribution de l'échelon exceptionnel ce qui constitue une atteinte disproportionnée à sa situation individuelle ;

* l'administration ne pouvait ignorer ni la promotion du requérant à l'échelon exceptionnel, ni la date de départ en retraite ;

* trois sous-officiers également visés par la décision du 13 février 2012 portant attribution à titre rétroactif de l'échelon exceptionnel du grade de major à compter du 1er mars 2011 et partis à la retraite un an après le requérant ont bénéficié d'une reconstitution de carrière ce qui constitue une rupture d'égalité entre militaires ;

- son préjudice matériel peut être évalué à la somme de 29 837,44 euros et son préjudice moral à la somme de 5 000 euros ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C...sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le décret n° 2011-1234 du 4 octobre 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons ;

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., titulaire du grade de major dans l'armée de terre, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er décembre 2011. Sa pension de retraite a été liquidée à cette date sur la base des émoluments afférents au 5ème échelon du grade de major. Par décision du 13 février 2012, l'intéressé a été admis au bénéfice de l'échelon exceptionnel de ce grade avec effet rétroactif à compter du 1er mars 2011. En octobre 2012, le service des ressources humaines et de la solde du ministère de la défense l'a informé qu'il percevrait un rappel de traitement consécutif à son reclassement pour la période courant du 1er mars au 1er décembre 2011. Puis, par décision du 9 mai 2012, le ministre de la défense a rejeté la demande de M. C... tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major. Par un jugement du 10 juin 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de M. C...tendant à l'annulation de cette décision du ministre de la défense du 9 mai 2012. Par sa présente requête, M. C...relève appel du jugement du 15 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme correspondant aux honoraires qu'il a d'ores et déjà versés à son conseil pour le représenter.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande préalable indemnitaire de M. C...n'a eu pour seul effet que de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande du requérant qui, en formulant les conclusions à fin de condamnation sus-analysées, leur a donné le caractère de conclusions de plein contentieux. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant la demande préalable indemnitaire de M. C...sont irrecevables.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

3. Aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : à tout moment en cas d'erreur matérielle ; dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ". Si cette dernière disposition permet notamment de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension, il appartient à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées, sans que les intéressés puissent se prévaloir de droits acquis qu'ils tiendraient d'actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, pour des motifs autres que l'exécution d'une loi, d'un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d'une décision du juge de l'excès de pouvoir.

4. En premier lieu, si le décret susvisé du 4 octobre 2011 a rétroactivement porté de 19 % à 25 % le pourcentage de l'effectif de majors pouvant se voir attribuer l'échelon exceptionnel au titre d'une année donnée et que le nombre de majors remplissant les conditions d'ancienneté dans le grade au sein de l'armée de terre pour bénéficier de cette attribution en 2011 a ainsi été porté rétroactivement de 111 à 146, il n'est pas contesté que cette augmentation du contingentement de promouvables a permis à M. C...de se voir attribuer ledit échelon et de bénéficier d'une revalorisation de sa solde à compter du 1er mars 2011. Toutefois, contrairement à ce qui est allégué, l'administration n'était pas légalement tenue de conférer au requérant cet avantage, dès lors qu'elle disposait d'un pouvoir discrétionnaire pour procéder à l'examen et à la suite donnée aux demandes des différents militaires remplissant les conditions réglementaires pour bénéficier d'un avancement de grade. Par suite, l'attribution au choix de l'échelon exceptionnel au requérant, postérieurement à sa radiation des cadres, n'a pas résulté directement de l'exécution rétroactive d'un règlement. En conséquence, le ministre de la défense n'a commis aucune illégalité fautive en refusant à l'intéressé de modifier les bases de liquidation de sa pension.

5. En second lieu, l'attribution à M. C...de l'échelon exceptionnel résulte directement de la modification du contingentement introduite par le décret du 4 octobre 2011. Il ressort des dispositions de ce décret qu'il s'est écoulé un délai de moins de deux mois entre le 6 octobre 2011, date de publication au Journal Officiel du décret en question, et le 1er décembre 2011, date de radiation des contrôles de M.C.... Dans ces conditions, l'administration ne saurait être regardée comme ayant fait preuve d'inertie fautive en ne prenant pas la décision d'attribution de l'échelon exceptionnel à M. C...dans ce délai de deux mois, mais seulement à la date du 13 février 2012, quatre mois après la date de publication dudit décret. En l'espèce, ce délai de quatre mois n'apparait pas anormalement long s'agissant d'une décision de cette nature. Par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de l'Etat serait engagée à son égard du fait du retard fautif de l'administration dans le cadre du traitement de l'attribution à l'intéressé de l'échelon exceptionnel du grade de major.

6. En troisième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. Si M. C... fait valoir que trois autres sous-officiers également visés par la décision du 13 février 2012 ont bénéficié d'une " reconstitution de carrière ", il n'est pas contesté que ces personnes ont pris leur retraite un an après l'intéressé. Dans ces conditions, les sous-officiers en question n'étaient pas placés dans une situation comparable. Par suite, la circonstance que l'avancement d'échelon des ces sous-officiers ait été pris en compte par l'administration pour le calcul de leurs droits à pension ne saurait induire une rupture du principe d'égalité.

7. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. C...au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juillet 2019.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N°18NT02667


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02667
Date de la décision : 19/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : CABINET MDMH

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-07-19;18nt02667 ?
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