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21/10/1997 | FRANCE | N°95-14457

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 octobre 1997, 95-14457


Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la Mutualité de l'Anjou est un groupement à but non lucratif qui, au moyen des cotisations versées par ses membres se propose de mener une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide ; que ses statuts prévoient la possibilité de créer et de gérer des oeuvres sociales mutualistes ; que parmi ces oeuvres sociales ont été notamment créées deux pharmacies mutualistes à Angers et à Cholet sans personnalité juridique distincte de celle de la Mutualité de l'Anjou ; que la chambre syndicale des pharmaciens du Main

e-et-Loire estimant que les pharmacies du département subissaient de...

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la Mutualité de l'Anjou est un groupement à but non lucratif qui, au moyen des cotisations versées par ses membres se propose de mener une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide ; que ses statuts prévoient la possibilité de créer et de gérer des oeuvres sociales mutualistes ; que parmi ces oeuvres sociales ont été notamment créées deux pharmacies mutualistes à Angers et à Cholet sans personnalité juridique distincte de celle de la Mutualité de l'Anjou ; que la chambre syndicale des pharmaciens du Maine-et-Loire estimant que les pharmacies du département subissaient de la part de la Mutualité de l'Anjou une concurrence illicite, au sens de l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, du fait que la cotisation forfaitaire acquittée par les adhérents qui s'engageaient à ne se fournir en médicaments qu'auprès de ces pharmacies mutualistes, était inférieure à celle demandée aux adhérents qui entendaient conserver le choix de leur pharmacien exerçant à titre libéral, a assigné la Mutualité de l'Anjou en dommages et intérêts et pour faire cesser les pratiques discriminatoires dont elle prétendait être victime ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,

Attendu que pour rejeter la demande de la chambre syndicale des pharmaciens du Maine-et-Loire, l'arrêt énonce qu'au moyen des cotisations de leurs membres, les mutuelles, groupements à but non lucratif, mènent des actions de prévoyance et de solidarité ; que leur fonctionnement est régi par le Code de la mutualité ; que les assurances mutuelles présentent un caractère civil, que la Mutualité de l'Anjou n'est donc pas " commerçant " au sens de l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ni, a fortiori, " producteur " ou " industriel " ou " artisan " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le régime juridique des mutuelles comme le caractère non lucratif de leur activité n'est pas de nature à les exclure du champ d'application de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dès lors qu'elles procèdent, comme en l'espèce, par la commercialisation de médicaments, à une activité de production, de distribution et de services, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

Et sur le premier moyen pris en sa troisième branche :

Vu l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986,

Attendu que pour rejeter la demande de la chambre syndicale des pharmaciens du Maine-et-Loire l'arrêt énonce encore que celle-ci n'est pas la " partenaire économique " de la Mutualité de l'Anjou et que cette dernière ne tente pas d'obtenir et n'obtient pas de cette chambre des " conditions de vente " ou des " modalités de vente ou d'achat " qui seraient discriminatoires, c'est-à-dire qui défavoriseraient cet organisme syndical par rapport à d'autres partenaires économiques ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans relever que la Mutualité de l'Anjou en exploitant une pharmacie dépourvue de personnalité juridique distincte, était la concurrente directe des officines libérales, et, par voie de conséquence, sa " partenaire économique ", de sorte que la chambre syndicale des pharmaciens du Maine-et-Loire était fondée à demander réparation du préjudice subi du fait du prix discriminatoire pratiqué par la mutuelle à l'égard de ses adhérents, non justifié, selon elle, par des contreparties réelles, afin d'obtenir qu'ils fréquentent exclusivement les pharmacies mutualistes du département, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du premier moyen et sur les deuxième et troisième moyens pris en leurs diverses branches :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mars 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-14457
Date de la décision : 21/10/1997
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Dispositions diverses - Domaine d'application - Mutuelle commercialisant des médicaments.

1° Le régime juridique des mutuelles, comme le caractère non lucratif de leur activité, n'est pas de nature à les exclure du champ d'application de l'ordonnance du 1er décembre 1986, dès lors que, par la commercialisation de médicaments, elles procèdent à une activité de production, de distribution et de services.

2° CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Transparence et pratiques restrictives - Pratique discriminatoire - Partenaire économique - Champ d'application - Mutuelle exploitant une pharmacie - Chambre des pharmaciens.

2° Ne donne pas de base légale à sa décision, au regard de l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, la cour d'appel qui rejette la demande de dommages-intérêts formée par une chambre syndicale de pharmaciens contre une mutuelle, aux motifs que cet organisme syndical n'est pas le partenaire économique de cette mutuelle, sans relever qu'en exploitant une pharmacie dépourvue de personalité juridique distincte, la mutuelle était la concurrente directe des officines libérales, et par voie de conséquence, la partenaire économique de la chambre syndicale des pharmaciens, de sorte que cette dernière était fondée à demander réparation du préjudice subi du fait du prix discriminatoire pratiqué par la mutuelle à l'égard de ses adhérents, non justifié selon elle par des contreparties réelles, afin d'obtenir qu'ils fréquentent exclusivement les pharmaciens mutualistes du département.


Références :

ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 36-1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 07 mars 1995

A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1994-03-01, Bulletin 1994, IV, n° 91 (1), p. 71 (rejet) ; Chambre commerciale, 1995-12-12, Bulletin 1995, IV, n° 301, p. 276 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 oct. 1997, pourvoi n°95-14457, Bull. civ. 1997 IV N° 270 p. 234
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 IV N° 270 p. 234

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Léonnet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Delaporte et Briard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.14457
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