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19/12/1968 | FRANCE | N°68-513

France | France, Conseil constitutionnel, 19 décembre 1968, 68-513


Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le Code électoral ;
Vu, présentés par M. Marcel Raffier, demeurant 17, avenue du Val-Vert, au Puy (Haute-Loire), la requête sommaire enregistrée le 3 juillet 1968 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et le mémoire ampliatif enregistré le 11 juillet 1968 à la préfecture de la Haute-Loire, ladite requête et ledit mémoire, tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérat

ions électorales auxquelles il a été procédé les 23 et 30 juin 1968 dans la de...

Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le Code électoral ;
Vu, présentés par M. Marcel Raffier, demeurant 17, avenue du Val-Vert, au Puy (Haute-Loire), la requête sommaire enregistrée le 3 juillet 1968 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et le mémoire ampliatif enregistré le 11 juillet 1968 à la préfecture de la Haute-Loire, ladite requête et ledit mémoire, tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 23 et 30 juin 1968 dans la deuxième circonscription de la Haute-Loire pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu le mémoire en défense présenté pour M. René Chazelle, député, ledit mémoire enregistré comme ci-dessus le 8 août 1968 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Raffier, ledit mémoire enregistré comme ci-dessus le 31 août 1968 ;
Vu le mémoire en duplique présenté pour M. Chazelle, ledit mémoire enregistré comme ci-dessus le 19 septembre 1968 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;

En ce qui concerne les moyens de propagande :
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les deux candidats en présence au second tour de scrutin ont usé de moyens de propagande irréguliers ; que l'affiche apposée en faveur de M. Chazelle le 29 juin, après la clôture de la campagne électorale, ne contient aucune imputation nouvelle à laquelle son adversaire n'avait pu répondre antérieurement ; que ces irrégularités, si regrettables qu'elles soient, n'ont pu changer le sens du scrutin ;
2. Considérant qu'il n'est pas établi que certains électeurs de la commune de Lafarre n'aient pas reçu les documents de propagande électorale ; que le requérant lui-même admet que cette lacune, si elle s'était produite, aurait affecté les deux candidas ;
En ce qui concerne le libellé du bulletin de vote de M. Chazelle :
3. Considérant que la mention du titre de "député suppléant sortant" portée sur le bulletin de vote imprimé au nom de M. Chazelle, au regard du nom de son remplaçant, M. Soleilhac, bien qu'irrégulière, n'a pu créer aucune équivoque sur le titre de ce dernier ;
En ce qui concerne la régularité des listes électorales pour le second tour :
4. Considérant que, si le requérant allègue que quelques noms auraient été ajoutés entre les deux tours de scrutin sur les listes électorales de certaines communes, il n'indique pas les noms des électeurs en cause ; que le moyen ne peut, dès lors, qu'être rejeté, faute de précisions suffisantes pour permettre au juge de l'élection d'en apprécier le bien-fondé ;
En ce qui concerne la composition des bureaux de vote :
5. Considérant que, si le requérant soutient qu'un grand nombre des bureaux de vote de la circonscription n'étaient pas régulièrement composés, il ne cite pas le nom des communes incriminées ; que cette allégation doit, dès lors, être rejetée ;
6. Considérant que le requérant n'établit pas que, contrairement aux dispositions de l'article R. 46 du Code électoral, le scrutin se soit déroulé en la présence d'un seul membre du bureau de vote dans la commune de La Chomette ;
7. Considérant, enfin, que, si les procès-verbaux de vingt-sept des vingt-neuf communes citées par le requérant ne mentionnent pas la présence, lors des opérations de dépouillement des votes, d'un nombre le scrutateurs suffisant, les lacunes des procès-verbaux ne sont pas à elles seules de nature à établir que le dépouillement du scrutin s'est effectué dans des conditions irrégulières, dès lors qu'en vertu du second alinéa de l'article R. 64 du Code électoral, les membres du bureau de vote peuvent, en cas d'insuffisance du nombre des scrutateurs, participer au dépouillement du scrutin et que surtout les procès-verbaux dont il s'agit ne contiennent aucune réclamation relative à la régularité du scrutin ; qu'il résulte enfin des attestations produites par le député élu concernant certaines des communes incriminées, que les bureaux de vote avaient été régulièrement complétés par des scrutateurs et que les auteurs des procès-verbaux ont seulement omis de mentionner les noms de ces scrutateurs ;
En ce qui concerne la régularité des opérations de vote :
8. Considérant qu'il n'est établi ni que les bulletins de vote aient été remis de la main à la main dans le bureau de vote de Saint-Préjet-d'Allier ni que dans le bureau Jeanne-d'Arc de la ville du Puy des électeurs se soient abstenus de passer par les isoloirs ;
9. Considérant que, si le requérant produit un témoignage écrit au sujet d'un déplacement de l'urne qui se serait produit à La Chomette pour permettre à un invalide d'exercer son droit de vote, il résulte des termes mêmes de ce document que cet incident a été constaté le 23 juin 1968, au premier tour du scrutin, et non pas au scrutin du 30 juin ;
En ce qui concerne les votes par correspondance :
10. Considérant qu'en réponse au moyen tiré par le requérant de ce qu'un électeur de la commune de Saint-Georges-d'Aurac n'aurait pas été mis en mesure d'exercer son droit de voter par correspondance, le député élu a produit une attestation du maire d'où il résulte que l'électeur dont il s'agit n'avait pas produit une pièce justificative établissant qu'il entrait dans l'une des catégories de personnes visées aux articles L. 79 et suivants du Code électoral ; que, dans ses observations en réplique, le requérant n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer que c'est à tort que l'électeur en cause n'a pas été admis à voter par correspondance ;
11. Considérant, d'une part, que tout électeur admis à voter par correspondance peut renoncer au bénéfice de ce mode de votation et se rendre, le jour du scrutin, au bureau de vote pour exercer son droit de vote ; que, d'autre part, l'exercice du droit de vote par correspondance au premier tour n'oblige pas l'électeur à recourir au même procédé de vote pour le second tour ; que, dès lors, la circonstance que deux électeurs de la commune de Josat aient voté par correspondance le 23 juin 1968 ne faisait pas obstacle à ce que les intéressés viennent voter en personne, au second tour du scrutin, le 30 juin suivant ;
12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les électeurs ayant voté par correspondance dans les communes de Couteuges et Montchard avaient joint à leur vote leur carte d'électeur, laquelle leur a été restituée après le scrutin ; que l'électeur ayant voté par correspondance à Vals-le-Chastel avait égaré sa carte d'électeur mais avait joint à son vote une pièce de nature à établir son identité ;
13. Considérant, par contre, qu'il résulte des énonciations du procès-verbal d'ouverture des votes par correspondance de la commune d'Ally que quatre votes ont été retenus alors que les électeurs n'avaient pas joint à leur vote leur carte d'électeur, comme l'impose l'article L. 83 du Code électoral et, qu'en l'absence de mentions précises sur le procès-verbal quant aux cartes d'électeurs jointes aux votes par correspondance, les documents produits par la commune du Brignon ne sont pas de nature, eu égard aux mentions du timbre à date qui y a été apposé par l'administration des postes, à établir que les dix votes par correspondance qui ont été admis dans cette commune étaient accompagnés des cartes d'électeurs correspondantes ; qu'il y a lieu, dès lors, de déduire quatorze suffrages du nombre des voix obtenues par le candidat proclamé élu ;
14. Considérant que, si les procès-verbaux de dépouillement du scrutin examinés par le requérant pour les communes de SaintPaulien, SaintVincent, Saint-Didier-sur-Doulon, Salzuit, Grenier-Montgon, Mazeyrat-Crispinhac, Reilhac et Espaly-Saint-Marcel ne comportent ni le procès-verbal annexe d'ouverture des votes par correspondance, ni les enveloppes qui doivent y être jointes, il résulte de l'instruction que ces documents et pièces ont été établis et conservés ; que leur examen ne fait apparaître aucune irrégularité ; que si l'une des rubriques du procès-verbal de dépouillement du scrutin du premier bureau de vote du Brignon n'a- pas été remplie, cette lacune est comblée par l'ensemble des mentions du procès-verbal d'ouverture des votes par correspondance, régulièrement dressé le jour du scrutin et annexé au procès-verbal de dépouillement des votes ; que la mention manuscrite du maire d'Espaly-Saint-Marcel concernant le nombre des votes par correspondance reçus dans les deux bureaux de vote de la commune, différent de celui qui figure aux procès-verbaux, se rapporte, eu égard à sa date, au premier tour du scrutin ; qu'enfin, le procès-verbal d'ouverture des votes par correspondance de la commune de Léotoing établit qu'un vote par correspondance a été régulièrement enregistré dans cette commune ;
En ce qui concerne le décompte des voix :
15. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'examen des listes d'émargement qu'aucune erreur n'a été commise dans le décompte du nombre des suffrages exprimés mentionnés sur les procès-verbaux des communes de Saint-Haon et de Saint-Ilpize ; que si, par contre, le nombre des émargements portés sur les listes électorales des quatre bureaux de vote de la ville du Puy et celui de la commune de Jullianges est inférieur au nombre des enveloppes et bulletins trouvés dans les urnes, les rectifications qu'il convient d'apporter en conséquence aux procès-verbaux en cause ne peuvent aboutir à une réduction des suffrages obtenus par M. Chazelle, celui-ci n'étant le candidat le plus favorisé dans aucun de ces bureaux ;
16. Considérant que si, contrairement aux allégations de la requête, aucune erreur n'a été commise dans le décompte des suffrages valablement exprimés dans la commune de Craponne-sur-Arzon et dans le deuxième bureau de vote de Brioude, il ressort des mentions du procès-verbal du premier bureau de vote de Brioude que le nombre des suffrages valablement exprimés s'établissait à 1 466 alors que le total des voix attribuées au x deux candidats s'élève à 1 467 ; qu'ainsi une erreur d'une voix a été commise lors du décompte des suffrages ; qu'il y a lieu, quelle que soit l'origine de cette erreur, de retrancher une unité du nombre des voix obtenues par M. Chazelle, candidat le plus favorisé ;
17. Considérant que, si les feuilles de dépouillement de certains bureaux de vote n'ont pas été établies d'une façon rigoureusement conforme aux normes fixées par l'Administration, il résulte clairement des mentions qui y sont portées que le nombre des voix attribuées aux deux candidats par les procès-verbaux de dépouillement correspond exactement au nombre des bulletins pointés pour chacun d'eux par les scrutateurs ; qu'ainsi les résultats consignés par les procès-verbaux des communes de Sainte-Florine, d'Aiguilhe, de Saint-Ilpize, de Paulhac, de Beaumont, de Cohade, de Polignac, de Cussac, de Grenier-Montgon et de Saint-Victor-sur-Arlane doivent être tenus pour exacts ;
En ce qui concerne la régularité des procès-verbaux :
18. Considérant que, si les enveloppes contenant des bulletins nuls ou celles trouvées vides dans l'urne n'ont pas été jointes aux procès-verbaux de cinq communes et si les bulletins et enveloppes joints aux procès-verbaux de six autres communes ne sont pas paraphés par les scrutateurs, le requérant n'établit pas que cette omission ou l'absence d'authentification des bulletins nuls ait eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
19. Considérant que, contrairement aux allégations de la requête, les feuilles de dépouillement du scrutin sont jointes au procès-verbal de la commune d'Alleyras ; que les feuilles de dépouillement des communes de Domeyrat, Saint-Vidac, Anvers, Tailhac, Chanaleilles, Esplantas, Saint-Préjet-d'Allier, Vezezoux, Espalem, Mazeyrat-Crispinhac et de Reilhac ont été communiquées au Conseil constitutionnel ; que leur examen ne révèle aucune irrégularité ou erreur dans le décompte des voix attribuées aux candidats dans chacune de ces communes ; que, si les feuilles de pointage des communes de Brioude (premier bureau), de Cussac, de Félines, de La Besseyre et de Sainte-DIarie-Desges, jointes aux procès-verbaux ne sont pas signées par les scrutateurs, cette irrégularité n'est pas de nature à entraîner l'annulation de l'élection dès lors que les suffrages qui y sont consignés correspondent aux mentions des procès-verbaux ; que ces derniers ne comportent l'énoncé d'aucune réclamation et qu'aucune intention frauduleuse n'est établie ni même alléguée ; qu'enfin, s'il résulte de l'instruction qu'aucune feuille de pointage n'a été établie lors du dépouillement des votes dans les communes de Chastel, Saint-Jean-de-Nay, Saint-Privat-d'Allier et de Saugues, cette irrégularité, qui n'a pas été relevée par la commission de recensement, ne saurait, aussi grave qu'elle soit et dès lors que le requérant ne soutient pas que les énonciations des procès-verbaux relatives au résultat de l'élection seraient entachées d'erreurs, entraîner, dans les circonstances de l'espèce, l'annulation de l'élection ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que quinze voix doivent être retranchées du nombre des suffrages recueillis par M. Chazelle ; qu'après cette déduction, le député élu conserve 25 931 voix et garde ainsi la majorité sur M. Raffier, qui a obtenu 25 914 voix ; que la requête susvisée doit, dès lors, être rejetée ;

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Marcel Raffier est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 décembre 1968, où siégeaient : M. Gaston PALEWSKI, président, CASSIN, MONNET, WALINE, ANTONINI, SAINTENY, DUBOIS, CHATENET et LUCHAIRE.


Synthèse
Numéro de décision : 68-513
Date de la décision : 19/12/1968
A.N., Haute-Loire (2ème circ.)
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Élections à l'Assemblée nationale

Références :

AN du 19 décembre 1968 sur le site internet du Conseil constitutionnel

Texte attaqué : Élection à l'Assemblée nationale (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°68-513 AN du 19 décembre 1968
Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:1968:68.513.AN
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