Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête présentée par M. Jérôme CAHUZAC, demeurant à Goussainville (Val-d'Oise), enregistrée à la préfecture de Lot-et-Garonne le 27 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 3ème circonscription du département de Lot-et-Garonne pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu le mémoire en défense présenté par M. Alain MERLY, député, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 25 juillet 2002 ;
Vu les mémoires en réplique présentés par M. CAHUZAC, enregistrés comme ci-dessus les 25 septembre et 3 décembre 2002 ;
Vu les observations présentées par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 4 novembre 2002 ;
Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, enregistrée comme ci-dessus le 7 octobre 2002, approuvant après réformation le compte de campagne de M. MERLY ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
SUR LES GRIEFS RELATIFS AU FINANCEMENT DE LA CAMPAGNE DE M. MERLY :
1. Considérant que M. CAHUZAC soutient qu'un syndicat agricole et une coopérative agricole ont financé la diffusion de deux lettres de soutien à la candidature de M. MERLY, en violation de l'article L. 52-8 du code électoral qui prohibe toute participation de personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, au financement de la campagne électorale d'un candidat ; que, selon lui, le compte de campagne ne comporterait pas l'ensemble des dépenses électorales ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort d'une correspondance adressée le 6 juin 2002 par le président du " Syndicat Coordination rurale 47 " à M. MERLY que la première des lettres mentionnées ci-dessus n'émane pas de ce syndicat agricole mais d'un membre de celui-ci s'exprimant à titre personnel en utilisant un fichier dont il avait la libre disposition ; que la seconde lettre a été adressée par M. MERLY aux agriculteurs de sa circonscription au moyen d'un fichier de 4 500 adresses qu'il a loué, par l'intermédiaire de son mandataire financier, à une société coopérative agricole pour la somme de 143,52 € ; qu'il n'est pas établi que cette société aurait sous-évalué cette prestation ou pris en charge d'autres prestations en vue de l'envoi de cette lettre ; que, par suite, le grief tiré de la violation de l'article L. 52-8 du code électoral ne peut être accueilli ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que les frais d'envoi des deux lettres ci-dessus mentionnées ont été pris en charge par le compte de campagne ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que des dépenses d'affichage et de permanence exposées pour le compte du candidat élu auraient été omises ; que celles concernant la réunion électorale organisée au Temple-sur-Lot par " l'Union pour la majorité présidentielle " en faveur des trois candidats qu'elle avait investis dans le département ont été retenues pour le tiers de leur montant ; que l'utilisation gratuite de moyens collectifs de transport à l'occasion de cette réunion n'est pas établie ;
4. Considérant, en dernier lieu, que, si M. CAHUZAC soutient que d'autres dépenses ne figureraient pas dans le compte de campagne ou auraient été sous-évaluées, ces griefs ont été invoqués pour la première fois dans un mémoire enregistré le 3 décembre 2002 ; qu'ils constituent ainsi des griefs nouveaux présentés hors du délai de dix jours fixé par l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée ; qu'ils sont, par suite, irrecevables ;
- SUR LES GRIEFS RELATIFS AU DÉROULEMENT DE LA CAMPAGNE ÉLECTORALE :
5. Considérant que les lettres mentionnées ci-dessus n'ont introduit dans la campagne électorale aucun élément nouveau auquel M. CAHUZAC n'aurait pas eu le temps de répondre ;
6. Considérant que, s'il est soutenu que M. MERLY se serait livré à un affichage en dehors des emplacements officiels, en méconnaissance de l'article L. 51 du code électoral, il ne ressort pas du procès-verbal de constat produit par le requérant que cet affichage aurait revêtu un caractère massif ;
7. Considérant, enfin, que le grief tiré d'une méconnaissance des dispositions de la loi du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. CAHUZAC doit être rejetée,
Décide :
Article premier :
La requête de M. Jérôme CAHUZAC est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 5 décembre 2002, où siégeaient : MM. Yves GUÉNA, Président,
Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Pierre JOXE, Pierre MAZEAUD, Mmes Monique PELLETIER, Dominique SCHNAPPER et Simone VEIL.