La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/10/1986 | FRANCE | N°35261

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 15 octobre 1986, 35261


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 juin 1981 et 21 octobre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... SOUILLER, demeurant ... 39100 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 29 avril 1981 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes qui tendaient, d'une part, par la voie de la tierce-opposition, à ce que le tribunal déclare non avenu son jugement en date du 2 novembre 1978, annulant la décision du 13 mai 1977 par laquelle l'inspecteur du travail avait reje

té la demande d'autorisation de le licencier qui lui avait été p...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 juin 1981 et 21 octobre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... SOUILLER, demeurant ... 39100 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 29 avril 1981 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes qui tendaient, d'une part, par la voie de la tierce-opposition, à ce que le tribunal déclare non avenu son jugement en date du 2 novembre 1978, annulant la décision du 13 mai 1977 par laquelle l'inspecteur du travail avait rejeté la demande d'autorisation de le licencier qui lui avait été présentée par la société Idéal-Standard et, d'autre part, à ce que ce même tribunal annule la décision du 4 avril 1979 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision du 27 novembre 1978 de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser son licenciement ;
2° rejette la demande présentée devant le tribunal administratif de Besançon par la société Idéal-Standard et dirigée contre la décision du 13 mai 1977 ;
3° annule pour excès de pouvoir la décision du 4 avril 1979 ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu la loi n° 81-736 du 4 août 1981 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Durand-Viel, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, avocat de M. Y... et de la SCP Martin Martinière, Ricard, avocat de la Société Nouvelle "Idéal Standard",
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Y..., délégué du personnel et délégué syndical à l'usine Idéal Standard de Dôle, a fait l'objet d'une demande d'autorisation de licenciement ; que cette autorisation fut refusée par une décision de l'inspecteur du travail en date du 13 mai 1977 qui fut annulée par jugement du 2 novembre 1978 du tribunal administratif de Besançon ; qu'à la suite de ce jugement, l'employeur a présenté une nouvelle demande d'autorisation de licenciement de M. Y... qui fut rejetée par une décision du 27 novembre 1978 de l'inspecteur du travail ; que, sur recours hiérarchique, le ministre du travail a, par une décision du 4 avril 1979, rapporté cette seconde décision ; que M. Y... fait appel du jugement du 29 avril 1981 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes qui tendaient l'une, par la voie de la tierce opposition, à l'annulation du jugement du 2 novembre 1978, l'autre à l'annulation de la décision du 2 avril 1979 autorisant son licenciement ;
Sur les conclusions à fin de non lieu :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa du II de l'article 14 de la loi du 4 août 1981 portant amnistie : "Tout salarié qui, depuis le 1er janvier 1975, a été licencié à raison de faits en relation avec sa fonction de représentant élu du personnel ou de délégué syndical peut invoquer cette qualité", notamment aprèsque l'autorisation administrative de licenciement a été accordée, "pour obtenir sa réintégration dans son emploi ou dans un emploi équivalent chez le même employeur à condition que cette réintégration soit possible. Il doit, à cet effet, présenter une demande dans un délai de trois mois, à compter de la promulgation de la présente loi" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'amnistie des faits retenus comme motifs de sanctions prononcées par un employeur contre un représentant élu du personnel ou un délégué syndical n'entraîne pas de plein droit la réintégration de ce dernier dans l'entreprise ; que l'annulation pour excès de pouvoir, prononcée par le juge administratif, de l'autorisation, donnée par l'inspecteur du travail ou par le ministre du travail, de licencier pour faute grave un salarié protégé pouvant avoir, notamment en ce qui concerne la réintégration de ce salarié, des effets plus larges que ceux que comporte l'amnistie, le recours formé par le salarié protégé licencié pour faute grave conserve son objet, même après l'intervention de la loi précitée du 4 août 1981 portant amnistie ; qu'il y a lieu, en conséquence, de statuer sur la requête de M. Y... ;
Sur la légalité de la décision du 13 mai 1977 refusant d'autoriser le licenciement de M. Y... :

Considérant que lorsqu'est envisagé le licenciement d'un salarié investi d'un mandat de représentant du personnel, des fonctions de délégué syndical, de membre du comité d'établissement ou de représentant syndical au comité d'établissement, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi de cette demande et, en cas de recours hiérarchique, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier la mesure compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exercice du mandat et des fonctions dont il est investi ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier qu'à l'occasion d'opérations de chronométrage menées dans un atelier de coulage de pièces de la société Idéal Standard, des ouvriers de l'atelier se sont opposés à ce contrôle ; que M. Y... s'est emparé des instruments de mesure du contremaître qui en était chargé, rendant ainsi impossible dans l'immédiat la poursuite des opérations ; que toutefois, ainsi que le confirme notamment une lettre du ministre du travail du 27 décembre 1977 l'incident qui s'est déroulé sans violence a pris fin rapidement puisque le chronométrage a repris dans l'après-midi et le lendemain sans opposition ; que dans les circonstances de l'espèce le comportement de M. Y... à l'occasion d'un conflit du travail n'a pas présenté un caractère de gravité suffisante pour justifier son licenciement ; qu'ainsi M. Y..., qui était recevable malgré l'intervention de nouvelles décisions prises sur la demande d'autorisation de licenciement après l'intervention du jugement du tribunal administratif de Besançon du 2 novembre 1978 à faire tierce opposition à ce jugement, est également fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa tierce opposition et à demander que le jugement susvisé du 2 novembre 1978 soit déclaré non avenu ;
Sur la légalité de la décision du ministre du travail en date du 4 avril 1979 :

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que pour annuler le refus de l'inspecteur du travail du 6 novembre 1978 le ministre s'est notamment fondé sur ce que les faits, qui avaient été retenus à l'appui de la décision du 13 mai 1977 annulée par le tribunal administratif, avaient été déclarés par celui-ci d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ; que dès lors il y a lieu, par voie de conséquence de l'annulation de ce jugement résultant de la présente décision, d'annuler la décision ministérielle susvisée ;
Considérant que M. Y... est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que par son jugement du 29 avril 1981, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre ladite décision ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 29 avril 1981 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon endate du 2 novembre 1978 est déclaré non avenu.

Article 3 : La demande de la société Idéal Standard tendant à l'annulation de la décision en date du 13 mai 1977 de l'inspecteur dutravail refusant d'autoriser le licenciement de M. Y... est rejetée.

Article 4 : La décision du ministre du travail en date du 4 avril 1979 annulant sur le recours de la société Idéal Standard la décision de l'inspecteur du travail en date du 27 novembre 1978 est annulée.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à la société Idéal Standard et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 35261
Date de la décision : 15/10/1986
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01 TRAVAIL - LICENCIEMENT - SALARIES PROTEGES


Publications
Proposition de citation : CE, 15 oct. 1986, n° 35261
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Durand-Viel
Rapporteur public ?: Daël

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:35261.19861015
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award