Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 août 1984 et 11 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X..., demeurant ... à Toulouse 31000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule un jugement en date du 2 mai 1984 en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'actualisation de la valeur de l'immeuble dont elle est propriétaire, sinistré à la suite de la rupture d'une canalisation d'eau dont la Ville de Toulouse d'eau dont la Ville de Toulouse est propriétaire, et à l'indemnisation des préjudices résultant de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de quitter son immeuble ;
2° condamne la Ville de Toulouse à payer à Mme X... les intérêts au taux légal de la somme de 200 650 F à compter du 19 juillet 1982, la somme de 31 251 F en dédommagement des frais consécutifs aux dommages causés à son immeuble et la somme de 50 000 F en réparation des troubles dans ses conditions d'existence ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Nauwelaers, Maître des requêtes,
- les observations de Me Gauzes, avocat de Mme X... et de Me Célice, avocat de la Ville de Toulouse,
- les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité des dommages affectant l'immeuble de Mme GARCIA :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports de l'expert commis par le tribunal administratif de Toulouse que les fissures qui ont affecté l'immeuble appartenant à Mme X..., le rendant impropre à l'habitation, ont eu pour cause directe et immédiate les infiltrations d'eau dans le sol consécutives à la rupture, le 7 octobre 1980, d'une canalisation d'eau appartenant à la Ville de Toulouse ; que si cette dernière soutient que les dommages seraient imputables à des travaux privés, elle n'apporte pas, sur la nature, la date, la localisation et l'effet de ces travaux, des précisions suffisantes pour établir que ceux-ci seraient la cause directe des dommages ;
Considér9nt que si la Ville de Toulouse allègue que la rupture de la canalisation d'eau serait elle-même imputable à ces travaux privés, elle ne saurait s'exonérer, en invoquant le fait du tiers, de la responsabilité qui lui incombe en tant que maître d'ouvrage de la canalisation d'eau ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Ville de Toulouse n'est pas fondée à soutenir, par la voie du recours incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a déclarée responsable des désordres survenus dans l'immeuble de Mme GARCIA et l'a, par suite, condamnée à payer à Y... GARCIA la somme de 200 650 F, représetant la valeur vénale de l'immeuble sinistré ;
Sur les autres préjudices invoqués par Mme X... :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment d'une facture produite devant le Conseil d'Etat que Mme X... a exposé des frais de déménagement de 3 100 F ; que Mme X... ayant été obligée de quitter son immeuble, lequel avait fait l'objet d'un arrêté de péril, par suite des dommages consécutifs à la rupture de la canalisation d'eau appartenant à la Ville de Toulouse, ces frais de déménagement ont le caractère d'un préjudice direct imputable à la ville ; que, par suite, Mme X... est fondée à demander que la Ville de Toulouse soit condamnée à les lui rembourser ; que Mme X... est également fondée à demander que la Ville de Toulouse lui rembourse les frais d'étaiement et de démolition de son immeuble, soit 26 389,80 F ;
Considérant, en revanche, que les honoraires versés par Mme X... à un cabinet d'experts ne constituent pas une charge directement imputable au fait de la Ville de Toulouse ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à en demander le remboursement par la ville ;
Considérant enfin qu'il résulte de l'instruction que les dommages causés à l'immeuble de Mme GARCIA, puis l'obligation de le faire démolir et de trouver un nouveau logement ont apporté dans les conditions d'existence de Mme X..., âgée de plus de quatre-vingt-ans, des troubles dont il sera fait une équitable appréciation en les évaluant à 40 000 F ; que, dès lors, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse lui a refusé toute indemnisation de ce chef ;
Sur les intérêts :
Considérant que Y... GARCIA se borne à demander les intérêts de la somme de 200 650 F ; qu'elle a droit aux intérêts au taux légal de cette somme à compter du 2 octobre 1982, date à laquelle elle a saisi le tribunal administratif d'une demande d'indemnité dirigée contre la Ville de Toulouse ;
Article ler : La somme de 200 650 F que la Ville de Toulouse a été condamnée à payer à Mme X... par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 2 mai 1984 portera intérêt au taux légal à compter du 2 octobre 1982.
Article 2 : La Ville de Toulouse est condamnée à payer, en outre, à Y... GARCIA la somme de 69 489,80 F.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse endate du 2 mai 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... et le recours incident de la Ville de Toulouse sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., à la Ville de Toulouse et au ministre de l'intérieur.