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13/02/1987 | FRANCE | N°51128

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 13 février 1987, 51128


Vu la requête enregistrée le 6 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société bretonne d'aménagement foncier et d'établissement rural S.B.A.F.E.R. , dont le siège est ... à Saint-Brieuc 22000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement du 30 mars 1983, par lequel le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 36 384 F qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice résulté pour elle du refus de concours de la force publique pour l'exécution d'une décision judiciair

e d'expulsion, concernant des terres agricoles sises à Cornillé et indûme...

Vu la requête enregistrée le 6 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société bretonne d'aménagement foncier et d'établissement rural S.B.A.F.E.R. , dont le siège est ... à Saint-Brieuc 22000 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° réforme le jugement du 30 mars 1983, par lequel le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 36 384 F qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice résulté pour elle du refus de concours de la force publique pour l'exécution d'une décision judiciaire d'expulsion, concernant des terres agricoles sises à Cornillé et indûment occupées par les consorts X... ;
2° condamne l'Etat à lui verser la somme de 141 124 F avec intérêts et intérêts des intérêts, dont 100 000 F à titre de provision sur le montant de l'indemnité d'occupation et sauf à parfaire ;
3° ordonne toute mesure d'instruction utile en vue de déterminer le montant exact de l'indemnité d'occupation ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bouchet, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Cossa, avocat de la société bretonne d'aménagement foncier et d'établissement rural,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL a demandé, le 11 octobre 1971, le concours de la force publique en vue d'exécuter une décision judiciaire tendant à l'expulsion des époux X... de terres agricoles dont elle est propriétaire situées dans le territoire de la commune de Cornillé ; que le refus qui lui a été opposé engage la responsabilité de l'Etat alors même que le concours de la force publique aurait été rendu plus difficile du fait que la société avait vendu aux époux X... la maison d'habitation implantée dans l'exploitation agricole litigieuse ; que la période indemnisable a commencé avant le 15 mars 1972, date à laquelle la requérante limite ses conclusions ;
Considérant que le préjudice dont la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL est en droit de demander réparation est égal à l'indemnité d'occupation qu'auraient dû lui verser les époux X..., à l'exclusion de tous frais de gestion qu'elle aurait dû supporter en tout état de cause en qualité de propriétaire ; que l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat ne permet pas d'évaluer le montant de cette indemnité, si ce n'est dans la limite d'une provision de 50 000 F ; que, par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'ordonner avant dire droit une expertise aux fins de rechercher tous éléments d'appréciation de l'indemnité d'occupation des terres litigieuses pour la période postérieure au 15 mars 1972 ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué en tant que par ledit jugement le tribunal a refusé d'indemniser ce chef de préjudice ;

Considérant en revanche que la société n'établit pas que la perte qu'elle aurait subie du fait que l'Etat ne lui a remboursé que partiellement les dépenses exposées par elle pour acquérir ou aménager des lots remembrés en vue de leur inclusion dans l'emprise d'une voie expresse et situés à proximité des terres litigieuses serait imputable au maintien des époux X... dans l'exploitation ; que, alors même que ces terres seraient invendables tant qu'y demeurent les occupants sans titre, la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL qui conserve la propriété des biens dont il s'agit n'est pas fondée à demander à l'Etat de lui rembourser les sommes qu'elle a exposées pour leur acquisition ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté ces deux derniers chefs de préjudice ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL est fondée à demander dans les limites indiquées ci-dessus la réformation du jugement attaqué ; qu'en revanche, le surplus des conclusions de la requête doit être rejeté ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre les frais d'expertise à la charge de l'Etat ;
Article 1er : L'Etat est condamné à payer à la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL une indemnité provisionnelle de 50 000 F.

Article 2 : Il sera procédé, par un expert désigné par le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat, à une expertise en vue de déterminer, année après année d'occupation mentionnée ci-dessus, à compter du 15 mars 1972 tous éléments d'appréciation de ladite indemnité, en fonction des circonstances particulières de l'espèce, et notamment de la situation du marché foncier régional, et par référence au prix d'une convention provisoire et précaire d'occupation.

Article 3 : L'expert prêtera serment par écrit et déposera son rapport au Secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat dans le délai de 6 mois suivant la prestation de serment.

Article 4 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de l'Etat.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE BRETONNE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 51128
Date de la décision : 13/02/1987
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-01-03 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE -Refus de concours de la force publique pour l'exécution d'une décision judiciaire d'expulsion - Préjudice - Indemnité d'occupation - Expertise.


Publications
Proposition de citation : CE, 13 fév. 1987, n° 51128
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Bouchet
Rapporteur public ?: Fornacciari

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:51128.19870213
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