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24/07/1987 | FRANCE | N°58310

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 24 juillet 1987, 58310


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 avril 1984 et 9 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BRAINE Aisne , représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du Conseil municipal en date du 27 mars 1984, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 7 février 1984 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a déclaré non avenu son jugement du 22 décembre 1981 annulant un arrêté du sous-préfet de Soissons en date du 1er avril 1

981 inscrivant d'office au budget de la COMMUNE DE BRAINE pour 1981 une so...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 avril 1984 et 9 août 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BRAINE Aisne , représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du Conseil municipal en date du 27 mars 1984, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 7 février 1984 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a déclaré non avenu son jugement du 22 décembre 1981 annulant un arrêté du sous-préfet de Soissons en date du 1er avril 1981 inscrivant d'office au budget de la COMMUNE DE BRAINE pour 1981 une somme de 66 675 F correspondant aux frais de fonctionnement de l'école Sainte-Marie pour l'année scolaire 1980-1981, un arrêté du même sous-préfet en date du 22 avril 1981 majorant le produit fiscal attendu de 66 675 F et un arrêté du même sous-préfet en date du 5 mai 1981 mandatant d'office la somme de 44 450 F au profit de l'école Sainte-Marie,
2° rejette la tierce-opposition présentée devant le tribunal administratif d'Amiens par l'association de gestion de l'Institution Sainte-Marie à Braine à l'encontre du jugement du 22 décembre 1981,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 mars 1882 ;
Vu la loi du 30 octobre 1886 ;
Vu le décret du 7 avril 1887 ;
Vu la loi du 31 décembre 1959 modifiée par les lois des 1er juin 1971 et 25 novembre 1977 ;
Vu le décret n° 60-389 du 22 avril 1960 modifié par le décret du 8 mars 1978 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Aubin, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de la COMMUNE DE BRAINE,
- les conclusions de M. Roux, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que celui-ci comporte les visas exigés par l'article R. 172 du code des tribunaux administratifs ;
En ce qui concerne la recevabilité de la tierce-opposition :
Considérant que, par un jugement en date du 22 décembre 1981, le tribunal administratif d'Amiens a, sur la requête de la commune de Braine, annulé un arrêté du sous-préfet de Soissons en date du 1er avril 1981 inscrivant d'office à son budget pour 1981 la somme de 66 675 F représentant la contribution de la commune aux frais de fonctionnement des classes maternelles de l'école Sainte-Marie pour l'année scolaire 1980-1981, un arrêté du même sous-préfet en date du 22 avril 1981 majorant le produit fiscal attendu voté par le conseil municipal de Braine d'un montant de 66 675 F et un arrêté du même sous-préfet en date du 5 mai 1981 mandatant d'office au profit de l'école Sainte-Marie la somme de 44 450 F correspondant à ses dépenses de fonctionnement pour le premier et le deuxième trimestres de l'année scolaire 1980-1981 ; que ce jugeent préjudiciait aux droits de l'association de gestion de l'école, qui a statutairement pour objet d'en assurer le fonctionnement et l'entretien ; qu'il est constant qu'elle n'avait été ni présente ni appelée dans l'instance ayant abouti à ce jugement ; que, par suite, elle était recevable à former tierce-opposition ;
En ce qui concerne le bien-fondé de la tierce-opposition :
Sur le moyen tiré de ce que le tribunal administratif ne pouvait modifier l'interprétation des textes qu'il avait donnée dans son premier jugement :

Considérant que, statuant sur la tierce-opposition dont l'avait saisi l'association de gestion de l'école, le tribunal administratif était en droit de retenir une interprétation des textes applicables différente de celle qu'il avait adoptée dans son premier jugement ;
Sur le moyen tiré de ce que les dépenses de fonctionnement de l'école Sainte-Marie n'incomberaient pas à la commune :
En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement des classes maternelles et des classes élémentaires pour les élèves ne résidant pas dans la commune :
Considérant qu'aux termes du 3ème alinéa de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959 dans sa rédaction antérieure à l'intervention de la loi du 25 novembre 1977, "les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public" ; qu'en vertu de cette disposition et ainsi que le précisait d'ailleurs l'article 7 du décret n° 60-389 du 22 avril 1960, les dépenses de fonctionnement matériel des classes primaires sous contrat d'association étaient, comme dans l'enseignement public, à la charge des communes ; que si, depuis sa modification par la loi du 25 novembre 1977, l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959 dispose que "les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association sont prises en charge sous la forme d'une contribution forfaitaire versée par élève et par an et calculée selon les mêmes critères que pour les classes correspondantes de l'enseignement public, et n'indique donc pas par quelle collectivité cette contribution est versée, il résulte des travaux préparatoires de cette disposition que le législateur n'a pas entendu revenir sur la règle selon laquelle les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d'association sont prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l'enseignement public et par la même collectivité ;

Considérant qu'en vertu de l'article 11 de la loi du 30 octobre 1886, toute commune doit, sauf le cas où elle est autorisée à se réunir à une autre pour établir une école intercommunale, être pourvue d'une école primaire publique ; qu'il résulte toutefois des dispositions combinées des articles 14 et 15 de la même loi et de l'article 2 du décret du 7 avril 1887 que seul l'établissement des écoles primaires élémentaires publiques destinées à recevoir les élèves soumis à l'obligation scolaire en application de l'article 4 de la loi du 28 mars 1882 donne lieu à une dépense obligatoire pour la commune ; que les écoles maternelles ou les classes enfantines ne donnent lieu à une telle dépense que lorsqu'elles ont été régulièrement créées à la demande de la commune ; qu'il suit de là que, si les communes sont tenues, par application des dispositions susrappelées de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959, de prendre en charge les dépenses de fonctionnement des classes élémentaires des établissements d'enseignement sous contrat d'association, elles n'ont à supporter les dépenses de fonctionnement des classes enfantines ou maternelles de ces établissements que lorsqu'elles ont donné leur accord au contrat concernant ces classes ; que la commune de Braine n'a donné, ni lors de sa conclusion, ni ultérieurement son accord au contrat d'association signé par le préfet de l'Aisne et l'école Sainte-Marie en tant que ce contrat concerne les classes maternelles de cet établissement ; que, par suite, les dépenses de fonctionnement de ces classes ne peuvent légalement donner lieu à une inscription d'office au budget de la commune ;

Considérant qu'il résulte des dispositions susrappelées des articles 11, 14 et 15 de la loi du 30 octobre 1886 que chaque commune n'est tenue de supporter les dépenses de fonctionnement des écoles primaires élémentaires publiques établies sur son territoire que pour les élèves résidant dans la commune ; qu'il suit de là qu'une commune sur le territoire de laquelle se trouve un établissement d'enseignement privé sous contrat d'association comportant des classes élémentaires doit, par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959, prendre en charge les dépenses de fonctionnement de ces classes, mais seulement en ce qui concerne les élèves résidant dans la commune ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Braine est fondée à soutenir que les arrêtés attaqués du sous-préfet de Soissons sont entachés d'excès de pouvoir en tant qu'ils prononcent l'inscription d'office à son budget de dépenses correspondant à la prise en charge des frais de fonctionnement des classes maternelles de l'école Sainte-Marie et des frais de fonctionnement des classes élémentaires de cet établissement pour des élèves ne résidant pas dans la commune, l'augmentation à due concurrence du produit fiscal voté par le conseil municipal et le mandatement d'office de ces dépenses ;
En ce qui concerne les dépenses de fonctionnement des classes élémentaires pour les élèves résidant dans la commune :
Considérant que le caractère obligatoire pour la commune des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires privées sous contrat d'association pour les élèves résidant sur son territoire découle directement des dispositions législatives précitées ; que la commune ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce qu'elle n'était pas partie au contrat liant l'école à l'Etat pour soutenir que lesdites dépenses ne lui incombent pas ; que la circonstance qu'il existerait des places dans les établissements d'enseignement public ne suffit pas à établir que l'école Sainte-Marie ne répondait pas à un besoin scolaire au sens de la loi du 31 décembre 1959 et ne pouvait légalement bénéficier d'un contrat d'association ; que la commune n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que les dépenses de fonctionnement des classes élémentaires de l'école Sainte-Marie pour les élèves résidant sur son territoire ne lui incombent pas ;
Sur le moyen tiré de ce que les dépenses de fonctionnement de l'école Sainte-Marie ont été inexactement calculées :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 22 avril 1960 modifié par le décret du 8 mars 1978 "en ce qui concerne les classes des écoles, la commune est tenue d'assumer les dépenses de fonctionnement matériel des classes sous contrat, sous réserve des charges afférentes aux personnels enseignants rémunérés directement par l'Etat. Les dépenses de fonctionnement sont calculées par élève et égales au coût moyen des dépenses d'entretien d'un élève externe de l'enseignement public dans les classes correspondantes ayant un effectif comparable" ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que pour fixer le montant des dépenses de fonctionnement de l'école Sainte-Marie incombant à la commune, le sous-préfet de Soissons ne se soit pas fondé sur le coût moyen d'entretien d'un élève d'une classe élémentaire publique de la commune ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le montant de ces dépenses aurait été inexactement calculé doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Braine n'est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué déclarant non avenu le jugement du 22 décembre 1981 qu'en ce qu'il annulait les arrêtés du sous-préfet de Soissons en date des 1er avril, 22 avril et 5 mai 1981 en tant que ces arrêtés concernent des dépenses correspondant à la prise en charge des frais de fonctionnement des classes maternelles de l'école Sainte-Marie et des classes élémentaires pour des élèves ne résidant pas dans la commune ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 7 janvier 1984 est annulé en tant qu'il a déclaré non avenu le jugement rendu le 22 décembre 1981 par ce tribunal, en ce qu'il annulait l'arrêté du 1er avril 1981 du sous-préfet de Soissons en tant que cet arrêté inscrit d'office au budget de la commune de Braine pour 1981 des dépenses correspondant aux frais de fonctionnement des classes maternelles de l'école Sainte-Marie, et des classes élémentaires de cet établissement pour des élèves ne résidant pas dans la commune, l'arrêté du 22 avril 1981 en tant que cet arrêté majore à concurrence du montant de ces dépenses le produitfiscal voté par le conseil municipal et l'arrêté du 5 mai 1981 en tant que cet arrêté mandate d'office ces dépenses au profit de l'école. Les arrêtés du sous-préfet de Soissons en date des 1er et 22avril et 5 mai 1981 sont annulés en tant qu'ils prononcent l'inscription d'office au budget de la commune de Braine pour 1981 dedépenses correspondant aux frais de fonctionnement des classes maternelles de l'école Sainte-Marie et aux frais de fonctionnement des classes élémentaires de cet établissement pour des élèves ne résidant pas dans la commune, la majoration à concurrence du montant de ces dépenses du produit fiscal voté par le conseil municipal et le mandatement d'office de ces dépenses au profit de l'école sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la tierce-opposition présentée devant le tribunal administratif d'Amiens par l'associationde l'Institution Sainte-Marie et le surplus des conclusions de la requête de la commune de Braine sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Braine, à l'association de l'Institution Sainte-Marie, au ministre del'intérieur et au ministre de l'éducation nationale.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 58310
Date de la décision : 24/07/1987
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - FINANCES COMMUNALES - BIENS DES COMMUNES - CONTRATS ET MARCHES - FINANCES COMMUNALES - DEPENSES - Dépenses obligatoires - Absence - Dépenses de fonctionnement des classes maternelles et des classes élémentaires - pour des élèves ne résidant pas dans la commune - des écoles privées - Inscription d'office au budget par le sous-préfet - Illégalité.

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT PRIVE - RAPPORTS ENTRE L'ETAT ET LES ETABLISSEMENTS PRIVES - Contribution des communes aux dépenses de fonctionnement des établissements privés sous contrat d'association - [1] Classes maternelles et infantines - Conditions de prise en charge - Accord de la commune - [2] Classes élémentaires - Dépenses de fonctionnement - Mode d'évaluation - Légalité.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE POUR FAUTE - FAUTE LOURDE - Existence - Exercice du contrôle budgétaire sur les communes [article 11 de la loi du 2 mars 1982] - Refus du commissaire de la République d'inscrire une dépense obligatoire.


Références :

. Décret 60-389 du 22 avril 1960 art. 7
. Décret 78-247 du 08 mars 1978
. Loi du 30 octobre 1886 art. 11, art. 14 et art. 15
. Loi 59-1557 du 31 décembre 1957 art. 4 al. 3
. Loi 77-1285 du 25 novembre 1977
. Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 11
Arrêté préfectoral du 01 avril 1981 1981-04-22 1981-05-05 Soissons décision attaquée annulation
Code des tribunaux administratifs R172
Décret du 07 avril 1887 art. 2
Loi du 28 mars 1882 art. 4


Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 1987, n° 58310
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Aubin
Rapporteur public ?: Roux

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:58310.19870724
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