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07/10/1987 | FRANCE | N°79964

France | France, Conseil d'État, 7 / 8 ssr, 07 octobre 1987, 79964


Vu le recours du ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget, enregistrée le 3 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule l'article 1er du jugement du 6 février 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a prononcé la décharge de la pénalité fiscale établie au nom de la société à responsabilité limitée ABATECO au titre de l'année 1979, sous l'article 655 du rôle individuel de la commune de Maxéville, mis en recouvrement le 31 déc

embre 1980, dont le paiement a été demandé à M. Jean-Pierre X... ;
°2 déci...

Vu le recours du ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget, enregistrée le 3 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule l'article 1er du jugement du 6 février 1986 par lequel le tribunal administratif de Nancy a prononcé la décharge de la pénalité fiscale établie au nom de la société à responsabilité limitée ABATECO au titre de l'année 1979, sous l'article 655 du rôle individuel de la commune de Maxéville, mis en recouvrement le 31 décembre 1980, dont le paiement a été demandé à M. Jean-Pierre X... ;
°2 décide que M. Jean-Pierre X... sera tenu au paiement solidaire de la pénalité fiscale de 1 543 083 F mise à la charge de la société ABATECO au titre de l'année 1979,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu la loi °n 80-30 du 18 janvier 1980 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Querenet Y... de Breville, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Martin-Laprade, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la loi °n 80-30 du 18 janvier 1980 portant loi de finances pour 1980, ultérieurement codifié à l'article 1763 A du code général des impôts : "Les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240 du code général des impôts, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une pénalité fiscale calculée en appliquant au montant des sommes versées ou distribuées le double du taux maximum de l'impôt sur le revenu... Les dirigeants sociaux mentionnés à l'article 80 ter b-1-2-3 et à l'article 62, ainsi que les dirigeants de fait, sont solidairement responsables du paiement de cette pénalité, qui est établie et recouvrée comme en matière d'impôt sur le revenu" ;
Considérant que, lorsque, par application des dispositions combinées des articles 109 et 110 du code général des impôts, une société est légalement présumée avoir procédé à la distribution occulte de bénéfices, le fait générateur de la pénalité fiscale instituée par les dispositions législatives précitées est l'expiration du délai imparti à la société distributrice, en vertu de l'article 117 du code, pour indiquer les bénéficiaires de la distribution ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le syndic de la société à responsabilité limitée ABATECO, déclarée en liquidation de biens le 25 mars 1980, n'a pas déféré à l'invitation qui lui a été adressée, à la suite de la vérification de comptabilité dont cette société fait l'objet entre le 14 et le 29 mai 1980, de révéler l'identité des bénéficiaires des distributions occultes correspondant aux rehaussements des résultats déclarés par cette société au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1979 ; qu'à la date où expirait le délai pour répondre, les dispositions précitées de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980 étaient en vigueur ; que, par suite, l'administration était en droit d'assujettir la société, en raison du défaut de désignation des bénéficiaires, à la pénalité fiscale instituée par ledit article 72 ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy s'est fondé sur ce que la loi du 18 janvier 1980 n'était pas entrée en vigueur au moment de la clôture de l'exercice 1979 pour prononcer, sur demande de M. Jean-Pierre X..., lequel était recherché en paiement en qualité de dirigeant de fait de la société ABATECO, la décharge de cette pénalité ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué en première instance par M. X... ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, compte tenu des graves irrégularités qui entachaient la comptabilité de la société ABATECO, les résultats déclarés par celle-ci au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1979 ont été régulièrement rectifiés d'office ; que, par suite, pour obtenir, par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction de la pénalité contestée il appartient à la société ABATECO et à M. X... dès lors que celui-ci est recherché en paiement en sa qualité, non contestée, de dirigeant de fait, d'apporter la preuve de l'exagération du bénéfice retenu par l'administration, sur la base duquel la pénalité fiscale en litige a été calculée ;
Considérant que, devant le tribunal administratif, M. X... s'est borné à faire état de ce que la différence entre le chiffre d'affaires réalisé par la société au cours de l'exercice et le montant des achats qu'elle a effectués pendant la même période n'aurait pas excédé 700 000 F ; que cette circonstance, à la supposer établie, ne suffit pas, en l'absence de tout autre élément, à établir l'exagération du bénéfice imposable retenu et des distributions occultes qui sont présumées en découler par application des dispositions des articles 109 et 110 du code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er de son jugement du 6 février 1986, le tribunal administratif de Nancy a prononcé la décharge de la pénalité fiscale de 1 543 080 F dont le paiement est demandé à M. X... ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nancy du 6 février 1986 est annulé.
Article 2 : La société ABATECO est rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu à raison de la pénalité fiscale de 1 543 080 F à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1979 et dont le paiement solidaire a été réclamé à M. Jean-Pierre X....
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société ABATECO, à M. Jean-Pierre X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 79964
Date de la décision : 07/10/1987
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-06-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - COTISATIONS D'I.R.P.P. MISES A LA CHARGE DE PERSONNES MORALES OU DE TIERS - IMPOSITION DES BENEFICES OCCULTES DES SOCIETES -Pénalité fiscale de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980 - Responsabilité solidaire d'un dirigeant de fait pour le paiement de cette pénalité.

19-04-01-02-06-02 Le syndic de la SARL A., déclarée en liquidation de biens le 25 mars 1980, n'a pas déféré à l'invitation qui lui a été adressée, à la suite de la vérification de comptabilité dont cette société a fait l'objet entre les 14 et 29 mai 1980, de révéler l'identité des bénéficiaires des distributions occultes correspondant aux remboursements des résultats déclarés par cette société au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1979. Les dispositions de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980, soumettant à une pénalité fiscale les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240 du CGI, elles ne révèlent pas l'identité, et aux termes de laquelle "les dirigeants sociaux mentionnés à l'article 80 ter b-1-2-3 et à l'article 62 ainsi que les dirigeants de fait, sont solidairement responsables du paiement de cette pénalité, qui est établie et recouvrée comme en matière d'impôt sur le revenu", étaient en vigueur à la date où expirait le délai pour répondre, fait générateur de ladite pénalité [1]. Ainsi l'administration était en droit d'assujettir la société en raison du défaut de désignation des bénéficiaires à la pénalité fiscale instituée par cet article, et de rechercher le requérant en paiement en qualité de dirigeant de fait de la société A..


Références :

CGI 109, 110, 117, 1763 A
Loi 80-30 du 18 janvier 1980 art. 72

1.

Cf. Plénière, 30 mars 1987, Ministre du budget c/ Société la Rabelaisienne, n° 74410.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 1987, n° 79964
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ducamin
Rapporteur ?: M. Querenet
Rapporteur public ?: M. Martin-Laprade

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:79964.19871007
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