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15/04/1988 | FRANCE | N°66276

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 15 avril 1988, 66276


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 février 1985 et 20 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jean X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 20 décembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de majoration exceptionnelle auxquelles M. X... a été assujetti dans les rôles de la commune de Bastia respectivement au titre des années 1970 à 197

4 et au titre de l'année 1973 ;
- leur accorde la décharge des imposi...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 février 1985 et 20 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jean X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 20 décembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de majoration exceptionnelle auxquelles M. X... a été assujetti dans les rôles de la commune de Bastia respectivement au titre des années 1970 à 1974 et au titre de l'année 1973 ;
- leur accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 21 décembre 1967 ensemble l'arrêté du 21 prairial an IX ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Renauld, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat des époux X...,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :
Sur le moyen tiré de ce que la décision du directeur des services fiscaux de la Haute-Corse serait entachée d'une erreur matérielle :

Considérant que les erreurs qui peuvent affecter la décision par laquelle le directeur des services fiscaux rejette la réclamation du contribuable sont sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de l'imposition contestée ; que, par suite, le moyen que les requérants tirent de l'erreur matérielle qui entacherait la décision prise par le directeur des services fiscaux de la Haute-Corse sur leur réclamation est inopérant ;
Sur le moyen tiré de l'inapplicabilité de l'article 150 ter du code général des impôts dans le département de la Haute-Corse :
Considérant qu'aux termes de l'article 150 ter du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions contestées : "I.1 Les plus-values réalisées par les personnes physiques à l'occasion de la cession à titre onéreux ... de terrains non bâtis situés en France ... sont soumises à l'impôt sur le revenu dans les conditions fixées par le présent article ..." ; que, selon les dispositions du II-1 du même article, la plus-value imposable est constituée par la différence entre, d'une part, le prix de cession du bien et, d'autre part, pour les immeubles entrés dans le patrimoine du contribuable par voie de succession, "la valeur vénale au jour de la mutation à titre gratuit" ; qu'aux termes du même II dudit article : "2. Lorsque les biens ont été acquis ... à titre gratuit par le contribuable antérieurement au 1er janvier 1950, celui-ci peut substituer au second terme de la différence tel qu'il est défini au 1 un somme forfaitaire égale à 30 % du prix de cession ..." ;
Considérant qu'il est constant que M. X... a cédé, le 1er septembre 1974, au prix de 2 millions de Francs, deux terrains sis dans la commune de Furiani (Haute-Corse) qui étaient entrés le 3 août 1937, par voie de succession, dans le patrimoine de Mme X..., son épouse ; que, pour assujettir M. X... à l'impôt sur le revenu, l'administration a fixé la valeur d'origine à 30 % du prix de cession ;

Considérant que si, en vertu de l'article 20 de la loi °n 67-1114 du 21 décembre 1967, le régime fiscal spécifique à la Corse résulte, notamment, de l'arrêté du 21 prairial an IX dit "arrêté MIOT", il ressort des termes de cet arrêté que celui-ci concerne l'évaluation de la valeur vénale des immeubles situés en Corse pour l'assiette des droits de mutation par décès ; qu'il ne peut, par suite, en tout état de cause, faire obstacle à l'application dans le département de la Haute-Corse des dispositions précitées du code général des impôts, prises en matière d'impôt sur le revenu ; que, dès lors, la circonstance, dont se prévalent les requérants, que la méthode prévue par l'arrêté du 21 prairial an IX pour l'évaluation des immeubles acquis par voie de succession serait devenue inapplicable à la suite de la suppression de la contribution foncière à compter du 1er janvier 1949 est sans influence sur le principe et la régularité de l'imposition contestée ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant que M. X..., qui n'avait pas déclaré, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, la plus-value réalisée, pouvait faire l'objet, de ce chef, d'une imposition d'office ; que, dès lors, le moyen tiré par le requérant de ce que le service se serait abstenu à tort de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est inopérant ; qu'en outre, il appartient au contribuable d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve de l'exagération de l'évaluation des bases retenues ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du II-2 de l'article 150 ter du code général des impôts que le mode de calcul forfaitaire de la plus-value, utilisé en l'espèce par l'administration, constitue une simple faculté offerte au contribuable et qu'aucune disposition ne fait obstacle à ce que celui-ci apporte la preuve que la valeur d'acquisition est supérieure ;
Considérant, en premier lieu, que, si les époux X... soutiennent à cet effet que la valeur de la propriété recueillie par voie de succession et qui, après application des coefficients légaux, doit servir de base à la détermination de la plus-value s'élevait, à la date d'ouverture de la succession, le 3 août 1937, à la somme de 1 228 920 anciens francs, ils n'apportent à l'appui de cette allégation aucune justification ;
Considérant, en second lieu, que, si les requérants se réfèrent également aux conclusions des experts commis par le tribunal administratif, lesquels ont proposé de retenir une valeur des biens dont s'agit égale à 965 000 anciens francs en 1937, correspondant à la moyenne arithmétique des résultats obtenus par application de deux méthodes différentes, il ressort de l'examen du rapport de ces experts que la première de ces méthodes, dite "par capitalisation du revenu", a pour base de calcul un document unique, établi pour justifier une demande d'indemnité pour pertes de récoltes, et qui, en raison notamment de son objet et des incertitudes relatives à sa date, n'a aucune valeur probante et que la seconde méthode d'évaluation, dite par comparaison avec le montant de ventes effectivement constatées, a conduit les experts, au motif que les prix déclarés antérieurement à 1939 ne reflétaient que très rarement le montant réel des ventes, à écarter celles qui étaient contemporaines de l'époque à laquelle les biens litigieux sont entrés dans le patrimoine de Mme X... ; que les experts ont ainsi retenu exclusivement comme termes de comparaison des cessions immobilières faites par les époux X... eux-mêmes au cours des années 1970 à 1972 ; que, toutefois, la valeur vénale de ces biens, actualisée au 3 août 1937, résulte de l'application faite par les experts de coefficients de variation "du pouvoir d'achat du franc" qui ne reflètent pas le taux de progression des prix des terrains à bâtir sis à Furiani, entre 1937 et la période comprise entre 1970 et 1972 ; que, compte tenu des incertitudes qui les affectent, ni l'une ni l'autre des méthodes retenues par les experts ne permettent de démontrer avec une précision acceptable que l'administration a pris pour le second terme de la différence mentionnée au II.1 de l'article 150 ter une valeur insuffisante ;

Considérant, enfin, que, si les requérants font valoir que le terrain cédé était bâti en 1937, ils n'apportent pas, par cette seule assertion, la preuve que la valeur de l'ensemble immobilier était supérieure à celle qui a été retenue par l'administration ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, les époux X... ayant succombé à l'instance, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nice, a mis à leur charge les frais d'expertise ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 66276
Date de la décision : 15/04/1988
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 150 ter II-1, 150 ter II-2
Loi 67-1114 du 21 décembre 1967 art. 20 Finances pour 1968


Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 1988, n° 66276
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Renauld
Rapporteur public ?: Le Roy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:66276.19880415
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