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30/11/1988 | FRANCE | N°62758

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 30 novembre 1988, 62758


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 20 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 19 juin 1984 en tant que, par ce jugement, le tribunal a accordé à Mme Yvette X... une réduction de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1978 dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
2°) remette intégralement l'imposition cont

estée à la charge de Mme X... ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 20 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 19 juin 1984 en tant que, par ce jugement, le tribunal a accordé à Mme Yvette X... une réduction de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1978 dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
2°) remette intégralement l'imposition contestée à la charge de Mme X... ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Honorat, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Liébert-Champagne, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X... a revendu le 31 octobre 1978, pour un prix de 140 000 F, un appartement sis à Paris (12ème arrondissement), qu'elle avait acquis le 1er septembre 1975 pour 73 000 F ; que le profit réalisé à cette occasion a été regardé par l'administration fiscale comme imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en vertu des dispositions, alors en vigueur, de l'article 35 A du code général des impôts ;
Considérant qu'aux termes de cet article, dans sa rédaction applicable à l'année 1978 : "I. Sans préjudice des dispositions des articles 34 et 35 et de celles de l'article 8, les profits réalisés par les personnes qui cèdent des immeubles ou fractions d'immeubles bâtis ainsi que des immeubles non bâtis, lorsqu'ils relèvent de l'article 697, qu'elles ont acquis ou fait construire depuis plus de deux ans mais depuis moins de dix ans, sont soumis à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux, à moins que ces personnes justifient que l'achat ou la construction n'a pas été fait dans une intention spéculative. - Cette dernière condition est notamment réputée remplie lorsque : - l'immeuble a été, depuis son acquisition ou son achèvement, occupé personnellement par l'acquéreur ou le constructeur ou par son conjoint, ses ascendants ou descendants, et que sa cession est motivée par une meilleure utilisation familiale ou un changement de résidence du redevable ..." ;
Considérant qu'il est constant que l'appartement vendu par Mme X... n'avait pas été, depuis son acquisition, occupé personnellement par elle ou par ses ascendants ou descendants ; que, dans ces conditions et dès lors qu'elle n'invoque aucune des autres présomptions d'absence d'intention spéculative établies par l'article 35-A, elle ne peut utilement contester l'imposition à laquelle elle a été assujettie qu'en justifiant que l'achat de son appatement n'a pas été fait dans une intention spéculative ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lorsque Mme X... a procédé à cet achat, elle avait déjà fixé son domicile à Lucy-le-Bocage (Aisne) et qu'elle a donné en location l'appartement dès son acquisition ; que le fait que celui-ci a été mis en vente alors qu'elle en était encore locataire, avant qu'elle ne fixe sa résidence de manière permanente à Lucy-le-Bocage pour vivre auprès de sa mère dont l'état de santé s'était aggravé, et qu'elle n'a pas ensuite voulu remettre en cause l'achat projeté, n'établit pas que cet achat a été dépourvu d'intention spéculative ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est, par suite, fondé à soutenir que le tribunal administratif, pour accorder à Mme X... une réduction de l'imposition contestée en raison de l'absence d'intention spéculative lors de l'achat, a fait une inexacte appréciation des circonstances de fait ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que le fait, allégué par Mme X..., qu'elle a vendu son appartement pour affecter le produit de sa vente à la rénovation de sa résidence principale a trait aux causes de la revente et n'établit pas que l'acquisition de l'immeuble cédé était dépourvue d'intention spéculative ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a fait application des dispositions précitées de l'article 35 A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 150 C du code général des impôts, dont se prévaut Mme X... : "Toute plus-value réalisée lors de la cession d'une résidence principale est exonérée. Il en est de même pour la première cession d'une résidence secondaire lorsque le cédant ou son conjoint n'est pas propriétaire de sa résidence principale, directement ou par personne interposée ... Sont considérés comme résidences secondaires les autres immeubles ou parties d'immeubles dont le propriétaire a la libre disposition pendant au moins cinq ans. Aucune condition de durée n'est requise lorsque la cession est motivée par un changement de lieu d'activité, par un changement de résidence consécutif à une mise à la retraite ou par des impératifs d'ordre familial" ;
Considérant qu'il est constant que, lors de la cession de son apartement de Paris, Mme X... avait sa résidence principale dans une maison située à Lucy-le-Bocage, dont elle était propriétaire depuis 1965 ; que, dès lors, et à supposer même, ce qui n'est pas établi, que l'appartement cédé puisse être regardé comme ayant constitué la résidence secondaire de l'intéressée, au sens des dispositions précitées de l'article 150 C du code général des impôts, Mme X... n'est pas fondée à demander le bénéfice de l'exonération prévue par ledit article ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à demander que Mme X... soit rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient été assignés ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 19 juin 1984 est annulé.
Article 2 : Le supplément d'impôt sur le revenu auquel Mme X... a été assujetti au titre de l'année 1978 est remis intégralement à la charge de l'intéressée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 62758
Date de la décision : 30/11/1988
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 35 A, 150 C


Publications
Proposition de citation : CE, 30 nov. 1988, n° 62758
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Honorat
Rapporteur public ?: Mme Liébert-Champagne

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:62758.19881130
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