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16/12/1988 | FRANCE | N°61588

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 16 décembre 1988, 61588


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 9 août 1984 et le 7 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE RENNES représentée par son maire en exercice domicilié en son Hôtel de Ville, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 21 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée : 1/ à verser à la la somme de 13 114,60 F en réparation des dommages causés à cette dernière par la crue de l'Ille survenue les 12 et 13 mai 1981, ladite somme portant in

térêts au taux légal à compter du 16 juin 1982, les intérêts échus le 3 ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 9 août 1984 et le 7 décembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE RENNES représentée par son maire en exercice domicilié en son Hôtel de Ville, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement en date du 21 juin 1984 par lequel le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée : 1/ à verser à la la somme de 13 114,60 F en réparation des dommages causés à cette dernière par la crue de l'Ille survenue les 12 et 13 mai 1981, ladite somme portant intérêts au taux légal à compter du 16 juin 1982, les intérêts échus le 3 février 1984 étant eux-mêmes capitalisés pour produire intérêts ; 2/ à supporter les frais d'expertise de 350 F ;
2°) la décharge de toute condamnation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Falque-Pierrotin, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges avocat de la VILLE DE RENNES, de la S.C.P. Le Prado, avocat du département d'Ille-et-Vilaine et de Me Odent, avocat de la société à responsabilité limitée Gomaloc,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Sur la requête de la VILLE DE RENNES et l'appel incident de la société à responsabilité limitée Gomaloc :

Considérant qu'il résulte de l'instruction notamment du rapport des experts commis par les premiers juges, qu'alors que la cote d'alerte constatée le 12 mai 1981 à 19 heures 38 laissait présager l'imminence du débordement de l'Ille qui s'est produit le matin du 13 mai à 4 heures, les services de la VILLE DE RENNES chargés de la lutte contre les inondations n'ont pas déclenché l'état d'alerte, ni averti les riverains des maisons exposées à l'inondation ; que cette carence a constitué une faute lourde et engagé la responsabilité de la VILLE DE RENNES à l'égard de la société à responsabilité limitée Gomaloc pour les dommages causés aux biens transportables qui auraient pu être mis à l'abri ;
Considérant que si la crue de l'Ille a été la conséquence de précitations importantes conjuguées à une saturation des sols et au faible ensoleillement de la saison, ces circonstances n'ont pas revêtu le caractère d'un évènement de force majeure de nature à décharger la VILLE DE RENNES de sa responsabilité ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le débordement de l'Ille aurait été aggravé par l'ouverture incomplète des vannes du moulin de Trublet sur le canal d'Ille et Rance, ni par la fermeture accidentelle des portes de l'écluse Saint-Martin ; qu'ainsi la VILLE DE RENNES n'est pas fondée à soutenir que les dommages seraient en partie imputables au fonctionnement d'un ouvrage concédé au département d'Ille-et-Vilaine ;
Considérant que la VILLE DE RENNES ne saurait s'exonérer de la responsabilité qu'elle a encouue dans l'exercice de la mission de prévention des inondations qui lui incombe en vertu du code des communes en invoquant les fautes qu'aurait commises le service d'annonces des crues mis en place par l'Etat en tardant à informer les services municipaux de la montée des eaux ;

Considérant en revanche qu'il résulte de l'instruction que les bâtiments de la société à responsabilité limitée Gomaloc sont situés dans une zone classée "inondable" au plan d'occupation des sols de la VILLE DE RENNES rendu public en 1979 ; que la victime a commis une faute en entreposant des matériels dans un lieu exposé aux inondations ; que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Rennes a laissé à la charge de la société à responsabilité limitée Gomaloc les deux-tiers des conséquences dommageables de l'inondation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la préjudice subi par la société à responsabilité limitée Gomaloc, du fait des inondations, se limite à la perte de deux toiles de tente, devenues inutilisables, d'une valeur de 36 416 F, la perte du bénéfice escompté de la location de celles-ci ne constituant qu'un préjudice éventuel et les 3 appareils de chauffage endommagés n'étant pas des biens transportables ; que, par suite, compte tenu du partage de responsabilité, il y a lieu de ramener de 13 114,60 F à 12 138,66 F le montant de l'indemnité que la VILLE DE RENNES doit verser à la société à responsabilité limitée Gomaloc ; que le jugement attaqué doit être réformé sur ce point ; qu'en revanche, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Rennes a mis les frais d'expertise à la charge de la VILLE DE RENNES ;
Sur les conclusions de la société à responsabilité limitée Gomaloc contre le département d'Ille-et-Vilaine :
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'imputabilité partielle des dommages à un ouvrage relevant du département d'Ille-et-Vilaine n'est pas établie ; qu'ainsi, l'appel provoqué dirigé contre le département d'Ille-et-Vilaine doit être rejeté ;
Sur les conclusions de la société à responsabilité limitée Gomaloc contre l'Etat :

Considérant qu'il appartenait uniquement au service d'annonces des crues mis en place par l'Etat de communiquer aux communes toutes informations sur la montée des eaux en vue de faciliter l'exercice par lesdites communes de leur mission de police ; que, par suite, la carence dont ce service aurait fait preuve dans l'accomplissement de ses obligations envers les communes ne peut engager la responsabilité de l'Etat envers les victimes ; que, dès lors, l'appel provoqué de la société à responsabilité limitée Gomaloc dirigé contre l'Etat doit être rejeté ;
Article 1er : La somme de 13 114,60 F que la VILLE DE RENNES a été condamnée à payer à la société à responsabilité limitée Gomaloc par le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 21 juin 1984 est ramenée à 12 138,66 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 21 juin 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions d'appel incident et provoqué de la société à responsabilité limitée Gomaloc sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée Gomaloc, à la VILLE DE RENNES, au département d'Ille-et-Vilaine et au ministre d'Etat, ministre de l'équipement et du logement.


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