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28/12/1988 | FRANCE | N°91380

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 28 décembre 1988, 91380


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-François X..., maître de conférences à l'université de Paris-Dauphine (Paris IX), demeurant ... et M. François Y..., maître de conférences à l'université des sciences sociales de Toulouse (Toulouse I), demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les articles 9 et 13 du décret n° 87-555 du 17 juillet 1987 relatif aux statuts du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences, en ce qu'ils modifient respectivement

l'alinéa 3 de l'article 42 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, et l...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-François X..., maître de conférences à l'université de Paris-Dauphine (Paris IX), demeurant ... et M. François Y..., maître de conférences à l'université des sciences sociales de Toulouse (Toulouse I), demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule les articles 9 et 13 du décret n° 87-555 du 17 juillet 1987 relatif aux statuts du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences, en ce qu'ils modifient respectivement l'alinéa 3 de l'article 42 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, et l'alinéa 4 de l'article 49 dudit décret ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la déclaration des droits de l'homme et des citoyens du 26 août 1789 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Chantepy, Auditeur,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, si le principe de l'égal accès des citoyens aux emplois publics proclamé par l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 impose que, dans les nominations de fonctionnaires, il ne soit tenu compte que de la capacité, des vertus et des talents, il ne s'oppose pas à ce que les règles de recrutement destinées à permettre l'appréciation des aptitudes et des qualités des candidats à l'entrée dans un corps de fonctionnaires soient différenciées pour tenir compte tant de la variété des situations que de celle des besoins des services publics ;
Considérant qu'alors même qu'ils appartiennent au même corps de fonctionnaires et postulent à l'entrée dans le corps unique des professeurs d'université, les maîtres de conférences qui font acte de candidature pour des disciplines différentes ne se trouvent pas dans la même situation au regard du recrutement ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que les dispositions attaquées soient de nature à entraîner une discrimination entre les candidats au même concours ; qu'ainsi, l'institution de concours nationaux sur épreuves pour le recrutement des professeurs des disciplines juridiques, politiques, économiques et de gestion n'entraîne, entre les candidats à l'accès au corps des professeurs d'université, et alors même que les candidats à ces concours ne peuvent choisir au moment de leur candidature l'établissement où ils souhaitent enseigner, aucune discrimination illégale et ne porte, dès lors, aucune atteinte au principe de l'égal accès des citoyens aux fonctions publiques ; que la circonstance que les modalités de recrutement des maîtres de conférence seraient identiques pour toutes les disciplines est sans influence sur la légalité des dispositions attaquées, qui régissent le recrutement des professeurs d'université ; que le moyen tiré de ce que la rupture d'égalité alléguée proviendrait du déroulement des épreuves des concours à Paris manque en fait, dès lors qu'aucune disposition du décret attaqué ne prévoit une telle mesure ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article 49 du décret du 6 juin 1984 modifié par le décret attaqué que les épreuves des concours nationaux dont s'agit comportent obligatoirement une discussion des travaux du candidat et au moins deux leçons ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions attaquées ne permettraient pas de mesurer les acquis scientifiques et pédagogiques des candidats ;
Considérant que, quelles que soient les dérogations au statut général des fonctionnaires de l'Etat que comporte leur statut particulier afin de le rendre compatible avec les dispositions législatives qui régissent l'enseignement supérieur, les professeurs d'université appartiennent à un corps de fonctionnaires nommés par décret du Président de la République et dont l'affectation est déterminée par le ministre de l'éducation nationale ; que ni les dispositions de la loi du 26 janvier 1984 relatives à l'indépendance des enseignants-chercheurs dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, ni le principe de l'indépendance des professeurs reconnu par les lois de la République ne s'opposent à ce que les jurys des concours nationaux prévus par les dispositions critiquées soient nommés par le ministre de l'éducation nationale, alors surtout que les dispositions réglementaires en cause ne permettent au ministre de choisir discrétionnairement que le président du jury, les six autres membres étant désignés sur proposition du président du jury ; que lesdites dispositions permettent qu'à l'occasion de la nomination de chaque jury et sous le contrôle du juge soit respecté le principe posé à l'article 3 de la loi susvisée, aux termes duquel "le service public de l'enseignement supérieur est laïc et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique" ;

Considérant que, de ce qui précède, il résulte que les candidats aux concours de recrutement des professeurs d'université n'ont aucun droit au libre choix de leur affectation ; que les concours nationaux sur épreuves prévus aux articles 42 et 49 du décret du 6 juin 1984 modifiés par les articles 9 et 13 du décret attaqué n'ont pas pour objet de pourvoir des emplois déterminés dans des établissements nommément désignés, mais de recruter de nouveaux agents dans le corps des professeurs d'université sans pour autant préjuger de l'affectation des intéressés ; que les dispositions critiquées ne portent donc pas atteinte, par elles-mêmes, au principe d'autonomie des établissements d'enseignement supérieur ;
Considérant, enfin, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 56 de la loi du 26 janvier 1984 : "sauf dispositions contraires des statuts particuliers, la qualification des enseignants-chercheurs est reconnue par une instance nationale" ; qu'aux termes du deuxième alinéa du même article : "l'examen des questions individuelles relatives au recrutement, à l'affectation et à la carrière de ces personnels relève, dans chacun des organes compétents, des seuls représentants des enseignants-chercheurs et personnels assimilés ..." ; que les jurys prévus à l'article 49 du décret du 6 juin 1984 modifié par l'article 13 du décret attaqué, en ce qui concerne les concours nationaux sur épreuves organisés pour le recrutement des professeurs des disciplines juridiques, politiques, économiques et de gestion, ne constituent pas des "organes compétents" au sens des dispositions précitées du 2ème alinéa de l'article 56 de la loi, mais des instances nationales, dont la mission est d'examiner la qualification des candidats aux concours de recrutement ; que les dispositions précitées du 2ème alinéa de l'article 56 ne leur sont donc pas applicables ; que le 3ème alinéa du même article n'a pas pour objet de rendre obligatoire, pour tout recrutement, une appréciation portant sur l'activité antérieure du candidat, mais seulement d'exiger, lorsqu'une telle appréciation doit être portée, qu'elle prenne en compte l'ensemble des fonctions exercées ; que les dispositions de ce 3ème alinéa ne sauraient, dès lors, faire obstacle à la légalité des dispositions critiquées ;

Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que MM. X... et Y... ne sont pas fondés à demander l'annulation des articles 9, en tant qu'il modifie le 3ème alinéa de l'article 42 du décret du 6 juin 1984 susvisé, et 13 du décret du 17 juillet 1987, en tant qu'il modifie le 4ème alinéa de l'article 49 du décret du 6 juin 1984 ;
Article 1er : La requête de MM. X... et Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. X... et Y..., au Premier ministre et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 91380
Date de la décision : 28/12/1988
Type d'affaire : Administrative

Analyses

30-02-05-01-06-01-045 ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET GRANDES ECOLES - UNIVERSITES - GESTION DES UNIVERSITES - GESTION DU PERSONNEL - STATUT ET PREROGATIVES DES ENSEIGNANTS -Statuts du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences (décret n° 87-555 du 17 juillet 1987 modifiant le décret n° 84-431 du 6 juin 1984) - Légalité.


Références :

. Décret 84-431 du 06 juin 1984 art. 42 al. 3, art. 49 al. 4
Déclaration du 26 août 1789 Droits de l'homme et du citoyen art. 6
Décret 87-555 du 17 juillet 1987 art. 9, art. 13 décision attaquée confirmation
Loi 84-52 du 26 janvier 1984 art. 3, art. 56 al. 1, al. 2, al. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 1988, n° 91380
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Chantepy
Rapporteur public ?: Mme Laroque

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:91380.19881228
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