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27/01/1989 | FRANCE | N°66233

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 27 janvier 1989, 66233


Vu la requête, enregistrée le 19 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jacques X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 27 décembre 1984 en tant que celui-ci a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu à concurrence de 6 521 F pour 1970, 6 766 F pour 1971, 4 313 F pour 1972, 3 931 F pour 1973 et 8 914 F pour 1974 ;
2°) lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces

du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code généra...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jacques X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 27 décembre 1984 en tant que celui-ci a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu à concurrence de 6 521 F pour 1970, 6 766 F pour 1971, 4 313 F pour 1972, 3 931 F pour 1973 et 8 914 F pour 1974 ;
2°) lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, devant le tribunal administratif, pour refuser de reconnaître un caractère déductible à la pension alimentaire versée par M. X... à sa belle-mère, l'administration avait expressément, dans ses mémoires en défense, fait valoir que cette pension ne remplissait pas les conditions visées aux articles 205 à 211 du code civil ; que, par suite, et en tout état de cause, M. X... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif, en fondant sa décision sur ce motif, aurait irrégulièrement retenu un moyen que n'avait pas énoncé l'administration ; que le tribunal, en outre, a pu, comme il l'a fait, estimer que l'expertise sollicitée n'était pas nécessaire à la solution du litige ;
Sur la déduction d'une pension alimentaire :
Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : "L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque contribuable. Ce revenu net est déterminé ... sous déduction : ... II. Des charges ci-après ... 2° ... pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du code civil ..." ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : "Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère et aux autres ascendants qui sont dans le besoin" ; qu'aux termes de l'article 208 du même code : "Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit" ; qu'il appartient au contribuable qui entend se prévaloir de ces dispositions de justifier de l'état de besoin de la personne à qui il verse une pension alimentaire ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X... a versé en 1974 et 1975 à la mère de son épouse une pension d'un montant annuel de 7 500 F ; que, pour justifier ces versements et en demander la déduction de son revenu imposable, M. X... se borne à indiquer qe sa belle-mère ne disposait que de la "retraite des vieux" sans apporter aucune justification à cet égard ; que, ce faisant, M. X... ne justifie pas de l'état de besoin dans lequel se serait trouvé sa belle-mère et, par suite, n'est pas fondé à demander, en application des dispositions précitées de l'article 156 du code général des impôts, la déduction des pensions versées ;
Sur les bénéfices industriels et commerciaux :
Considérant qu'en vertu des dispositions du I-3°) de l'article 35 du code général des impôts, dans la rédaction applicable à l'imposition contestée, les profits réalisés à l'occasion d'un lotissement présentent, sous certaines réserves, le caractère de bénéfices industriels et commerciaux pour l'application de l'impôt sur le revenu ; qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture", l'actif net s'entendant de "l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ;
Considérant que M. X..., après avoir obtenu l'autorisation de lotir par arrêté préfectoral du 21 août 1973, a vendu par acte notarié, le 22 janvier 1974, deux parcelles de terrain, sises à Lamorlaye, dans l'Oise, faisant partie d'un terrain qu'il avait acquis en 1968 ; que cet acte avait été précédé de deux promesses de vente, signées les 28 juillet et 3 octobre 1973, stipulant chacune le versement d'un acompte de 6 000 F ; que M. X... n'ayant pas déclaré les profits qu'il a réalisés à cette occasion, l'administration des impôts lui a assigné un supplément d'impôt sur le revenu, au titre de l'année 1974, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, qu'elle a justifié, devant le tribunal administratif, sur le fondement des dispositions précitées du I de l'article 35 ; qu'ayant contesté à la fois le principe même de l'imposition et son rattachement à l'année 1974, M. X... demande l'annulation du jugement susmentionné du tribunal administratif d'Amiens en tant que celui-ci, après avoir admis le principe de l'imposition, a décidé que pouvait seulement être rattaché à l'exercice 1973, dernier exercice couvert par la prescription, le montant des acomptes susmentionnés ; que le ministre chargé du budget, par la voie du recours incident, demande que l'intégralité de l'imposition assignée à M. X... au titre de l'année 1974 soit remise à la charge de ce dernier ;

Considérant que M. X... se borne à soutenir en appel que le bénéfice qu'il a réalisé doit être rattaché en totalité à l'année 1973 au cours de laquelle les promesses de vente ont été signées ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 38 du code général des impôts que, dans le cas où une entreprise a perçu une recette ou a acquis une créance qui est exigible à la clôture de l'exercice, en contrepartie de l'engagement pris par elle de céder des biens ou de fournir des services au cours d'exercices ultérieurs, la recette ou la créance dont s'agit constitue un élément d'actif né au cours de l'exercice et doit dès lors être rattachée dans son intégralité aux résultats de cet exercice ;
Considérant qu'il résulte clairement de l'examen des promesses de vente susmentionnées que celles-ci étaient unilatérales dans la mesure où elles n'impliquaient pas d'engagement définitif de l'acquéreur que M. X... ne pouvait obliger à acheter le terrain avant le 31 décembre 1973 ; que, par suite, le transfert de propriété des terrains, objet de la transaction, n'est intervenu de façon certaine que le 22 janvier 1974, date de la signature définitive de l'acte de vente ; que, de ce fait, les deux promesses de vente n'ont pu faire naître au profit de M. X... des créances exigibles devant être rattachées à l'exercice clos en 1973 ;
Considérant, d'autre part, que, si le versement d'acomptes, d'un montant total de 12 000 F, a été prévu par les deux promesses de vente, il ressort des mentions portées sur ces actes que ces acomptes, versés au notaire, ne pouvaient être remis à M. X... que le jour de la signature définitive de l'acte en même temps que le solde du prix fixé ou si, les conditions suspensives étant réalisées, l'acquéreur ne demandait pas la réalisation des promesses de vente ; que, dès lors, ces acomptes ne peuvent être regardés comme une créance exigible avant la date de signature de l'acte de vente, le 22 janvier 1974, et n'étaient, dès lors, pas rattachables à l'exercice clos en 1973 ; qu'il s'ensuit que l'ensemble du bénéfice était imposable au titre de l'année 1974, comme le soutient l'administration ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. X... doit être rejetée et que le ministre chargé du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a accordé à M. X... une réduction de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle M. X... a été assujetti, après application des dispositions de l'article 163 du code général des impôts relative à la répartition de certains revenus sur plusieurs années d'imposition, au titre des années 1970 à 1974 ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : M. X... est rétabli aux rôles de l'impôt sur le revenu à raison de l'intégralité des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 1970 à 1974.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 27 décembre 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 66233
Date de la décision : 27/01/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

. CGI 156, 35 par. I
Code civil 205 à 211, 208


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jan. 1989, n° 66233
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Turquet de Beauregard
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:66233.19890127
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