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15/02/1989 | FRANCE | N°56592

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 15 février 1989, 56592


Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION enregistré le 26 janvier 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 25 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé à la requête de M. Chedli Djebali l'arrêté en date du 24 mai 1983 lui enjoignant de sortir du territoire français ;
2°) rejette la demande présentée par M. Chedli Djebali devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tr

ibunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordon...

Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION enregistré le 26 janvier 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 25 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé à la requête de M. Chedli Djebali l'arrêté en date du 24 mai 1983 lui enjoignant de sortir du territoire français ;
2°) rejette la demande présentée par M. Chedli Djebali devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers modifiée par la loi du 29 octobre 1981 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Duléry, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 octobre 1981, relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France applicable à la date de la décision attaquée : "l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence de l'étranger sur le territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public" ; que l'article 24 de la même ordonnance précise que l'expulsion prévue à l'article 23 ne peut être prononcée sans que l'étranger concerné ait été préalablement mis à même de présenter des explications devant une commission spéciale ; que l'expulsion en application de l'article 23 précité est interdite par l'article 25 du même texte lorsqu'il s'agit d'un étranger qui réside habituellement en France depuis plus de quinze ans ou qui est père ou mère d'un ou plusieurs enfants français ; que toutefois ladite ordonnance dispose, dans son article 26 qu'"en cas d'urgence absolue et par dérogation aux articles 23 à 25, l'expulsion peut être prononcée lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou pour la sécurité publique ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Chedli Djebali a été interpellé le 7 novembre 1980 pour trafic de stupéfiants et condamné le 18 septembre 1981 à une peine de quatre ans d'emprisonnement et à diverses peines accessoires par le tribunal correctionnel de Nanterre, jugement confirmé par la cour d'appel de Versailles le 12 novembre 1981 ; que par arrêté en date du 24 mai 1983, le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION lui a enjoint de sortir du territoire français, alors que M. Djebali se trouvait détenu à la maison d'arrêt de Bois d'Arcy ; qu'eu égard à la gravité des faits reprochés à M. Djebali, dont l'enquête a révélé qu'il se livrait depuis plusieurs années au trafic d'héroïne, le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION a pu légalement estimer que son expulsion constituait une nécessité impérieuse pour l'ordre public ; que, compte tenu de la durée de la peine déjà purgée, elle présentait également, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, un caractère d'urgence absolue à la date de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence d'urgence absolue pour annuler la décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Djebali devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que dès lors que le ministre n'a commis aucune erreur d'appréciation de la nécessité impérieuse pour la sécurité publique et de l'urgence absolue de l'expulsion de M. Djebali, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est en violation des articles 23, 24 et 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que ladite expulsion aurait été prononcée ; que par suite la circonstance qu'il ait été marié à une française, mariage dissous à la date de la décision attaquée mais dont sont issus 3 enfants, est inopérante ; que la circonstance que l'arrêté d'expulsion ait été pris avant que la chancellerie se soit prononcée sur le recours en grâce engagé par le requérant, lequel ne présente aucun caractère suspensif et ne confère aucun droit, ne prive pas, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté attaqué de base légale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA DECENTRALISATION est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en cause ;
Article 1er : Le jugement en date du 25 novembre 1984 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. Chedli Djebali devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Chedli Djebali et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 56592
Date de la décision : 15/02/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

49-05-04-03-04 POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES ETRANGERS - EXPULSION - URGENCE ABSOLUE -Champ d'application de l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée par la loi du 29 octobre 1981 - Etranger condamné pour trafic de stupéfiants à une peine de quatre ans d'emprisonnement - Expulsion légale, nonobstant le mariage (dissous) de l'intéressé à une française dont sont issus trois enfants.


Références :

Loi 81-973 du 29 octobre 1981
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 23, art. 24, art. 25, art. 26


Publications
Proposition de citation : CE, 15 fév. 1989, n° 56592
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Duléry
Rapporteur public ?: Vigouroux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:56592.19890215
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