Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 juillet 1986 et 7 novembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Manuel GARCIA Y..., demeurant chez Maître Fando X..., avocat, ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 30 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation des instructions ministérielles du 26 mars 1984 ainsi que de la décision du 23 juillet 1985 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a interdit de résider dans divers départements ;
2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 46-448 du 18 mars 1946 ;
Vu le décret 82-441 du 26 mai 1982 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dubos, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat de M. Manuel GARCIA Y...,
- les conclusions de M. Faugère, Commissaire du gouvernement ;
Sur les instructions ministérielles du 26 mars 1984 :
Considérant que M. Manuel GARCIA Y... demande l'annulation des instructions ministérielles du 26 mars 1984 par lesquelles le ministre de l'intérieur et de la décentralisation indique aux commissaires de la République la conduite qu'ils doivent tenir lorsqu'ils sont saisis de demandes d'asile émanant de ressortissants basques d'origine espagnole ; que ces instructions n'édictent par elles- mêmes aucune interdiction de séjour applicable à ces ressortissants et n'invitent nullement leur destinataire à prononcer une telle interdiction ; qu'elles portent essentiellement sur les modalités de délivrance et la durée de validité des récépissés de demande d'asile de ces ressortissants, prévus par l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et l'article 4 du décret du 30 juin 1946 ; que si le ministre invite les commissaires de la République à lui proposer en pareil cas une mesure d'interdiction de séjour dans certains départements, il ne préjuge pas la suite qui sera donnée par lui à ces propositions, et ne méconnaît donc ni sa propre compétence ni l'obligation qui lui incombe de procéder à l'examen de chaque cas individuel ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les instructions ministérielles attaquées ne méconnaissent pas les dispositions des alinéas 2 et 4 de l'article 2 du décret du 18 mars 1946 relatifs aux mesures d'interdiction de résidence applicables aux étrangers ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir que lesdites instructions auraient un caractère réglementaire dans la mesure où elles auraient pour objet ou pour effet de modifier la réglementation en vigueur ; que, dès lors, les conclusions de la requête tendant à leur annulation pour excès de pouvoir ne sont pas recevables ;
Sur la décision ministérielle du 23 juillet 1985 :
Considérant qu'aux termes de l'article 2, 4è alinéa du décret modifié du 18 mars 1946 "lorsqu'un étranger résident temporaire ou résident ordinaire doit, en raison de son attitude ou de ses antécédents être soumis à une surveillance spéciale, le ministre de l'intérieur peut lui interdire de résider dans un ou plusieurs départements" ;
Considérant que la décision du ministre de l'intérieur et de la décentralisation en date du 23 juillet 1985 interdisant à M. Manuel GARCIA Y... de résider dans 16 départements de l'ouest et du sud de la France est motivée par le fait que l'intéressé "est lié à un groupe armé et organisé dont l'activité constitue une atteinte à l'ordre public sur le territoire français" et " ... qu'il est nécessaire dans ces conditions de soumettre cet étranger à une surveillance spéciale" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle motivation, suffisante au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, repose sur des faits matériellement inexacts ou soit entachée d'une erreur de droit, ni qu'en estimant que les liens entre les activités de M. Manuel GARCIA Y... et celles d'un groupe armé et organisé portant atteinte à l'ordre public justifiaient l'application des mesures précitées, le ministre de l'intérieur et de la décentralisation ait fait des circonstances de l'espèce une appréciation manifestement erronée ; que, dès lors, M. Manuel GARCIA Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation des instructions ministérielles du 26 mars 1984 ainsi que de la décision du 23 juillet 1985 par laquelle le ministre de l'intérieur et de la décentralisation lui a interdit de résider dans 16 départements ;
Article 1er : La requête de M. Manuel GARCIA Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Manuel GARCIA Y... et au ministre de l'intérieur.