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27/02/1989 | FRANCE | N°88450

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 27 février 1989, 88450


Vu le recours du MINISTRE DELEGUE CHARGE DU BUDGET enregistré le 15 juin 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement du 15 janvier 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme française CEAT décharge, d'une part, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de cette entreprise au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979, d'autre part des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles cette société a

té assujettie au titre des années 1976, 1977, 1979 dans les rôles de la ...

Vu le recours du MINISTRE DELEGUE CHARGE DU BUDGET enregistré le 15 juin 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement du 15 janvier 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme française CEAT décharge, d'une part, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de cette entreprise au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979, d'autre part des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles cette société a été assujettie au titre des années 1976, 1977, 1979 dans les rôles de la commune de Poissy ;
2°) rétablisse la société CEAT aux rôles de l'impôt sur les sociétés à raison de l'intégralité des impositions supplémentaires établies au titre des années susmentionnées sur les résultats des exercices clos les 31 décembre des années 1976, 1977 et 1979 et remette à la charge de ladite société le complément d'imposition en matière de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des requêtes,
- les observations de Me le Griel, avocat de la Société FILERGIE succédant à la Société C.E.A.T.,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;
Sur les cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1976, 1977 et 1979 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les câbles vendus par la société CEAT sont livrés à la clientèle sur des tourets ; que l'acheteur règle à la société, en sus du prix des câbles, un prix de consignation pour chaque touret livré ; que, selon les stipulations de l'article 6 des conditions générales de vente proposées par la société à sa clientèle au cours des années d'imposition : "La consignation des tourets est facturée en même temps que les câbles sur la base du tarif prévisionnel en vigueur. Elle est remboursée, sous déduction d'une redevance fixe, si les tourets sont restitués franco de port et en bon état au vendeur dans un délai maximal de trois mois à partir du premier jour du mois qui suit la mise à disposition. Passé ce délai, un droit de location de 2,50 % du prix de consignation par mois ou fraction de mois supplémentaire est déduit, en sus de la redevance fixe, du remboursement de la consignation" ; qu'il résulte clairement de ces stipulations que la société loue à sa clientèle les tourets moyennant un loyer dont le ontant dépend de la date de retour du touret ; que la consignation est calculée de telle manière qu'elle se trouve absorbée, à l'expiration d'un délai de trois ans, par le montant de la redevance fixe et celui du loyer ; qu'à l'expiration de ce délai, la mise à disposition d'un touret, initialement consentie moyennant un loyer mensuel s'ajoutant à une redevance fixe, ne perd pas rétroactivement son caractère de location, même si le client n'a plus intérêt à le restituer et si la société renonce à cette restitution ; qu'ainsi, les tourets non restitués doivent être regardés comme ayant été donnés en location pendant une période de trois ans et laissés ensuite gratuitement à la disposition du client ;

Considérant, d'une part, que les tourets ont le caractère d'emballages récupérables ; qu'ils sont identifiables par l'inscription d'un numéro ; que, dès lors, c'est à bon droit, ainsi que l'administration le reconnaît, que la société fait figurer à un compte d'immobilisations les emballages qu'elle met à la disposition de sa clientèle ; que l'opération par laquelle, à l'expiration du délai de trois ans, la société cesse de faire figurer à un compte d'immobilisations les tourets non restitués s'analyse en un abandon de ces éléments de l'actif immobilisé ;
Considérant, d'autre part, que le montant des redevances recouvrées par voie de non remboursement des consignations a le caractère de produits de l'exploitation et concourt à la réalisation de bénéfices imposables dans les conditions du droit commun ; que le régime des plus-values à long terme ne peut donc pas s'appliquer à des opérations de cette nature ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que la société a estimé que les tourets qui n'ont pas été restitués à l'expiration d'un délai de trois ans doivent être regardés comme vendus à un prix égal au montant des consignations correspondantes, en sorte que les profits dégagés par cette vente seraient, dans la mesure où le montant de la consignation excède le prix de revient du touret non restitué, des plus-values à long terme au sens de l'article 39 duodecies du code général des impôts ; que le minitre est, dès lors, fondé à soutenir que le prix de consignation des tourets doit être réintégré dans les résultats imposables de la société requérante ;

Considérant, par suite, que le ministre délégué chargé du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme française CEAT décharge du complément d'imposition à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie à raison des recettes de location de tourets au titre des années 1976, 1977 et 1979 et à demander, par voie de conséquence, le rétablissement de cette société au rôle de l'impôt sur les sociétés à raison de l'intégralité des impositions supplémentaires auxquelles elle avait été assujettie au titre des années susmentionnées ;
Sur l'imposition supplémentaire en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979 :
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années 1976 à 1978 : "1- Les affaires faites en France ... sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats" ; qu'aux termes du même article 256, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1979 : "1 Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les redevances fixes et les indemnités d'immobilisation mensuelles ont été perçues par la société en contrepartie de la location des tourets ; que le produit de ces locations rémunérait des activités assujetties, en vertu des dispositions susvisées, à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, le MINISTRE DELEGUE CHARGE DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme française CEAT la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui a été réclamé à celle-ci au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979 du chef des recettes de location des tourets et à demander, par voie de conséquence, le rétablissement de ladite imposition ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 15 janvier 1987 est annulé.
Article 2 : La société anonyme française CEAT est rétablie aux rôles de l'impôt sur les sociétés au titre des années 1976, 1977, 1979 à raison de l'intégralité des impositions supplémentaires auxquelles elle avait été assujettie ; le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à cette société au titre de la période du 1er janvier 1976 au 31 décembre 1979 est remis à la charge de celle-ci.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société FILERGIE (aux droits de la société française CEAT) et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 88450
Date de la décision : 27/02/1989
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES


Références :

CGI 39 duodecies, 256


Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 1989, n° 88450
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Fabre-Aubrespy
Rapporteur public ?: Chahid-Nouraï

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:88450.19890227
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