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30/06/1989 | FRANCE | N°82590

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 30 juin 1989, 82590


Vu le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS enregistré le 10 octobre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 juillet 1986, par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande du groupement de défense au sujet du projet de déviation de la RN 6 à Saint-Bonnet et Saint-Laurent-de-Mure et communes limitrophes, de Mlle A..., de Mmes Z... et B... et de MM. X..., B..., Z..., Tacher, Y... et Vidaud, l'arrêté en date du 16 mai 1983, par lequel le préfet du Rhôn

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Vu le recours du MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS enregistré le 10 octobre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 juillet 1986, par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande du groupement de défense au sujet du projet de déviation de la RN 6 à Saint-Bonnet et Saint-Laurent-de-Mure et communes limitrophes, de Mlle A..., de Mmes Z... et B... et de MM. X..., B..., Z..., Tacher, Y... et Vidaud, l'arrêté en date du 16 mai 1983, par lequel le préfet du Rhône a déclaré cessibles pour cause d'utilité publique certains immeubles situés sur les communes de Saint-Bonnet-de-Mure et de Saint-Laurent-de-Mure ;
2°) rejette la demande présentée par les requérants devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation ;
Vu le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;
Vu le décret n° 69-825 du 28 août 1969 ;
Vu l'arrêté interministériel du 13 janvier 1970 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Latournerie, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des demandes de première instance :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 5 du décret du 28 août 1969 portant déconcentration et unification des organismes consultatifs en matière d'opérations immobilières, d'architecture et d'espaces protégés les projets d'acquisitions d'immeubles poursuivies par voie d'expropriation pour cause d'utilité publique sont, en principe, soumis à l'avis de la commission régionale des opérations immobilières mais que l'article 52 du même décret dispose que : "des arrêtés interministériels peuvent exclure certaines catégories d'opérations du champ d'application de l'article 5 ou instituer à leur égard des règles de procédures particulières" ; qu'en application de ces dispositions, l'article 1er de l'arrêté interministériel du 13 janvier 1970, dispose : "Sont dispensées de l'examen des commissions instituées par le décret du 18 août 1969 susvisé, 1° lorsque l'avis de la commission d'enquête ou du commissaire enquêteur émis dans les formes prévues par le décret du 6 juin 1959 susvisé est favorable, qu'aucune opposition n'a été formulée avant la déclaration d'utilité publique par les divers services de l'Etat intéressés et que l'accord est réalisé entre le service acquéreur et le service des domaines en ce qui concerne le montant desdites acquisitions : Les acquisitions immobilières nécssaires à l'exécution des travaux d'amélioration du réseau routier national ..." ;
Considérant qu'il résulte de la lettre du service des domaines, en date du 30 novembre 1972, produite par le commissaire de la République du département du Rhône devant les premiers juges, que le service des domaines faisait connaître que le montant des indemnités à prévoir pour l'acquisition des immeubles concernés était de 4 000 000 F et que c'est au vu de cette lettre que le projet de déviation de la route nationale n° 6 a été déclaré d'utilité publique par un arrêté du préfet du Rhône du 18 juin 1973 dont les effets ont été prorogés par arrêté du 16 juin 1978 puis par le décret du 16 juin 1983 ; qu'il est ainsi établi que s'est réalisé entre le service acquéreur et le service des domaines un accord sur le montant à prévoir pour les acquisitions ; que les dispositions précitées du décret du 28 août 1969 et de l'arrêté interministériel du 13 janvier 1970 dispensaient de soumettre l'acquisition en cause à l'avis de la commission des opérations immobilières ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence d'un tel accord pour annuler l'arrêté préfectoral du 16 mai 1983 ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que les requérants n'établissent pas que l'extrait cadastral ait été délivré dans des conditions irrégulières ; que le fait que l'arrêté portant déclaration de cessibilité ne soit pas numéroté est sans influence sur sa légalité ; qu'il en est de même des conditions dans lesquelles cet acte est publié ou notifié ; que l'arrêté litigieux a été régulièrement signé par le commissaire de la République, conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article R.11-28 du code de l'expropriation ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.12-1 du code de l'expropriation, le "commissaire de la République transmet au secrétariat de la juridiction du département dans lequel sont situés les biens à exproprier un dossier qui comprend obligatoirement les copies certifiées conformes : ... 2° de l'avis de la commission des opérations immobilières, sauf attestation par le commissaire de la République que cet avis n'est pas obligatoire, en l'espèce" ; que, s'agissant d'une procédure postérieure à la déclaration de cessibilité, le moyen tiré de ce que l'attestation aurait été signée par une autorité incompétente est inopérant à l'appui d'une demande tendant à l'annulation de ladite déclaration de cessibilité ;

Considérant que, si les requérants soutiennent que les travaux en cause ont pour objet la création d'une voie nouvelle qui, en application des dispositions précitées du décret du 28 août 1969 et de l'article 1er de l'arrêté du 13 janvier 1970, aurait nécessité la consultation de la commission départementale des opérations immobilières et de l'architecture, il résulte des pièces du dossier qu'il s'agit de travaux d'amélioration de la route nationale n° 6, qui, comme tels, sont dispensés de l'examen par la commission dès lors que les conditions prévues par cet arrêté étaient satisfaites ;
Considérant que, pour contester la légalité de l'arrêté portant déclaration de cessibilité, les requérants soutiennent que la déclaration d'utilité publique serait intervenue selon une procédure irrégulière, le préfet n'étant pas compétent pour proroger, par arrêté du 16 juin 1978, les effets de la première déclaration prononcé par arrêté du 18 juin 1973 ;
Considérant que l'autorité compétente pour proroger les effets d'une déclaration d'utilité publique est celle qui aurait compétence, à la date de la prorogation, pour statuer sur l'utilité publique de l'opération ; que la route nationale n° 6 dans la traversée des communes de Saint-Bonnet-de-Mure et Saint-Laurent-de-Mure figure sur la liste des routes dont les sections déviées pour contourner une agglomération sont soumises aux dispositions de l'article 5 de la loi du 3 janvier 1959 et à celles du titre II du décret du 18 août 1970 ; que ces dispositions ne comportent aucune dérogation aux règles de compétence fixées à l'article R.11-1 du code de l'expropriation ; que, dès lors, quelles qu'aient été les modalités de la procédure de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique du projet de déviation et eu égard à l'avis favorable émis par le commissaire enquêteur sur ce projet, le préfet du Rhône était compétent pour prononcer la prorogation de cette déclaration d'utilité publique ;

Considérant que les requérants contestent également le défaut d'utilité publique qui, de ce fait, rendrait illégale tant la déclaration d'utilité publique, par arrêté du 18 juin 1973, que sa prorogation, par arrêté du 16 juin 1978, qui constituent le fondement juridique de l'arrêté portant déclaration de cessibilité ;
Considérant que la déviation de la RN 6 à hauteur des agglomérations de Saint-Bonnet-de-Mure et de Saint-Laurent-de-Mure présente un intérêt public tant pour la circulation générale que pour les riverains de la route nationale ; que le coût financier de l'opération litigieuse, les atteintes qu'elle est susceptible de porter à d'autres intérêts publics ainsi qu'à l'économie communale et les inconvénients qui en résulteraient pour certains propriétaires privés et pour les habitants des lotissements proches de la nouvelle voie ne font pas perdre à ce projet son caractère d'utilité publique ; que si les requérants soutiennent que d'autres solutions étaient possibles pour alléger le trafic sur la route nationale n° 6, il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au Contentieux d'apprécier l'opportunité du choix entre différents tracés ;
Considérant, en ce qui concerne la prorogation des effets de la déclaration d'utilité publique, qu'il ressort des pièces versées au dossier que, si de légères rectifications d'emprise ont été prévues, l'objet de l'opération et le tracé de l'ouvrage n'ont subi aucune modification préalablement à l'arrêté de prorogation et qu'aucun changement appréciable dans les circonstances de fait n'est intervenu ; que, dès lors, les requérants ne peuvent utilement remettre en cause l'utilité publique du projet, ni soutenir que l'arrêté de prorogation aurait dû être précédé d'une nouvelle enquête ;

Considérant que s'ils soutiennent que la gratuité du tronçon correspondant à l'autoroute A 43 aurait rendu inutiles les travaux d'amélioration de la RN 6, les requérants n'établissent pas que l'administration aurait commis une erreur manifeste d'appréciation qui rendrait illégale la déclaration d'utilité publique et, par la même, la régularité de l'arrêté de cessibilité ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du préfet du Rhône en date du 16 mai 1983 ;
Article 1er : Le jugement, en date du 10 juillet 1986 du tribunal administratif de Lyon, est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le groupement de défense ausujet du projet de déviation de la RN 6 à Saint-Bonnet et Saint-Laurent-de-Mure et communes limitrophes et par Mlle A..., MmeRouleng épouse Paillet, MM. X..., Michel et Daniel Y..., M. et Mme B..., MM. Z..., Tacher et Vidaud, devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer, au groupementde défense au sujet du projet de déviation de la RN 6, à M. C... etautres.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 82590
Date de la décision : 30/06/1989
Type d'affaire : Administrative

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - NOTIONS GENERALES - NOTION D'UTILITE PUBLIQUE - EXISTENCE - INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT - VOIES ROUTIERES - Déviation d'une route nationale - Etendue du contrôle du juge.

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - REGLES GENERALES DE LA PROCEDURE NORMALE - ACTE DECLARATIF D'UTILITE PUBLIQUE - FORME - PROCEDURE CONSULTATIVE - Commission régionale des opérations immobilières - Dispense de saisine - Conditions.

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - REGLES GENERALES DE LA PROCEDURE NORMALE - ACTE DECLARATIF D'UTILITE PUBLIQUE - PROROGATION - Autorité compétente.


Références :

. Décret 70-759 du 18 août 1970
Arrêté interministériel du 13 janvier 1970 art. 1
Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique R11-28, R11-1
Décret 69-825 du 28 août 1969 art. 5
Loi du 03 janvier 1959 art. 5


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 1989, n° 82590
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Latournerie
Rapporteur public ?: Fornacciari

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:82590.19890630
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