La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/1989 | FRANCE | N°70215

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 29 novembre 1989, 70215


Vu la requête enregistrée le 5 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 14 mai 1985 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné solidairement avec les entreprises Vincent, Langlois et Bergeon à verser au Centre Hospitalier Général de Libourne les sommes de 564 100 F, 45 134 F et 33 445 F, avec intérêts, en réparation des désordres et de la méconnaissance des règles de sécurité constatés dan

s l'aile "maternité" dudit Centre Hospitalier, et a rejeté son appel en...

Vu la requête enregistrée le 5 juillet 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES, dont le siège est ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 14 mai 1985 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné solidairement avec les entreprises Vincent, Langlois et Bergeon à verser au Centre Hospitalier Général de Libourne les sommes de 564 100 F, 45 134 F et 33 445 F, avec intérêts, en réparation des désordres et de la méconnaissance des règles de sécurité constatés dans l'aile "maternité" dudit Centre Hospitalier, et a rejeté son appel en garantie dirigé contre l'Etat, le département de la Gironde et la ville de Libourne,
2° rejette la demande présentée par le Centre Hospitalier Général de Libourne devant le tribunal administratif de Bordeaux, et ordonne un complément d'expertise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Groshens, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Boulloche, avocat du GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7, de Me Cossa, avocat du centre hospitalier général de Libourne, de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la société entreprise Vincent, de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la société Bergeon et Cie, de Me Spinosi, avocat de la ville de Libourne et de Me Odent avocat de la société métropolitaine de construction,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne la responsabilité contractuelle du groupement requérant :

Considérant qu'aux termes de l'article 17 du contrat d'architecte du 3 décembre 1973 passé entre le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7 et le centre hospitalier général de Libourne : "Pour toutes les difficultés que pourrait soulever l'application du présent contrat et en particulier pour apprécier la gravité des violations du contrat visées à l'article 15 ci-dessus, les parties s'obligent à solliciter les avis du ministre des affaires sociales et du conseil supérieur de l'ordre des architectes, avant d'engager toute action judiciaire. Si l'accord ne pouvait être obtenu, la juridiction compétente serait le tribunal administratif dans le ressort duquel sont situés les travaux." ; que cette clause, que le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7 est recevable à invoquer pour la première fois devant le Conseil d'Etat, était opposable à la demande formée par le centre hospitalier de Libourne devant le tribunal administratif de Bordeaux, en tant qu'elle tendait à la mise en jeu de la responsabilité contractuelle du GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7 à rason de la méconnaissance des normes de sécurité et de protection contre l'incendie ; qu'il suit de là que le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7 est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a accueilli ladite demande, en tant qu'elle mettait en cause la responsabilité contractuelle du GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7, alors qu'elle n'avait pas été précédée de la double consultation prévue par la stipulation précitée ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué, en tant qu'il a condamné le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7, sur le fondement de la responsabilité contractuelle et de rejeter la demande du centre hospitalier général de Libourne en tant qu'elle porte sur cette catégorie de désordres et, par voie de conséquence son recours incident tendant à la majoration de l'indemnité allouée de ce chef ;
En ce qui concerne la responsabilité décennale dudit groupement :

Considérant qu'il ressort de l'instruction que les constructions dont il s'agit comportaient des défauts de conformité aux normes de sécurité qui n'étaient pas apparents lors des réceptions définitives de l'ouvrage, et rendaient celui-ci impropre à sa destination ; qu'ainsi et alors même que le bâtiment a été mis en service ces désordres engagent la responsabilité des constructeurs à titre de la garantie découlant des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Sur la réparation :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le tribunal administratif ait fait une appréciation excessive du montant des travaux nécessaires pour la mise en conformité des malfaçons relevant de la garantie décennale, en condamnant le groupement d'architectes requérant à payer au centre hospitalier d'une part les sommes de 490 100 F, 39 134 F et 29 445 F solidairement avec respectivement les entreprises Vincent, Langlois et Bergeon, et d'autre part la somme de 341 135 F pour des désordres au titre desquels aucune entreprise n'avait été poursuivie ;
Mais considérant que l'indemnité de 400 000 F accordée au centre hospitalier par le jugement attaqué au titre des pertes de recettes qu'il a subies pendant l'exécution des travaux de mise en conformité tient compte tant des vices apparents lors de la réception définitive que des autres malfaçons ; qu'il ressort de ce qui a été dit ci-dessus que les conclusions de la demande n'étaient pas recevables en tant qu'elles concernaient les vices apparents ; que le montant des pertes de recettes imputables aux travaux de réparation des vices non apparents peut être évalué à 100 000 F ; qu'il y a lieu dès lors de ramener l'indemnité due à ce titre par le groupement requérant seul à 40 000 F, et les sommes dont il est tenu solidairement avec les entreprises Vincent, Langlois et Bergeon respectivement à 55 000 F, 3 000 F et 2 000 F ;
Sur les conclusions en garantie présentées par le groupement requérant :

Considérant, d'une part, que le groupement d'architectes requérant n'a présenté en première instance aucune conclusion contre les entreprises Fayat et Tunzini Nessi, que le tribunal administratif avait d'ailleurs mises hors de cause par un jugement avant-dire droit du 18 novembre 1982, donnant acte du désistement en ce qui les concerne du centre hospitalier ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'une entreprise dénommée "Lasjunias" ait été en cause à un moment quelconque dans ce litige ; que, dès lors, les conclusions en garantie dirigées contre ces trois entreprises ne sont pas recevables ;
Considérant, d'autre part qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis de construire délivré au centre hospitalier au nom de l'Etat le 4 avril 1974 fut entaché d'illégalité, ni que le préfet de la Gironde ait commis une faute en s'abstenant de mentionner dans ce permis le détail des prescriptions applicables en matière de sécurité ; qu'il n'en ressort pas davantage que les commissions de sécurité qui ont procédé à la visite de l'ouvrage aient commis, dans l'exercice de leur mission, des fautes lourdes de nature à engager la responsabilité de la ville de Libourne au titre de la police municipale ; qu'enfin le requérant n'apporte aucune précision à l'appui de ses conclusions en garantie dirigée contre le département de la Gironde, lequel n'exerce aucune attribution dans ce domaine ;
Sur les appels provoqués des entreprises Bergeon et Vincent :
Sur le chef de préjudice relatif aux travaux de réparations :

Considérant que les conclusions en appel principal du GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A7 ont été rejetées ; que, par voie de conséquence les conclusions présentées dans les appels provoqués des entreprises Bergeon et Vincent sont irrecevables ;
Sur le chef de préjudice relatif aux troubles de jouissance :
Considérant que la responsabilité des entrepreneurs ne peut être engagée à raison des vices apparants ; qu'il y a lieu de ramener les sommes dont les entreprises Vincent et Bergeon sont tenues, solidairement avec le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A7, respectivement à 55 000 et 2 000 F ;
Article 1er : La somme que le GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7 a été condamnée à verser au centre hospitalier général de Libourne par l'article 3 du jugement attaqué est ramenée à381 135 F.
Article 2 : Les condamnations solidaires mises à la charge dudit groupement attaqué sont ramenées à 545 000 F en ce qui concerne la solidarité avec l'entreprise Vincent, à 42 134 F en ce qui concerne l'entreprise Langlois et à 31 445 F en ce qui concerne l'entreprise Bergeon.
Article 3 : Les condamnations prononcées à l'encontre des entreprises Vincent et Bergeon par l'article 1er du jugement attaqué sont ramenées respectivement à 545 000 F et 31 445 F.
Article 4 : Les articles 1, 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 mai 1985 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire à la présente décision.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête et des appels en garantie du GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7, ensemble les conclusions de l'appel provoqué de la société Bergeon, de l'entreprise Vincent et de la ville de Libourne et de l'appel incident du centre hospitalier général de Libourne sont rejetés.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au centre hospitalier général de Libourne, au GROUPEMENT PERMANENT DES ARCHITECTES A 7, aux entreprises Bergeon et Cie et Vincent, au maire de la ville de Libourne et au ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 70215
Date de la décision : 29/11/1989
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03-02 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - DESORDRES DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DECENNALE DES CONSTRUCTEURS - ONT CE CARACTERE -Désordres de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination - Défaut de conformité des constructions aux normes de sécurité.

39-06-01-04-03-02 Constructions comportant des défauts de conformité aux normes de sécurité qui n'étaient pas apparents lors des réceptions définitives de l'ouvrage, et rendaient celui-ci impropre à sa destination. Ainsi et alors même que le bâtiment a été mis en service ces désordres engagent la responsabilité des constructeurs au titre de la garantie découlant des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil.


Références :

Code civil 1792, 2270


Publications
Proposition de citation : CE, 29 nov. 1989, n° 70215
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Groshens
Rapporteur public ?: M. Abraham

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1989:70215.19891129
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award