Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 25 novembre 1985 et 22 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Julien X..., demeurant à Gillancourt, Colombey-les-deux-Eglises (52230), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 septembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 16 septembre 1982 par lequel le Commissaire de la République du département de la Haute-Marne a déclaré d'utilité publique le projet d'acquisition des terrains en vue de la création d'un périmètre immédiat de protection du captage de Gillancourt, et cessibles au profit de la commune des propriétés désignées à l'état parcellaire annexé ;
2°) annule pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation ;
Vu le code rural ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 61-859 du 1er août 1961 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Froment, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. Julien X... et de Me Parmentier, avocat de la commune de Gillancourt,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
Considérant que si la protection de la source de la Blaise, sur le territoire de la commune de Gillancourt, peut justifier l'établissement d'un périmètre immédiat de protection du captage, il ressort des pièces du dossier, en particulier des deux rapports d'expertise qui y figurent, que le périmètre retenu, sur la proposition du conseil municipal de Gillancourt, excède très largement ce que recommandaient les experts ; que les inconvénients de l'opération déclarée d'utilité publique par l'arrêté du commissaire de la République du département de la Haute-Marne en date du 16 septembre 1982, qui entraînerait pour M. X... l'expropriation d'une parcelle d'une superficie d'1 ha 88 et le démembrement de son exploitation, sont excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ; que, dès lors, M. X... est fondé à soutenir que cet arrêté est entaché d'excès de pouvoir et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande tendant à son annulation ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 10 septembre 1985 et l'arrêté du 16 septembre 1982 du Commissaire de la République du département de la Haute-Marne sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à lacommune de Gillancourt et au ministre de l'intérieur.