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03/12/1990 | FRANCE | N°42928

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 03 décembre 1990, 42928


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 juin 1982 et 4 octobre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 25 mars 1982, par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 1972, dans les rôles de la ville de Paris,
2°) lui accorde la décharge des impositions contest

es ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 juin 1982 et 4 octobre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 25 mars 1982, par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 1972, dans les rôles de la ville de Paris,
2°) lui accorde la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Le Menestrel, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Boullez, avocat de M. Jean-Pierre X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sur les recettes imposées dans la catégorie des bénéfices commerciaux :
Considérant qu'à l'occasion d'une vérification de la situation fiscale de M. X..., qui exerce, à Paris, les professions d'expert-comptable et de commissaire aux comptes, l'administration a constaté, d'une part, que l'intéressé avait loué au cours, notamment, de l'année 1972, des chambres meublées à des étudiants, d'autre part, que, par acte du 4 février 1972, il avait confié la gérance d'une partie de la clientèle de son cabinet d'expert-comptable à la société à responsabilité limitée d'expertise-comptable Omnium Comptable ; qu'estimant que ces activités provenaient de l'exercice d'une profession commerciale, au sens des dispositions précitées de l'article 34, et que les recettes que M. X... en avait tirées, en 1972, pour un montant restant inférieur au maximum fixé par l'article 302 ter-1 précité devaient, en conséquence, être soumises à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sous le régime du forfait, l'administration lui a notifié une proposition de forfait de bénéfice pour ladite année ; que cette proposition n'ayant pas été acceptée par M. X..., la commission départementale des impôts a fixé le bénéfice imposable à 22 000 F pour la location de chambres meublées et à 60 000 F pour la location de clientèle ;
En ce qui concerne la location de chambres meublées :
Considérant que la location de chambres meublées est une activité de nature commerciale dont les revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;

Considérant, d'une part, qu'il ne résulte de l'instruction, ni que certaines des chambres dont M. X... est propriétaire auraient été mises gratuitement à la dispositon de leurs occupants, ni que deux chambres avaient été louées non meublées ;
Considérant, d'autre part, que, si plusieurs de ces chambres ont été acquises par M. X... en même temps que l'appartement qui lui sert d'habitation principale, elles ne peuvent être regardées comme des pièces de cette habitation, dès lors qu'elle en sont séparées et qu'on y accède par les parties communes de l'immeuble ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé, en ce qui les concerne, à invoquer le bénéfice de l'exonération d'impôt sur le revenu prévu par les dispositions de l'article 35 bis du code général des impôts en faveur des "personnes qui louent ou sous-louent en meublé une ou plusieurs pièces de leur habitation principale" ;
Considérant, enfin, que M. X... ne fait état d'aucun élément, comptable ou autre, permettant d'évaluer le bénéfice qu'il était normalement susceptible de retirer, en 1972, de la location de neuf chambres meublées, à une somme inférieure à celle de 22 000 F par an qui a été retenue par la commission départementale des impôts ; que dès lors, il n'est fondé à contester ni le principe, ni les bases de l'imposition qui lui a été réclamée au titre de son activité de loueur de chambres meublées ;
En ce qui concerne l'imposition des recettes que la mise en gérance d'une partie de la clientèle de son cabinet d'expert-comptable aurait procurées à M. X... :

Considérant, d'une part, que le fait, par M. X..., d'avoir confié la gérance d'une partie de la clientèle de son cabinet d'expert-comptable à la société à responsabilité limitée d'expertise comptable "Omnium Comptable" n'est pas de nature à conférer à cette activité un caractère commercial, au sens de l'article 34 précité du code général des impôts ;
Considérant, d'autre part, que l'administration n'établit, ni même n'allègue que les locaux donnés à bail à la société à responsabilité limitée "Omnium Comptable" par la société civile immobilière "Montholon-Rochambeau" dont M. X... détenait la quasi-totalité des parts, étaient meublés ou munis de matériels nécessaires à l'activité du preneur ; qu'ainsi et à supposer même qu'elle doive être regardée comme ayant été, en réalité, directement consentie par M. X..., cette location nue, dépourvue de caractère commercial, n'a pu, en tout état de cause, contribuer à donner un tel caractère à la mise en gérance, par M. X..., d'une partie de la clientèle de son cabinet d'expert-comptable ; que les bénéfices tirés de cette activité n'étaient donc pas imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que M. X... a droit à la décharge de l'imposition correspondante, soit 60 000 F ;
Sur les autres bénéfices non commerciaux :
Considérant que le litige portant, pour 1972, sur la déduction des charges professionnelles et sur les amortissements pratiqués par M. X... a été soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que l'imposition litigieuse ayant été établie conformément à l'avis émis par cette commission, il appartient au requérant d'apporter la preuve de l'exagération de la base d'imposition ;

Considérant, en premier lieu, que si M. X... demande que soient pris en compte, au titre de ses dépenses professionnelles, des primes d'assurance, des frais de représentation et les dépenses exposées à l'occasion d'un voyage à l'étranger, il ne justifie pas, par les pièces qu'il a produites, que ces dépenses auraient été supportées en 1972 ou qu'elles auraient eu un caractère professionnel ;
Considérant, en second lieu, que pour la détermination des bénéfices non commerciaux imposables, et en vertu de l'article 39 du code général des impôts auquel renvoie l'article 93 du même code, seuls peuvent être regardés comme "réellement effectués" au titre d'une année par un contribuable exerçant une profession non commerciale les amortissements qui ont été effectivement portés, avant l'expiration du délai de déclaration des bénéfices non commerciaux, sur le registre des immobilisations prévu à l'article 99 du code général des impôts ; qu'il est constant que M. X... n'a pu produire ce registre ; que c'est par suite à bon droit que la somme précitée de 16 600 F a été rapportée par l'administration au bénéfice imposable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération du montant des bénéfices non commerciaux retenus dans les bases de l'imposition contestée ;
Sur les revenus de capitaux mobiliers :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière "Président Wilson", dont M. X... et son épouse détenaient 99 % du capital, a été créée en 1970 et a acquis un immeuble pour le prix de 100 000 F ; qu'elle a, à compter du 5 mai 1970, donné cet immeuble à bail à la société à responsabilité limitée "Omnium Fiduciaire", dont M. X... était l'associé principal et le seul dirigeant ; qu'en exécution du contrat, la société "Omnium Fiduciaire" a versé en 1972 à la société bailleresse des loyers s'élevant à la somme de 61 400 F ; que l'administration justifie que la valeur locative de l'immeuble dont s'agit n'excédait pas, en 1972, la somme de 14 100 F ; qu'elle établit ainsi que le loyer versé au titre de la même année par la société "Omnium Fiduciaire" à la société civile présentait un caractère anormal ; qu'elle établit également que ces loyers, contrairement à ce que soutient M. X..., étaient portés dans les écritures de la société à responsabilité limitée à un compte courant ouvert au nom de la société civile ; que, du fait d'une telle inscription, ces sommes étaient à la disposition de la société civile ; qu'eu égard à sa position dans cette société, M. X... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'en aurait pas eu la disposition ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la somme de 47 300 F a été imposée à son nom à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " ... Lorsque la bonne foi du redevable ne peut être admise, les droits correspondant aux infractions définies à l'article 1728 sont majorés de : -30 % si le montant des droits n'excède pas la moitié du montant des droits réellement dus ; -50 % si le montant des droits est supérieur à la moitié des droits réellement dus" ; qu'eu égard à l'ensemble des circonstances susanalysées, l'administration établit que la bonne foi de M. X... ne peut pas être admise ; que c'est dès lors à bon droit que l'imposition litigieuse a fait l'objet, à raison des redressements mentionnés ci-dessus, de la majoration prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif n'a pas accueilli sa demande en décharge de l'imposition contestée, en tant qu'elle portait sur les recettes tirées de la mise en gérance d'une partie de la clientèle de son cabinet d'expert-comptable ;
Article 1er : Le revenu imposable de M. X... à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1972 est réduit d'un montant de 60 000 F.
Article 2 : M. X... est déchargé de la différence entre l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1972 et celui qui résulte de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 25 mars 1982 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 35 bis, 34, 39, 93, 99, 1729


Publications
Proposition de citation: CE, 03 déc. 1990, n° 42928
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Le Menestrel
Rapporteur public ?: Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 03/12/1990
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 42928
Numéro NOR : CETATEXT000007625243 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1990-12-03;42928 ?
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