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10/12/1990 | FRANCE | N°73489

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 10 décembre 1990, 73489


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 novembre 1985 et 18 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yves X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 18 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, respectivement, du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1980, et des cotisations supplémentaires d'im

pôt sur le revenu et pénalités auxquelles il a été assujetti au titre d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 novembre 1985 et 18 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yves X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 18 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, respectivement, du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1980, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et pénalités auxquelles il a été assujetti au titre de chacune des années 1977, 1978, 1979 et 1980 ;
2°) lui accorde la décharge desdites impositions et pénalités ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Yves X...,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si les compléments de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur le revenu assignés à M. X... au titre, respectivement, de la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1980 et de chacune des années 1977 à 1980, à la suite de la vérification de la comptabilité du fonds de commerce de réparation et de vente de véhicules automobiles qu'il exploite à Pouzauges (Vendée), procèdent, pour leur majeure partie, d'une reconstitution des recettes de l'entreprise effectuée par le vérificateur après qu'il eût écarté la comptabilité comme non probante, ces impositions ont, toutefois, été établies, non par voie de rectification d'office, mais suivant la procédure de redressement contradictoire ; que, par suite, les moyens tirés par M. X... d'irrégularités qui auraient affecté la mise en euvre d'une procédure de rectification d'office sont inopérants ;
Considérant que, les redressements n'ayant pas été acceptés par le contribuable et la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'ayant pas été consultée, il incombe à l'administration d'apporter la preuve du bien-fondé du rejet de la comptabilité et de la reconstitution des recettes de l'entreprise opérés par le vérificateur ;
Sur le bien-fondé des redressements contestés :
Considérant que l'administration ne conteste pas la régularité en la forme de la comptabilité de M. X..., mais fait état de divers indices d'où résulterait que celle-ci ne peut être tenue pour sincère et probante ; quela circonstance que les recettes comptabilisées sont inférieures aux chiffres d'affaires reconstitués par le vérificateur au moyen de coefficients de bénéfice brut sur achats et salaires déduits de constatations faites dans l'entreprise ne peut, toutefois, suffire à écarter la comptabilité, alors, surtout, que la pertinence de certains desdits coefficients est insuffisamment établie ; que, si l'administration fait valoir que les prélèvements auxquels a procédé M. X... apparaissent faibles en regard de la charge d'une famille de quatre personnes, elle n'apporte, au soutien de cette appréciation, aucune précision quant au train de vie de l'intéressé ; qu'aucun fait relatif au fonctionnement même de l'entreprise ne permet, enfin, de rattacher les chèques dont a été crédité le compte bancaire privé du contribuable, aux opérations professionnelles de celui-ci, même si leur origine n'a pas été révélée par lui ; que, dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme établissant que la comptabilité de M. X... serait dépourvue de sincérité et de valeur probante ;

Considérant qu'il suit de là que M. X... est fondé à soutenir que le montant de ses recettes a été à tort porté à des chiffres supérieurs à ceux qu'il a comptabilisés et déclarés, et que les impositions contestées ne sont pas fondées en tant qu'elles excèdent, d'une part, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, un rappel de 483,12 F procédant de la taxation du produit de la location d'emplacements de stationnement de véhicules au cours de l'année 1980 et, d'autre part, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, les droits afférents à la réintégration dans les bénéfices industriels et commerciaux de dépenses relatives à l'utilisation à des fins privées d'un véhicule de l'entreprise, évaluées à 6 000 F pour 1977, 7 500 F pour 1978, 8 500 F pour 1979 et 10 000 F pour 1980 ;
Sur les conclusions du ministre chargé du budget tendant à ce qu'une fraction des cotisations d'impôt sur le revenu soit maintenue par voie de substitution de fondement légal :
Considérant qu'à titre subsidiaire, le ministre demande que les droits établis à tort sur la base de rehaussements des bénéfices industriels et commerciaux réalisés par M. X... soient laissés à la charge de ce dernier à due concurrence de l'imposition, par application des dispositions des articles 176 et 179 du code général des impôts, de revenus d'origine indéterminée correspondant au montant des chèques versés par le contribuable sur son compte bancaire privé sans qu'il ait justifié de leur origine ;
Mais considérant que, dans la demande de justifications adressée le 9 juillet 1981 à M. X..., l'inspecteur a invité celui-ci à lui préciser l'origine de chacun des "nombreux chèques" portés au crédit de son compte bancaire privé durant les quatre années 1977 à 1980, et dont il indiquait les montants globaux par mois ; qu'à défaut de désignation précise de la date de remise et du montant de chacun des chèques inclus dans ces totalisations, une telle demande ne mettait pas le contribuable en mesure d'apporter dans le délai requis, de trente jours seulement, une réponse utile ; qu'ainsi, les sommes correspondantes ne peuvent pas légalement être taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée pour défaut de réponse à une demande de justifications ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a refusé de lui accorder la réduction, déterminée comme il a été dit ci-dessus, des impositions litigieuses ;
Article 1er : Il est accordé à M. X... : 1°) la réduction à 483,12 F en principal, assorti des pénalités correspondantes, du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes maintenus à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1980 ; 2°) décharge de la différence entre le montant des suppléments d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes maintenus à sa charge au titre de chacune des années 1977 à 1980 et celui des droits et pénalités résultant d'un rehaussement de bénéfices industriels et commerciaux limité à 6 000 F pour l'année 1977, 7 500 F pour l'année 1978, 8 500 F pour l'année 1979 et 10 000 F pour l'année 1980.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 18 juillet 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 73489
Date de la décision : 10/12/1990
Sens de l'arrêt : Réduction décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ART. 176 ET 179 DU CGI, REPRIS AUX ARTICLES L.16 ET L.69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) -Procédure - Demande insuffisamment précise : globalisation des crédits bancaires mois par mois.

19-04-01-02-05-02-02 Dans la demande de justifications adressée au contribuable, l'inspecteur a invité celui-ci à lui préciser l'origine de chacun des "nombreux chèques" portés au crédit de son compte bancaire privé durant les quatre années 1977 à 1980, et dont il indiquait les montants globaux par mois. A défaut de désignation précise de la date de remise et du montant de chacun des chèques inclus dans ces totalisations, une telle demande ne mettait pas le contribuable en mesure d'apporter dans le délai requis, de trente jours seulement, une réponse utile. Ainsi, les sommes correspondantes ne peuvent légalement être taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée pour défaut de réponse à une demande de justifications.


Références :

CGI 176, 179


Publications
Proposition de citation : CE, 10 déc. 1990, n° 73489
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1990:73489.19901210
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