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14/12/1990 | FRANCE | N°59382

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 14 décembre 1990, 59382


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 21 mai 1984 et 12 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, dont le siège social est ... ; la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du 25 janvier 1984 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée, conjointement et solidairement d'une part avec la ville d'Aubagne et le bureau d'études techniques pour l'équipement et l'urbanisation de la région méditerranéenne (BETEREM) à

payer à la société méridionale des plastiques (SMP) une somme de 2...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 21 mai 1984 et 12 septembre 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, dont le siège social est ... ; la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du 25 janvier 1984 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée, conjointement et solidairement d'une part avec la ville d'Aubagne et le bureau d'études techniques pour l'équipement et l'urbanisation de la région méditerranéenne (BETEREM) à payer à la société méridionale des plastiques (SMP) une somme de 25 888 F en réparation des dommages causés par une inondation survenue en 1974, d'autre part avec la commune d'Aubagne, l'Etat et le Beterem à verser à la société méridionale des plastiques une somme de 250 898 F en réparation des préjudices subis lors d'une inondation survenue en 1978, l'a condamnée à garantir l'Etat des condamnations prononcées contre lui et a rejeté son appel en garantie formé contre l'Etat ;
2° de rejeter l'appel en garantie de l'Etat entre la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT ;
3° de condamner l'Etat, le bureau d'études techniques pour l'équipement et l'urbanisation de la région méditerranéenne (BETEREM) et la commune d'Aubagne à garantir la société requérante des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;
4° de réduire l'indemnité allouée à la société méridionale des plastiques à la somme de 10 000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Lasvignes, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la ville d'Aubagne et de la SCP Boré, Xavier, avocat de la société méridionale des plastiques,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité encourue par la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT à l'encontre de la société méridionale des plastiques :
Considérant que les installations que possède dans la zone industrielle des Paluds à Aubagne la société méridionale des plastiques ont été inondées à la suite de pluies qui se sont abattues sur la région une première fois les 2 et 3 mars 1974 et une deuxième fois le 18 janvier 1978, soit postérieurement à la réception définitive des ouvrages d'assainissement et d'évacuation des eaux et à leur remise à la ville d'Aubagne ; qu'il résulte de l'instruction que ces inondations sont imputables, d'une part, à la conception même du réseau d'vacuation des eaux lors de l'aménagement de la zone industrielle et, d'autre part, au fonctionnement du système d'évacuation des eaux existant ; que la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT n'apportant pas la preuve qui lui incombe de l'aménagement normal de l'ouvrage, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée à indemniser la société méridionale des plastiques, qui avait, eu égard aux conditions d'utilisation de l'ouvrage, la qualité d'usager, des conséquences des inondations survenues en 1974 et 1978 ;
Considérant que la circonstance que les inondations seraient en partie imputables aux agissements de tiers, qui auraient détourné les cours d'eau avoisinants vers la zone industrielle, à la supposer établie, est sans incidence sur la responsabilité des co-auteurs du dommage vis-à-vis de la victime ;
Considérant, en revanche, qu'il résulte de l'instruction que la société méridionale des plastiques a commis une imprudence en s'installant dans une zone dont elle ne pouvait ignorer le caractère inondable, sans prendre les précautions imposées par la situation naturelle des lieux ; qu'après le sinistre intervenu en 1974, elle n'a pas procédé aux travaux jugés nécessaires pour que les désordres ne se reproduisent plus, et notamment à l'installation de la station de pompage, recommandée par l'expert ; que les imprudences ainsi commises par la société méridionale des plastiques sont de nature à atténuer la responsabilité des auteurs des dommages ; qu'en fixant à 10 % pour 1974 et à 20 % pour 1978, la part des conséquences dommageables des inondations qui doit être laissée à la charge de la victime, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce ; qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée, dans cette mesure, à demander la réformation du jugement attaqué qui retient son entière responsabilité ;
Sur le préjudice :

Considérant que les prétentions incidentes de la société méridionale des plastiques ne sont pas suffisamment justifiées ou sont contredites par le rapport d'expertise ; qu'il y a lieu, par suite, compte tenu du partage de responsabilité susindiqué, de condamner la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, à verser à la victime la somme de 23 300 F en réparation des dommages qu'elle a subi en 1974 et de 200 719 F pour les dégâts consécutifs aux inondations de 1978 ;
Sur l'appel en garantie formé par l'Etat contre la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT :
Considérant qu'à l'appui de son appel en garantie le ministre de l'urbanisme et du logement se prévaut de la délibération du conseil d'administration de la société d'équipement des Bouches-du-Rhône, aux droits de laquelle est venue la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, sollicitant le concours facultatif de l'Etat, et de la décision du ministre de l'équipement et du logement accordant ce concours, aux termes desquelles l'Etat était exonéré de la responsabilité résultant de l'application des articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant que la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT a agi comme mandataire du syndicat mixte d'aménagement d'Aubagne et de la commune d'Aubagne ; que cette dernière est devenue, à la suite de la remise de l'ouvrage opérée le 9 juin 1972 et de la réception définitive prononcée sans réserves en janvier 1973, seul maître de l'ouvrage et seul titulaire de l'action en garantie décennale vis-à-vis des constructeurs ; que, dans ces conditions, le ministre de l'urbanisme et du logement ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir utilement à l'encontre de la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, des stipulations susanalysées de l'accord relatif au concours apporté par l'Etat ; que la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif l'a condamnée à garantir l'Etat des condamnations prononcées contre lui ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler l'article 8 du jugement attaqué et de rejeter les conclusions d'appel en garantie présentées par l'Etat devant le tribunal administratif de Marseille ;
Sur l'appel en garantie formé par la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT contre l'Etat :

Considérant, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, que les installations de la zone industrielle d'Aubagne, remises à la commune d'Aubagne le 5 juin 1972, ont fait l'objet, en janvier 1973, d'une réception définitive sans réserve ; que le recours en garantie formé par la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT contre l'Etat tendait à mettre en cause la responsabilité que ce dernier pouvait encourir envers elle en raison de la mauvaise exécution du contrat et avait ainsi pour fondement juridique la faute commise par l'Etat envers cette société dans l'accomplissement de ses obligations contractuelles ; que la réception définitive prononcée sans réserve ayant eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels entre la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT et l'Etat, les conclusions d'appel en garantie formées par la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'appel en garantie de la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT contre la ville d'Aubagne et le bureau d'études techniques pour l'urbanisme et l'équipement de la région méditerranéenne :
Considérant que devant les premiers juges la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT n'a pas demandé à être garantie par la ville d'Aubagne et le bureau d'études techniques pour l'urbanisme et l'équipement de la région méditerranéenne ; que les conclusions à cette fin présentées pour la première fois en appel ont le caractère de demandes nouvelles et sont, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions de l'Etat et de la ville d'Aubagne :
Considérant que l'admission partielle des conclusions de la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT dirigées contre la victime aggrave la situation de l'Etat, condamné solidairement avec la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT la ville d'Aubagne et le bureau d'études techniques pour l'équipement et l'urbanisation de la région méditerranéenne (BETEREM), à indemniser la société méridionale des plastiques ; que, par suite, les conclusions d'appel provoqué présentées par l'Etat sont recevables et fondées, la responsabilité solidaire encourue par l'Etat, pour les inondations de 1978 devant être limitée à 80 % des dommages subis par la société méridionale des plastiques ; qu'il en est de même pour la ville d'Aubagne dont la responsabilité doit être limitée à 90 % des dommages subis par la société méridionale des plastiques en 1974 et à 80 % de ceux que cette société a subis en 1978 ;
Article 1er : L'article 8 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 25 janvier 1984 est annulé.
Article 2 : Les conclusions d'appel en garantie présentées par l'Etat devant le tribunal administratif de Marseille et dirigées contre la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT sont rejetées.
Article 3 : La somme de 25 888 F que la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, l'Etat et la ville d'Aubagne ont été condamnées solidairement à verser à la société méridionale des plastiques pour 1974 est ramenée à 23 300 F.
Article 4 : La somme de 250 898 F que la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, l'Etat et la ville d'Aubagne ont été condamnées solidairement à verser à la société méridionale des plastiques pour 1978 est ramenée à 200 719 F.
Article 5 : Les articles 2, 3, 4 et 5 du jugement attaqué sont réformés en ce qu'ils ont de contraire à la présente décision.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, l'appel incident de la société méridionale des plastiques, le surplus des conclusions de l'Etat et de la ville d'Aubagne sont rejetés.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE PROVENCALE D'EQUIPEMENT, à la société méridionale des plastiques, à la ville d'Aubagne, au bureau d'études techniques pour l'équipement et l'urbanisation de la région méditerranéenne (BETEREM) et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer.


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