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18/02/1991 | FRANCE | N°77105

France | France, Conseil d'État, 18 février 1991, 77105


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 mars 1986 et 18 juin 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 500 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la mise à sa disposition par les services extérieurs de la médecine préventive de l'Académie de Besançon d'apparei

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 mars 1986 et 18 juin 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 janvier 1986 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 500 000 F en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la mise à sa disposition par les services extérieurs de la médecine préventive de l'Académie de Besançon d'appareils et d'installations radiologiques défectueux et a fixé à 50 000 F ledit préjudice ;
2°) de condamner l'Etat (ministre de l'éducation nationale) à lui verser une indemnité globale de 500 000 F avec intérêts de droit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Fortunet, Mattei-Dawance, avocat de M. Dominique X...,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'imputabilité des troubles :
Considérant que M. X... a, de 1947 à 1965, procédé à de nombreux examens de radioscopie pulmonaire dans les services de médecine préventive et d'hygiène scolaire de l'académie de Besançon ; qu'il résulte de l'instruction que, pour l'exécution de sa mission, il a utilisé exclusivement des appareils mis à sa disposition par l'administration et non, comme le soutient le ministre de l'éducation nationale, ses propres appareils ; qu'en outre, s'il a également procédé, pendant cette période, à des radioscopies dans le cadre de son activité privée, ces examens étaient peu nombreux et réalisés avec un matériel conforme aux normes de sécurité ;
Considérant qu'il résulte des constatations opérées par l'expert commis par les premiers juges que les doigts de M. X... présentent diverses lésions dermiques, des troubles de la sensibilité et une perte d'agilité ; que ces affections sont le résultat d'une exposition excessive aux rayons X qui est imputable au caractère défectueux des appareils fournis par l'administration, qui ne comportaient pas les dispositifs de protection indispensables ; que, par suite, le ministre de l'éducation nationale, en l'absence de faute de la victime, n'est pas fondé à soutenir par la voie du recours incident que les troubles dont souffre M. X... ne seraient pas imputables aux activités de service public accomplies par lui et qu'en mettant à la disposition du requérant un matériel dangereux, l'administration n'aurait pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Sur l'évaluation du préjdice subi par M. X... :

Considérant que les affections dont M. X... est atteint entraînent une incapacité permanente partielle non encore consolidée, dont le taux évalué par l'expert s'élève à 20 % au 20 juin 1985 ; que cette incapacité entraîne pour le praticien une certaine difficulté à utiliser correctement les appareils à manipulation délicate dont il se sert à son cabinet ; qu'elle ne saurait toutefois être la seule cause de la diminution d'activité dont fait état M. X... ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence, y compris les pertes de revenu, subis par le requérant, en portant à 100 000 F l'indemnité de 30 000 F accordé à ce titre par les premiers juges ;
Considérant, par ailleurs, qu'il résulte des constatations de l'expert que les affections précitées engendrent des souffrances physiques et un préjudice esthétique moyens, ainsi qu'un préjudice d'agrément ; qu'il y a lieu à ce titre de porter à 30 000 F l'indemnité de 20 000 F allouée par le tribunal administratif ;
Considérant ainsi que M. X... a droit au total à une indemnité de 130 000 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts de la somme de 130 000 F à compter de la date à laquelle sa demande d'indemnité du 4 avril 1982 a été reçue par l'administration ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 18 juin 1986 et le 8 octobre 1990 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : La somme de 50 000 F que l'Etat a été condamné à payer à M. X... par le jugement du tribunal administratifde Besançon du 29 janvier 1986, est portée à 130 000 F.
Article 2 : L'indemnité de 130 000 F portera intérêts au taux légal à compter de la date à laquelle l'administration a reçu la demande d'indemnité de M. X... du 4 avril 1982 ; les intérêts échus le 18 juin 1986 et le 8 octobre 1990 seront capitalisés à chacune de ces deux dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 29 janvier 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X... et le recours incident du ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 77105
Date de la décision : 18/02/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE POUR FAUTE - APPLICATION D'UN REGIME DE FAUTE SIMPLE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE L'ENSEIGNEMENT.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - TROUBLES DANS LES CONDITIONS D'EXISTENCE.


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation : CE, 18 fév. 1991, n° 77105
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: de la Ménardière
Rapporteur public ?: Hubert

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:77105.19910218
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