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19/07/1991 | FRANCE | N°73838

France | France, Conseil d'État, 10/ 4 ssr, 19 juillet 1991, 73838


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 décembre 1985 et 3 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Paul X..., demeurant 7 place des Peupliers à Le Rheu (35650) et M. Yvonnick LE FLOC'H, demeurant ... ; les requérants demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 octobre 1985 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 30 juillet 1984 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a autorisé l'Institut

de formation aux carrières sociales de Rennes à procéder à leur li...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 décembre 1985 et 3 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Paul X..., demeurant 7 place des Peupliers à Le Rheu (35650) et M. Yvonnick LE FLOC'H, demeurant ... ; les requérants demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 octobre 1985 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande dirigée contre la décision du 30 juillet 1984 par laquelle le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a autorisé l'Institut de formation aux carrières sociales de Rennes à procéder à leur licenciement ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Touvet, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. Jean-Paul X... et de M. Yvonnick Y... et de Me Choucroy, avocat de l'Institut de Formation aux Carrières Sociales (I.F.C.S.),
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'Institut de formation aux carrières sociales a demandé le 7 avril 1982 l'autorisation de licencier MM. X... et LE FLOC'H, délégués du personnel ; que par une décision de l'inspecteur du travail en date du 7 mai 1982 confirmée le 22 septembre 1982 par deux décisions du ministre du travail saisi d'un recours hiérarchique formé le 24 mai 1982, cette autorisation lui a été refusée ;
Considérant que par un jugement en date du 1er mars 1984, le tribunal administratif de Rennes a annulé les décisions susmentionnées du ministre du travail ; qu'à la suite de ce jugement, par une décision en date du 30 juillet 1984, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a autorisé l'Institut de formation aux carrières sociales à licencier MM. X... et LE FLOC'H ;
Considérant, d'une part, qu'à la suite de l'annulation des décisions du 22 septembre 1982, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale est, dans les circonstances de l'espèce, demeuré saisi de la demande présentée sur recours hiérarchique par l'Institut de formation aux carrières sociales ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, contre laquelle ils pouvaient présenter un recours gracieux, est entachée d'incompétence ;
Considérant, d'autre part, que dans leur requête enregistrée le 4 mai 1984, MM. X... etLE FLOC'H ont demandé l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 1er mars 1984 annulant les deux décisions du ministre du travail en date du 22 septembre 1982 en se prévalant de ce que les faits qui leur étaient reprochés ne caractérisaient pas un exercice anormal et gravement fautif du mandat dont ils étaient investis ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.420-22 du code du travail, les salariés légalement investis d'un mandat de délégué du personnel bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé en raison d'un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi de la demande d'autorisation de licenciement et, le cas échéant, au ministre saisi par voie du recours hiérarchique, de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir si les faits reprochés sont d'une gravité suffisante pour justifier cette mesure compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; que l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité pour refuser l'autorisation demandée sous réserve de ne pas porter une atteinte excessive aux intérêts de l'une ou l'autre partie en présence ;
Considérant qu'il est constant que M. X... et M. Y..., délégués du personnel, ont fait partie du groupe des salariés de l'Institut de formation aux carrières sociales qui a séquestré, le 30 mars 1982 à partir de 19 heures 30, les membres du conseil d'administration de cet organisme à l'issue d'une réunion qu'il venait de tenir et qui était consacrée à l'évolution des conflits collectifs en cours ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'ils ont, en leur qualité de délégué du personnel, contribué au déclenchement de cet acte de force qui a porté une grave atteinte à la liberté des membres du conseil d'administration et qui n'a pris fin qu'au moment où les forces de l'ordre sont intervenues, le même jour à 23 heures ; qu'ils ont pris une part personnelle à son déroulement sans que leur contribution au règlement de l'affaire et leur rôle modérateur pendant l'opération soit aucunement établi ; que ces agissements caractérisent un exercice anormal et gravement fautif du mandat dont ils étaient investis, de nature à justifier leur licenciement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. X... et LE FLOC'H ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ;
Article 1er : La requête de MM. X... et LE FLOC'H est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. X... et LE FLOC'H, à l'Institut de formation aux carrières sociales et au ministre des affaires sociales et de l'intégration.


Synthèse
Formation : 10/ 4 ssr
Numéro d'arrêt : 73838
Date de la décision : 19/07/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-02-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE - EXISTENCE D'UNE FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE


Références :

Code du travail L420-22


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 1991, n° 73838
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Touvet
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:73838.19910719
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