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17/02/1992 | FRANCE | N°74272

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 17 février 1992, 74272


Vu le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget enregistré le 19 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) à titre principal :
- annule le jugement du 15 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Lyon a accordé à la société Carrefour, dont le siège est zone d'aménagement concerté Saint-Guénault, ... (91002), décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société anonyme Givors-Investissements a été assujettie au titre de chacune des années 1977 et 1

978, ainsi que des intérêts de retard ajoutés à ces impositions ;
- rétablis...

Vu le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget enregistré le 19 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) à titre principal :
- annule le jugement du 15 juillet 1985 par lequel le tribunal administratif de Lyon a accordé à la société Carrefour, dont le siège est zone d'aménagement concerté Saint-Guénault, ... (91002), décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société anonyme Givors-Investissements a été assujettie au titre de chacune des années 1977 et 1978, ainsi que des intérêts de retard ajoutés à ces impositions ;
- rétablisse la société anonyme Givors-Investissements aux rôles de l'impôt sur les sociétés de chacune des années 1977 et 1978 à raison de l'intégralité des droits et intérêts de retard qui lui avaient été assignés ;
2°) à titre subsidiaire :
- réforme le jugement attaqué en tant que le tribunal administratif a prononcé la décharge entière des droits et pénalités assignés à la société anonyme Givors-Investissements ;
- rétablisse ladite société aux rôles de l'impôt sur les sociétés de chacune des années 1977 et 1978 à concurrence de droits et pénalités s'élevant, respectivement, à 38 916 F et 38 579 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige soumis au tribunal administratif :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, devant le tribunal administratif de Lyon, la société Carrefour a seulement demandé la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société anonyme Givors-Investissements, absorbée par elle, avait été assujettie au titre de chacune des années 1977 et 1978, à concurrence, respectivement, de 119 895 F et 620 420 F de droits simples, et des intérêts de retard correspondants ; que le ministre de l'économie, des finances et du budget est, par suite, fondé à soutenir qu'en prononçant la décharge entière de ces impositions, le tribunal administratif a, à concurrence de la différence, statué au-delà des conclusions dont il était saisi ;
Au fond :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Givors-Investissements a, par acte du 29 décembre 1975, acquis de la commune de Givors, un terrain situé dans une zone industrielle et sur lequel elle a, par la suite, fait édifier un "centre commercial" ; qu'ayant, dans cet acte, pris l'engagement de participer aux frais supportés par la commune afin de réaliser le raccordement à une autoroute de la voie de desserte de la zone industrielle et l'aménagement des voies d'accès à cette zone, la société Givors-Investissements a, d'une part, acquitté, au cours de l'exercice clos en 1976, une première participation, de 1 800 000 F, qu'elle a portée parmi ses éléments d'actif immobilisé et dont elle a pratiqué l'amortissement au titre de l'exercice clos en 1976 et de chacun des exercices clos en 1977 et en 1978, et, d'autre part, versé des "redevances" qui constituaient les premières annuités d'une seconde participation échelonnée sur dix années, et dont elle a pratiqué l'amortissement dans ses écritures ; que les impositions contestées procèdent de la réintégration des amortissements ainsi comptabilisés, l'administration ayant estimé que les participations en cause constituaient un élément du prix d'acquisition du terrain à elle cédé par la commune de Givors ;

Considérant qu'aux termes de l'acte passé, le 29 décembre 1975, entre la société anonyme Givors-Investissements et la commune de Givors, la société a accepté d'acquitter ces participations en contrepartie de l'engagement, pris par la commune, de "ne pas percevoir à son profit la taxe d'équipement qui pourrait être due ... pour les travaux de construction d'un centre commercial" sur le terrain cédé ; que le ministre de l'économie, des finances et du budget, qui s'est abstenu de saisir le comité consultatif prévu à l'article 1649 quinquies B du code général des impôts, applicable en l'espèce, n'établit pas que ces stipulations aient dissimulé la fixation d'un élément du prix de cession du terrain ; que les participations supportées, qui ne peuvent, non plus, être regardées comme le coût d'acquisition d'une clientèle, ont, par suite, à juste titre, été réputées par la société Givors-Investissements constitutives d'un élément du prix de revient du "centre commercial" édifié par elle, et, comme telles, sujettes à amortissement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et du budget est seulement fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas laissé à la charge de la société anonyme Givors-Investissements une fraction, de, respectivement, 38 916 F et 38 579 F, des droits et pénalités auxquels elle avait été supplémentairement assujettie, en matière d'impôt sur les sociétés, au titre de chacune des années 1977 et 1978 ;
Article 1er : La société anonyme Givors-Investissements est rétablie aux rôles de l'impôt sur les sociétés de chacune des années 1977 et 1978 à concurrence de droits et intérêts de retard s'élevant au total, respectivement, à 38 916 F et à 38 579 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 juillet 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre de l'économie, des finances et du budget est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué au budget et à la société Carrefour.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 74272
Date de la décision : 17/02/1992
Sens de l'arrêt : Doits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - ABUS DE DROIT - NOTION - Absence - Société ayant acquis d'une commune un terrain afin d'y bâtir un centre commercial - Participation de la société au coût des voies d'accès - versée à la commune constituant un élément du prix de revient du centre commercial et ne dissimulant pas le prix de cession du terrain.

19-01-03-03-02, 19-04-02-01-04-03 Société ayant acquis d'une commune un terrain situé dans une zone industrielle et sur lequel elle a, par la suite, fait édifier un "centre commercial". Ayant, dans cet acte, pris l'engagement de participer aux frais supportés par la commune afin de réaliser le raccordement à une autoroute de la voie de desserte de la zone industrielle et l'aménagement des voies d'accès à cette zone, la société a, d'une part, acquitté une première participation qu'elle a portée parmi ses éléments d'actif immobilisé et dont elle a pratiqué l'amortissement, et, d'autre part, versé des "redevances" qui constituaient les premières annuités d'une seconde participation échelonnée sur dix années, et dont elle a pratiqué l'amortissement dans ses écritures. Les impositions contestées procèdent de la réintégration des amortissements ainsi comptabilisés, l'administration ayant estimé que les participations en cause constituaient un élément du prix d'acquisition du terrain à elle cédé par la commune. Aux termes de l'acte passé entre la société et la commune, la société a accepté d'acquitter ces participations en contrepartie de l'engagement, pris par la commune, de "ne pas percevoir à son profit la taxe d'équipement qui pourrait être due ... pour les travaux de construction d'un centre commercial" sur le terrain cédé. Le ministre, qui s'est abstenu de saisir le comité consultatif des abus de droit, n'établit pas que ces stipulations aient dissimulé la fixation d'un élément du prix de cession du terrain. Les participations supportées, qui ne peuvent, non plus, être regardées comme le coût d'acquisition d'une clientèle, ont, par suite, à juste titre, été réputées par la société constitutives d'un élément du prix de revient du "centre commercial" édifié par elle, et, comme telles, sujettes à amortissement.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - AMORTISSEMENT - Calcul de l'amortissement - Base de calcul - Participation et redevance versées à une commune pour frais d'équipements collectifs - par une société ayant fait édifier un centre commercial - Element du prix de revient du centre commercial.


Références :

CGI 1649 quinquies B


Publications
Proposition de citation : CE, 17 fév. 1992, n° 74272
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Rougevin-Baville
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Ph. Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:74272.19920217
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