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13/05/1992 | FRANCE | N°85533

France | France, Conseil d'État, 10/ 8 ssr, 13 mai 1992, 85533


Vu la requête enregistrée le 4 mars 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Raymond X..., demeurant BP-101 à Papeete (Polynésie Française) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule la décision implicite par laquelle le Garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au remboursement des loyers qu'il a versés depuis son installation en Polynésie-Française ;
2° condamne l'Etat à lui verser une indemnité de 17 359 F avec les intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable ;
Vu les autres pièc

es du dossier ;
Vu le décret n° 67-1039 du 29 novembre 1967 ;
Vu le décret n°...

Vu la requête enregistrée le 4 mars 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Raymond X..., demeurant BP-101 à Papeete (Polynésie Française) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule la décision implicite par laquelle le Garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au remboursement des loyers qu'il a versés depuis son installation en Polynésie-Française ;
2° condamne l'Etat à lui verser une indemnité de 17 359 F avec les intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 67-1039 du 29 novembre 1967 ;
Vu le décret n° 85-1237 du 25 novembre 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Ronteix, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Raymond X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la requête de M. X... relatives à la période antérieure au 2 février 1986 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 67-1039 du 29 novembre 1967 portant réglementation du logement et de l'ameublement des magistrats et des fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer dans sa rédaction applicable au cours de la période ci-dessus définie : "Les magistrats et les fonctionnaires de l'Etat mariés ayant la qualité de chef de famille, veufs, divorcés ou célibataires, en poste dans les territoires d'outre-mer et dont la résidence habituelle est située hors du territoire dans lequel ils servent, sont logés et meublés par le service qui les emploie" ; qu'aux termes de l'article 6 dudit décret : "Au cas où, faute de logements et d'ameublements administratifs, les magistrats et les fonctionnaires de l'Etat visés à l'article 1er seraient obligés de se loger et de se meubler à leurs frais, ils seront admis, sur présentation de la quittance remise par le propriétaire au remboursement du loyer. Ce remboursement ne pourra toutefois pas excéder un montant maximum fixé par un arrêté conjoint du ministre d'Etat chargé de la fonction publique, du ministre d'Etat chargé des départements et territoires d'outre-mer et du ministre de l'économie et des finances. De ce remboursement sera déduite la retenue que devraient verser les intéressés s'ils étaient logés et meublés par leur service" ;
Considérant que l'intervention de l'arrêté interministériel fixant le montant maximum du remboursement n'est pas nécessaire à la mise en application des dispositions précitées qui ouvrent droit, au profit des fonctionnaires de l'Etat qui ne disposent pas d'un logement administratif, au remboursement des loyers acquittés par eux ; qu'ainsi la circonstance qu'aucun arrêté interministériel fixant le montant maximum du remboursement n'est, faute depublication régulière, opposable aux intéressés, n'est pas de nature à les priver pour la période antérieure au 2 février 1986, du droit au remboursement qu'ils tiennent des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 29 novembre 1967 ; qu'il suit de là que M. X... est fondé à demander pour cette période le remboursement des loyers qu'il a acquittés, après déduction de la retenue de 13 % prévue par l'alinéa 3 de l'article 6 du décret du 29 novembre 1967 ;
Sur les conclusions de la requête de M. X... relatives à la période située entre le 2 février 1986 et le 21 février 1986 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 novembre 1985 modifiant les dispositions de l'article 6 du décret du 29 novembre 1967, publié au Journal officiel de la Polynésie-Française le 1er février 1986 : "Au cas où, faute de logements et d'ameublements administratifs, les magistrats et les fonctionnaires de l'Etat visés à l'article 1er seraient obligés de se loger et de se meubler à leurs frais, ils seront admis, sur présentation de la quittance remise par le propriétaire, au remboursement du loyer dans les conditions définies à l'alinéa suivant. Le montant du remboursement ne pourra pas excéder la différence entre le loyer effectivement acquitté, d'une part, et, d'autre part, la retenue que devraient verser les intéressés s'ils étaient logés et meublés par leur service, augmentée le cas échéant de l'un ou l'autre ou des deux éléments suivants :
a) Une part égale à 25 % de la différence entre le montant de la retenue prévue à l'article 3 du décret susvisé et celui du loyer réel dans la limite du loyer plafond fixé par arrêté conjoint du ministre de l'économie, des finances et du budget, du ministre de l'intérieur et de la décentralisation et du secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de la fonction publique et des simplifications administratives ;
b) Une part égale à 75 % de la partie du loyer acquitté qui excède le loyer plafond prévu ci-dessus. Aucun remboursement ne sera accordé à ceux des intéressés qui refuseraient d'occuper le logement administratif mis à leur disposition" ;

Considérant que pour les motifs exposés plus haut, l'absence de publication régulière en Polynésie Française de l'arrêté interministériel du 6 janvier 1986 fixant le montant du loyer-plafond visé par les dispositions susmentionnées du décret du 25 novembre 1985 n'a pu, pour la période considérée, priver le requérant du bénéfice de ces dispositions applicables en dehors de l'intervention d'un loyer-plafond ; que M. X... est par suite fondé à demander pour cette période le remboursement des loyers qu'il a acquittés après déduction de la retenue prévue par l'alinéa 2 de l'article 6 du décret du 29 novembre 1967 modifié ;
Sur les conclusions de la requête relatives à la période postérieure au 21 février 1986 :
Considérant que par arrêté interministériel en date du 6 janvier 1986 publié au Journal officiel de la Polynésie-Française le 20 février 1986, le montant du loyer-plafond visé à l'article 6 du décret du 29 novembre 1967 modifié par le décret du 25 novembre 1985 a été fixé pour la Polynésie-Française à la somme de 3 400 F métropolitains ; que le taux de retenue visé au second alinéa de cet article 6 a été porté à 15 % de la rémunération ; que par suite, M. X... a droit à compter du 21 février 1986, après déduction de la retenue de 15 % de sa rémunération, au remboursement de la différence entre le loyer effectivement acquitté et la retenue qu'il devrait verser s'il était logé et meublé par son service, cette différence augmentée de 75 % de la partie du loyer acquitté qui excède le loyer plafond de 3 400 F ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par la décision attaquée, le Garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé à M. X... le remboursement des loyers qu'il a payés depuis septembre 1985, par le motif qu'en l'absence de publication de l'arrêté interministériel fixant le montant maximum des remboursements autorisés, M. X... ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'alinéa 1er de l'article 6 du décret n° 67-1039 précité modifiées par le décret du 25 novembre 1985 ;
Mais considérant que l'état du dossier ne permet pas de fixer la somme à laquelle peut prétendre M. X... au titre des périodes précitées ; qu'il y a lieu, dès lors, de le renvoyer devant le Garde des sceaux, ministre de la justice pour la liquidation de cette somme ;
Sur le remboursement des frais d'agence :
Considérant qu'aucune disposition ne prévoit le remboursement des frais d'agence de location immobilière ; que dès lors, M. X... ne saurait en demander le remboursement ;
Sur les intérêts compensatoires :
Considérant que M. X... n'invoque aucun préjudice distinct de celui réparé par les intérêts moratoires ; que, dès lors, la demande de M. X... tendant au versement d'une somme de 5 000 F à titre de dommages et intérêts ne saurait être accueillie ;
Sur les intérêts moratoires :
Considérant que M. X... a droit aux intérêts au taux légal à compter du jour de la réception par le Garde des sceaux, ministre de la justice, de la demande de remboursement des loyers qu'il lui a adressée le 5 août 1986 sur la fraction de la somme que l'Etat doit lui verser, représentant le montant des loyers échus et payés par lui à cette date, déduction faite de la retenue susrappelée et, pour le surplus après soustraction de la même retenue, à compter des dates successives auxquelles ces loyers ont été payés ;
Sur les intérêts des intérêts :

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée par M. X... le 30 septembre 1987 ; qu'à cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a lieu dès lors, par application de l'article 1154 du code civil, de faire droit à cette demande ;
Article 1er : La décision implicite de rejet opposée par le Garde des sceaux, ministre de la justice, à la demande d'indemnité de M. X... est annulée.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X... une indemnité correspondant, après déduction de la retenue prévue par l'article 6 du décret du 29 novembre 1967, au montant des loyers qu'il a acquittés depuis septembre 1985 M. X... est renvoyé devant le Garde des sceaux, ministre de la justice, pour la liquidation de cette indemnité.
Article 3 : La fraction de l'indemnité prévue à l'article précédent représentant le montant des loyers arrivés à échéance et acquittés par M. X... lorsque le Garde des sceaux, ministre de la justice a reçu la demande de remboursement des loyers qu'il lui a adressée le 5 août 1986, déduction faite de la retenue prévue par l'article 6 du décret n° 67-1039 du 29 novembre 1967, portera intérêts à compter de cette date. Le surplus de cette somme, représentant le montant des loyers acquittés par M. X... postérieurement à cette date, déduction faite de la retenue susrappelée, portera intérêts à compter des dates respectives auxquelles ces loyers auront été acquittés. Les intérêts échus le 30 septembre 1987 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmeintérêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au Garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 10/ 8 ssr
Numéro d'arrêt : 85533
Date de la décision : 13/05/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - INDEMNITES ET AVANTAGES DIVERS - INDEMNITES ALLOUEES AUX FONCTIONNAIRES SERVANT OUTRE-MER.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE DANS LES DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE AUX FONCTIONNAIRES SERVANT DANS LES DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER - REMUNERATION - CORRECTIONS ET MAJORATIONS DE REMUNERATIONS.


Références :

Arrêté du 06 janvier 1986
Code civil
Décret 67-1039 du 29 novembre 1967 art. 1, art. 6
Décret 85-1237 du 25 novembre 1985 art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 13 mai. 1992, n° 85533
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Ronteix
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:85533.19920513
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