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23/09/1992 | FRANCE | N°43752

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 23 septembre 1992, 43752


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 8 juillet 1982 et 15 septembre 1982, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES (S.G.E.), dont le siège social est ... ; la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mai 1982, notifié le même jour, déclarant irrecevable sa requête tendant au paiement d'une somme de 1 057 606,25 F et d'une somme de 50 000 F outre les intérêts moratoires et la capitalisation desdits int

érêts, en règlement des comptes d'un marché passé avec l'hôpital ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 8 juillet 1982 et 15 septembre 1982, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES (S.G.E.), dont le siège social est ... ; la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mai 1982, notifié le même jour, déclarant irrecevable sa requête tendant au paiement d'une somme de 1 057 606,25 F et d'une somme de 50 000 F outre les intérêts moratoires et la capitalisation desdits intérêts, en règlement des comptes d'un marché passé avec l'hôpital rural de Marennes ;
2°) condamne ledit hôpital rural de Marennes à lui verser les sommes précitées, outre leurs intérêts et la capitalisation desdits intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviose an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Roger-Lacan, Auditeur,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES (S.G.E.) et de Me Garaud, avocat de l'hôpital rural de Marennes,
- les conclusions de M. Kessler, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le tribunal administratif de Poitiers à la demande de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES :
Considérant qu'aux termes de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales, approuvé par le décret 76-87 du 21 janvier 1976, et applicable au marché dont s'agit : "50-22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. 50-23. La décision à prendre ... appartient au maître de l'ouvrage. 50-31. Si dans le délai de 3 mois à partir de la date de réception ... du mémoire de l'entrepreneur mentionné au ... présent article, aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur ... (celui-ci) peut saisir le tribunal administratif compétent. 50-32. Si dans le délai de 6 mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article ... l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable" ;
Considérant que la forclusion instituée par l'article 50-32 ci-dessus mentionné ne peut être opposée que si une décision du maître de l'ouvrage a été notifiée à l'entrepreneur et qu'aucune autre disposition du cahier des clauses administratives générales précité n'a prévu une telle forclusion lorsque le maître de l'ouvrage s'abstient de répondre à une réclamation, l'entrepreneur disposant en pareil cas de la faculté de saisir le juge du contrat après l'expiration du délai de 3 mois prévu par l'article 50-31 précité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES (S.G.E.) a saisi l'hôpital rural de Marennes, maître de l'ouvrage, d'une réclamation datée du 7 juillet 1978 que le directeur de cet hôpital a reconnu avoir reçue le 5 octobre 1978 ; qu'il est constant que, sur cette réclamation, aucune décision du maître de l'ouvrage n'a été notifiée à l'entrepreneur ; que, dès lors, celui-ci est fondé à soutenir que c'est à tort que la forclusion instituée par l'article 50-32 précité du cahier des clauses administratives générales, opposée par l'hôpital rural de Marennes à sa demande contentieuse, a été retenue par le tribunal administratif pour rejeter celle-ci comme irrecevable ; qu'il y a donc lieu d'annuler le jugement attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES devant le tribunal administratif :
Considérant qu'aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales, approuvé par le décret 76-87 du 21 janvier 1967 modifié par le décret 76-625 du 5 juillet 1976 et applicable au marché : "13-31. Après l'achèvement des travaux, l'entrepreneur ... dresse le projet du décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre du fait de l'exécution du marché dans son ensemble, les évaluations étant faites en tenant compte des prestations réellement exécutées ... 13-32. Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux ... 13-34. Le projet de décompte final établi par l'entrepreneur est accepté ou rectifié par le maître d'oeuvre ; il devient alors le décompte final. 13-42. Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après : quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ... 13-44. L'entrepreneur doit, dans un délai de quarante-cinq jours compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer ... Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours indiqué ci-dessus. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 ..." ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le projet de décompte final établi par l'entrepreneur ne peut être considéré comme arrêtant les comptes du marché que s'il est vérifié par le maître d'oeuvre et arrêté par le maître de l'ouvrage ; qu'aucune des dispositions du cahier des clauses administratives générales en cause ne prévoit, comme le soutient la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES, une acceptation tacite du projet de décompte par le silence du maître de l'ouvrage ; qu'il appartient à l'entrepreneur, au cas où le projet de décompte qu'il a soumis au maître d'oeuvre n'a pas été arrêté par la personne responsable du marché dans les conditions et délais fixés par l'article 13 du cahier des clauses administratives générales précité, de saisir le juge du contrat aux fins d'établissement de ce décompte et le cas échéant de règlement contentieux des réclamations formulées antérieurement et sur lesquelles il n'aurait pas été statué ;
Considérant que la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES a présenté le projet de décompte final de son marché à l'architecte et au maître de l'ouvrage le 9 août 1979 par lettre recommandée avec accusé de réception ; qu'il est constant qu'aucun décompte n'a été notifié à ladite société, dans les formes et délais prévus par l'article 13 précité ; que, par suite, la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES, qui ne saurait se prévaloir d'aucune acceptation tacite de son projet de décompte du 9 août 1979 n'est pas fondée à prétendre que les sommes qu'elle y avait portées lui sont dues ; que, dès lors, les conclusions de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES tendant à ce que l'hôpital rural de Marennes lui verse sur le seul fondement de cette prétendue acceptation tacite, la somme de 1 057 606,25 F représentant le solde de son marché, doivent être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mai 1982 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête susvisée dela SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES et la demande présentée par celle-ci devant le tribunal administratif de Poitiers sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES, à l'hôpital rural de Marennes et au ministre de la santé et de l'action humanitaire.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 43752
Date de la décision : 23/09/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION FINANCIERE DU CONTRAT - REGLEMENT DES MARCHES - DECOMPTE GENERAL ET DEFINITIF.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - RECEVABILITE.


Références :

Décret 76-625 du 05 juillet 1976
Décret 76-87 du 21 janvier 1976


Publications
Proposition de citation : CE, 23 sep. 1992, n° 43752
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Roger-Lacan
Rapporteur public ?: Kessler

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:43752.19920923
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