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28/12/1992 | FRANCE | N°66755

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 28 décembre 1992, 66755


Vu 1°) sous le n° 66 755 la requête, enregistrée le 11 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE D'AYEN (Corrèze), représentée par son maire en exercice, dûment habilité par délibération du conseil municipal ; COMMUNE D'AYEN demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 22 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X... une somme de 90 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 1983 à titre d'indemnité pour les désordres survenus à son habitatio

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Vu 1°) sous le n° 66 755 la requête, enregistrée le 11 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE D'AYEN (Corrèze), représentée par son maire en exercice, dûment habilité par délibération du conseil municipal ; COMMUNE D'AYEN demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 22 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X... une somme de 90 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 1983 à titre d'indemnité pour les désordres survenus à son habitation à l'occasion de l'exécution de travaux publics, ainsi qu'à supporter la moitié des frais d'expertise en référé taxés à la somme de 5 267,80 F et a rejeté sa requête tendant à la condamnation de M. X... et subsidiairement des entreprises Cochery et Lefebvre à lui payer une somme de 35 289,43 F représentant les dépenses engagées par la commune pour assurer l'étaiement de la maison de M. X..., somme augmentée de 500 F par mois à compter du 1er août 1982 correspondant au montant mensuel du loyer de M. X... ;
- rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Limoges ;

Vu, 2°) sous le n° 69 048 la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 29 mai 1985, présentée pour M. X..., demeurant à Ayen, (19310) Le Bourg ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement en date du 22 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Limoges a limité à 180 000 F avec intérêts de droit l'indemnité mise à la charge de la commune d'Ayen et du département de la Corrèze en réparation des dommages causés à son immeuble par les travaux de réfection du chemin départemental 39 ;
- fixe à 300 000 F l'indemnité qui lui est due au titre de l'immeuble et à 150 000 F celle relative au trouble dans les conditions d'existence ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stahl, Auditeur,
- les observations de Me Cossa, avocat de la COMMUNE D'AYEN, de la S.C.P. Boré, Xavier, avocat du département de la Corrèze, de la S.C.P. Coutard, Mayer, avocat de la société Cochery, de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de la société Claude Lefebvre et de Me Gauzès, avocat de M. René X...

- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que la requête de la COMMUNE D'AYEN et la requête de M. X... sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 22 janvier 1985 ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seul décision ;
Sur la requête de M. X... :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 53-3 du décret du 30 juillet 1963 modifié par le décret du 16 janvier 1981 : "Lorsque la requête ou le recours mentionne l'intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. Si ce délai n'est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s'être désisté à la date d'expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d'Etat donne acte de ce désistement" ;
Considérant que M. X..., par une requête sommaire enregistrée le 29 mai 1985 a exprimé l'intention de produire un mémoire complémentaire ; qu'à la date du 30 septembre 1985 ce mémoire n'avait pas été déposé au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et qu'ainsi le délai de quatre mois imparti pour cette production par les dispositions précitées de l'article 53-3 du décret du 30 juillet 1963 modifié était expiré ; que M. X... doit par suite être réputé désisté de sa requête ; qu'il y a lieu de donner acte de ce désistement ;
Sur la requête de la COMMUNE D'AYEN :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un marché signé le 16 mars 1982, les entreprises Lefebvre et Cochery se sont engagées solidairement à exécuter pour le compte de la COMMUNE D'AYEN et sous la maîtrise d'oeuvre de la direction départementale de l'équipement de la Corrèze, des travaux sur le chemin départemental n° 39 comportant l'installation de canalisations d'eaux pluviales et la pose de bordures de trottoirs au droit de la maison de M. X... ; que ces travaux, exécutés en juillet 1982, ont nécessité le creusement, par l'entreprise Lefebvre, d'une tranchée au droit de la maison de M. X... ; que, simultanément le département de la Corrèze a confié à l'entreprise Cochery, sous la conduite de la direction départementale de l'équipement, la réfection de la chaussée du C.D. 39 dans sa partie située devant la maison de M. X..., avec utilisation d'un cylindre vibrant pour le compactage de la chaussée ; qu'enfin, devant la carence de M. X... à faire effectuer des travaux de consolidation de l'immeuble qui lui avaient été prescrits par un arrêté de péril en date du 29 juillet 1982, la COMMUNE D'AYEN a fait effectuer des travaux d'étaiement de l'immeuble pour un montant de 35 289,43 F ;
Considérant qu'en l'absence d'appel du département de la Corrèze formé contre le jugement attaqué par lequel le tribunal administratif de Limoges a statué à la fois sur la demande de la ville dirigée contre M. X... et les deux entreprises et sur la demande de M. X... dirigée contre le département, la ville et les entreprises Lefebvre et Cochery, le litige soumis au juge d'appel, tant par la requête de la ville que par les conclusions des entreprises Lefebvre et Cochery porte exclusivement sur la réparation des dommages imputés aux travaux exécutés par la COMMUNE D'AYEN ou pour son compte ;
En ce qui concerne les travaux d'assainissement exécutés pour le compte de la COMMUNE D'AYEN :
Sur la responsabilité de la ville envers M. X... :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les dommages subis par l'immeuble de M. X... sont pour partie imputables au creusement d'une tranchée à proximité dudit immeuble ; qu'ainsi le lien de causalité entre les dommages et l'exécution des travaux exécutés pour le compte de la ville est établi ; que, de ce fait, la responsabilité de la ville est engagée à l'égard de M. X... ; que cependant, eu égard à la circonstance que des travaux de réfection ont été réalisés à la même époque sur le chemin départemental n° 39, il y a lieu en l'espèce de limiter à 50 % des dommages subis par l'immeuble ceux qui ont été provoqués par l'exécution des travaux exécutés pour le compte de la ville ;
Considérant, en second lieu, qu'il est établi que la situation de la maison de M. X..., bâtie sur un sol argileux sur un terrain en pente, les vices propres et la vétusté de cette maison sont de nature à exonérer partiellement de sa responsabilité la COMMUNE D'AYEN ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en laissant à la charge de M. X... la moitié des conséquences dommageables des travaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'AYEN est fondée à soutenir que sa responsabilité envers M. X... doit être limitée au quart des conséquences dommageables des travaux ;
Sur l'évaluation du préjudice subi par M. X... :
Considérant, d'une part, que la valeur vénale de l'immeuble de M. X... s'élevait à 130 000 F et que, par suite, l'indemnité à laquelle il peut prétendre pour les dommages immobiliers qu'il a subis ne peut être calculée sur une base supérieure à cette valeur ;

Considérant, d'autre part, que M. X... n'a présenté devant le tribunal administratif aucune demande d'indemnité au titre des troubles dans ses conditions d'existence ; que, par suite, la COMMUNE D'AYEN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a fixé à 50 000 F le préjudice qu'il aurait subi à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'AYEN est fondée à soutenir que la somme qu'elle a été condamnée à verser à M. X... pour les préjudices que lui ont causés les travaux d'assainissement exécutés pour son compte doit être ramenée à 32 500 F ;
Sur la garantie de la COMMUNE D'AYEN par l'entreprise Lefebvre :
Considérant qu'il résulte de l'article 35 du cahier des clauses administratives générales, auquel se réfère le marché conclu entre la COMMUNE D'AYEN et l'entreprise Lefebvre, que "l'entrepreneur a, à l'égard du maître de l'ouvrage, la responsabilité pécuniaire des dommages aux personnes et aux biens causés par la conduite de travaux ou les modalités de leur exécution, sauf s'il établit que cette conduite ou ces modalités résultent nécessairement de stipulations du marché ou de prescriptions d'ordres de service" ; que cette preuve n'est pas rapportée en l'espèce ; que, dès lors, la ville est fondée à demander que l'entreprise Lefebvre soit solidairement condamnée à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre au profit de M. X... ;
En ce qui concerne les frais d'étaiement de l'immeuble de M. X... :

Considérant que le maire de la COMMUNE D'AYEN, par un arrêté en date du 29 juillet 1982, a mis en demeure M. X... de prendre toutes mesures nécessaires pour faire cesser les risques créés par l'état de son immeuble et mettre fin à tout péril, faute de quoi il y serait procédé d'office et à ses frais ; que, devant la carence de M. X... à y procéder, les travaux d'étaiement de l'immeuble s'élevant à 35 289,43 F, ont été exécutés par la commune ; que celle-ci n'est pas fondée à demander que ces dépenses, dont le remboursement incombe au propriétaire de l'immeuble, soient mises à la charge des entreprises Lefebvre et Cochery ni, qu'elles soient, dans le cadre du présent litige, compensées avec les sommes dues par la ville à M. X... au titre d'un dommage lié à l'exécution d'un marché de travaux publics ; que la COMMUNE D'AYEN n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté ses conclusions relatives au remboursement de frais d'étaiement ;
Sur les appels incidents des entreprises Lefebvre et Cochery :
Considérant, d'une part, que l'entreprise Lefebvre n'est pas fondée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à demander à être déchargée de toutes garanties envers la commune ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les entreprises Lefebvre et Cochery sont fondées à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a mis à la charge de chacune d'elles le remboursement à la ville d'une somme de 8 822 F correspondant au quart des frais d'étaiement de l'immeuble de M. X... exposés par la commune ;
Sur les frais d'expertise :

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire et indépendamment des frais mis à la charge du département de la Corrèze par le jugement devenu définitif sur ce point, il y a lieu de mettre les frais d'expertise à la charge de M. X... pour la moitié et à la charge de la COMMUNE D'AYEN pour un quart ;
Article 1er : Il est donné acte du désistement de la requête de M. X....
Article 2 : L'indemnité due à M. X... par la COMMUNE D'AYEN est ramenée à 32 500 F.
Article 3 : L'entreprise Lefebvre est condamnée à garantir la COMMUNE D'AYEN du paiement de cette indemnité.
Article 4 : Les entreprises Lefebvre et Cochery sont déchargées de la condamnation prononcée à leur encontre par le jugement attaqué portant sur le remboursement à la COMMUNE D'AYEN d'une somme de 8 822F pour chacune d'elles.
Article 5 : Les frais d'expertise seront supportés pour la moitié par M. X... et pour un quart par la COMMUNE D'AYEN.
Article 6 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 22 janvier 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE D'AYEN et des appels incidents des entreprises Lefebvre et Cochery est rejeté.
Article 8 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'AYEN, à l'entreprise Lefebvre, à l'entreprise Cochery, à M. Y... au ministre de l'équipement, du logement et des transports.


Synthèse
Formation : 10/ 7 ssr
Numéro d'arrêt : 66755
Date de la décision : 28/12/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - POLICE MUNICIPALE - POLICE DE LA SECURITE - IMMEUBLES MENACANT RUINE - PROCEDURE DE PERIL.

PROCEDURE - INCIDENTS - DESISTEMENT - DESISTEMENT D'OFFICE (ARTICLE 53-3 DU DECRET DU 30 JUILLET 1963 MODIFIE).

TRAVAUX PUBLICS - DIFFERENTES CATEGORIES DE DOMMAGES - DOMMAGES CREES PAR L'EXECUTION DES TRAVAUX PUBLICS - TRAVAUX PUBLICS DE VOIRIE.


Références :

Décret 63-766 du 30 juillet 1963 art. 53-3
Décret 81-29 du 16 janvier 1981


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 1992, n° 66755
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Stahl
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:66755.19921228
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