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08/03/1993 | FRANCE | N°81729

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 08 mars 1993, 81729


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 septembre 1986 et 5 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société T.A.G. (Transports A. Guidez), dont le siège est situé ... ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un jugement du tribunal administratif de Lille, en date du 14 mai 1986, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision du ministre des transports, en date du 20 septembre 1985, en tant qu'elle a annulé l'autorisation de licencier M. Y... Guidez accordée le 26 mars 1985

par l'inspecteur du travail ;
2°) d'annuler la décision ministériell...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 septembre 1986 et 5 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société T.A.G. (Transports A. Guidez), dont le siège est situé ... ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un jugement du tribunal administratif de Lille, en date du 14 mai 1986, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision du ministre des transports, en date du 20 septembre 1985, en tant qu'elle a annulé l'autorisation de licencier M. Y... Guidez accordée le 26 mars 1985 par l'inspecteur du travail ;
2°) d'annuler la décision ministérielle du 20 septembre 1985 précitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Auditeur,
- les observations de Me Foussard, avocat de la société T.A.G. (Transports A. Guidel),
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général de droit n'obligeait le secrétaire d'Etat aux transports, à informer la société requérante du dépôt d'un recours hiérarchique à l'encontre de l'autorisation de licencier M. Y... Guidez, salarié protégé, accordée le 26 mars 1985, ou à lui en communiquer le contenu ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs de décisions administratives individuelles qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui retirent ou abrogent une décision créatrice de droits" et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ;
Considérant que la décision, en date du 20 septembre 1985, par laquelle le secrétaire d'Etat aux transports a annulé la décision de l'inspecteur du travail (transports) accordant l'autorisation de licencier M. Y... Guidez, abrogeait une décision créatrice de droits au profit de la société T.A.G. (Transports A. Guidel) et devait, par suite, être motivée ; qu'il ressort des termes mêmes de cette décision que le ministre, en indiquant les circonstances de droit et de fait sur lesquelles il se fondait, a satisfait à cette exigence ;

Considérant, e troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 436-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ou d'un représentant syndical prévu à l'article L. 433-1 est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" et qu'en vertu de l'article R. 436-4 du même code : "Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur, soit sur le recours de l'intéressé ou de l'employeur, soit de sa propre initiative, et, dans ce cas, dans un délai de quatre mois" ; que les mêmes garanties sont accordées aux délégués du personnel par l'article L. 425-1 dudit code, et aux délégués syndicaux par l'article L. 412-18 ; que, par ailleurs, aux termes de l'article L. 611-4 du code susvisé : "Dans les établissements soumis au contrôle technique des ministères chargés des travaux publics, des transprots et du tourisme, les attributions des inspecteurs du travail et de la main-d'oeuvre sont confiées aux fonctionnaires relevant de ce département, lesquels sont placés à cet effet sous l'autorité du ministre chargé du travail, sauf en ce qui concerne ... les entreprises de transports publics par automobiles" ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions syndicales ou de représentation bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi, et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... Guidez a laissé le camion dont il était le conducteur chez un client, en Belgique, le 22 février 1985, après avoir accompli les formalités de dédouanement, alors que ce véhicule était en panne, et qu'il en avait informé l'entreprise ; que, dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas établi que M. X... ait manqué, auparavant, à ses obligations professionnelles, les faits reprochés à M. Y... Guidez ne présentaient pas un caractère suffisant de gravité pour justifier son licenciement ; qu'il résulte du dossier qu'en retenant ce seul motif, le ministre des transports aurait annulé l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail ;
Considérant que de tout ce qui précède, il résulte que la société T.A.G. (Transports A. Guidel) n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, en date du 14 mai 1986, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête susvisée de la société T.A.G. (Transports A. Guidel) est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société T.A.G. (Transports A. Guidel), à M. Y... Guidez et au ministre de l'équipement, du logement et des transports.


Synthèse
Formation : 10/ 7 ssr
Numéro d'arrêt : 81729
Date de la décision : 08/03/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-02-02 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE - ABSENCE DE FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE


Références :

Code du travail L436-1, R436-4, L425-1, L412-18, L611-4
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1, art. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 08 mar. 1993, n° 81729
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Simon-Michel
Rapporteur public ?: Scanvic

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:81729.19930308
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