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11/06/1993 | FRANCE | N°121424

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 11 juin 1993, 121424


Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR enregistré le 30 novembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 11 octobre 1990 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté en date du 5 janvier 1988 par lequel il avait enjoint à Mme X... de quitter le territoire français ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre...

Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR enregistré le 30 novembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 11 octobre 1990 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté en date du 5 janvier 1988 par lequel il avait enjoint à Mme X... de quitter le territoire français ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi du 9 septembre 1986 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Errera, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lesourd, Baudin, avocat de Mme Afida X...,
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : "(...) l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace pour l'ordre public ..." ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à la gravité des faits qui étaient reprochés à Mme X..., qui s'est rendue coupable en 1980 de meurtre avec préméditation et a été condamnée à ce titre à quinze ans de réclusion criminelle, le ministre de l'intérieur a commis une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le ministre de l'intérieur pour annuler l'arrêté du 5 janvier 1988 prononçant l'expulsion de Mme X... du territoire français ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme X... ;
Considérant que l'arrêté du MINISTRE DE L'INTERIEUR en date du 5 janvier 1988 énonce les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision d'expulsion de Mme X... ; qu'ainsi, il satisfait aux exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant que si les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient à elles seules justifier légalement une mesure d'expulsion, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre n'ait pas examiné l'ensemble des éléments relatifs au comportement de Mme X... afin de déterminer si, à la date de l'arrêté attaqué, la présence de la requérante sur le territoire français constituait une menace pour l'ordre public ; qu'ainsi, le moyen tiré d'une erreur de droit manque en fait ;

Considérant que si Mme X..., ressortissante marocaine, est mariée et mère de trois enfants nés en France, dans les circonstances de l'espèce, et alors même que la requérante s'est bien conduite pendant sa détention, la mesure d'expulsion prise à son encontre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté en date du 5 janvier 1988 par lequel il a enjoint à Mme X... de quitter le territoire français ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 11 octobre 1990 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et à Mme X....


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 121424
Date de la décision : 11/06/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETRANGERS - REFUGIES - APATRIDES - ETRANGERS - QUESTIONS COMMUNES - EXPULSION.

FAMILLE - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE (ARTICLE 8 DE LA CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES).

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES ETRANGERS - EXPULSION - LEGALITE DES MOTIFS RETENUS.


Références :

Convention européenne du 04 novembre 1950 droits de l'homme art. 8
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1, art. 3
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 23


Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 1993, n° 121424
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Errera
Rapporteur public ?: Vigouroux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:121424.19930611
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