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07/07/1993 | FRANCE | N°92563

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 07 juillet 1993, 92563


Vu la requête sommaire ainsi que les mémoires complémentaires, enregistrés les 29 octobre, 12 novembre, 5 décembre 1987, 14 janvier 1988, 21 janvier 1988, 24 mai 1988 et 18 juillet 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y..., demeurant au foyer de la Noue, 16 place Bertie X... à Montreuil (93100) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 octobre 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 24 mai 1985 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la

formation professionnelle a confirmé la décision du 14 décembr...

Vu la requête sommaire ainsi que les mémoires complémentaires, enregistrés les 29 octobre, 12 novembre, 5 décembre 1987, 14 janvier 1988, 21 janvier 1988, 24 mai 1988 et 18 juillet 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Y..., demeurant au foyer de la Noue, 16 place Bertie X... à Montreuil (93100) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 octobre 1987 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 24 mai 1985 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a confirmé la décision du 14 décembre 1984 de l'inspecteur du travail de l'Essonne autorisant son licenciement par l'Etablissement national Antoine Koenigswarter ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aguila, Maître des requêtes,
- les observations de Me Hennuyer, avocat de M. Bachir Y...,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 421-1 du code du travail : "Le personnel élit des délégués dans tous les établissements industriels, commerciaux ou agricoles, les offices publics et ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles, les syndicats professionnels, les sociétés mutualistes, les organismes de sécurité sociale, à l'exception de ceux qui ont le caractère d'établissement public administratif, et les associations ou tout organisme de droit privé, quels que soient leur forme et leur objet, où sont occupés au moins onze salariés ..." ; qu'aux termes du sixième alinéa du même article : " ... Les dispositions du présent titre sont applicables aux établissements publics à caractère industriel et commercial et aux établissements publics déterminés par décret qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial, lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé. Toutefois, ces dispositions peuvent, compte tenu des caractères particuliers de certains de ces établissements et des organismes de représentation du personnel éventuellement existants, faire l'objet d'adaptations sous réserve d'assurer les mêmes garanties aux salariés de ces établissements. Ces adaptations résultent de décrets en Conseil d'Etat" ; qu'aux termes de l'article L. 425-1 du même code : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne son avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne pet intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ..." ; qu'aux termes de l'avant-dernier alinéa du même article, "cette procédure est également applicable aux délégués du personnel institués par voie conventionnelle ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 24 mai 1985, à laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a confirmé la décision du 14 décembre 1984 de l'inspecteur du travail de l' Essonne autorisant l'Etablissement national Antoine Koenigswarter à licencier pour motif disciplinaire M. Y..., délégué du personnel, les salariés de cette institution, établissement public à caractère administratif de l'Etat ne figurant pas au nombre de ceux désignés par les décrets prévus au sixième alinéa de l'article L. 421-1 du code du travail précité, ne pouvaient être regardés comme entrant dans le champ d'application du premier alinéa de cet article ni de l'article L. 421-5 précité ;
Considérant que si l'article 23 de la loi du 17 janvier 1986 dispose que : "Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 36-34 du 18 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les emplois de l'Etablissement national de bienfaisance Antoine Koenigswarter ne sont pas occupés par des personnels ayant le statut de fonctionnaire. La situation de ces personnels est déterminée par un contrat de travail et des conventions collectives dans les conditions définies aux titres II et III du livre 1er du code du travail", ces dispositions n'ont d'effet que pour l'avenir en l'absence de toute indication leur conférant un effet rétroactif ou interprétatif ;
Considérant, en second lieu, que si l'article L. 425-1 précité étend aux délégués du personnel institués par voie conventionnelle les dispositions protectrices en cas de licenciement qui s'appliquent aux délégués du personnel dont la désignation est imposée par le code du travail, cette extension ne concerne que les délégués salariés d'établissements entrant dans le champ d'application de l'article L. 421-1 et ne peut concerner des délégués du personnel institués par voie conventionnelle au sein d'un établissement public administratif tel que l'établissement Koenigswarter ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'à la date des décisions précitées de l'inspecteur du travail et du ministre attaquées par M. Y..., ces décisions étaient entachées d'incompétence ; que M. Y... était recevable et fondé à en demander l'annulation ; que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté comme irrecevable sa demande dirigée contre lesdites décisions ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête de M. Y..., les décisions précitées du ministre et de l'inspecteur du travail sont entachées d'incompétence et doivent être annulées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 2 octobre 1987 et les décisions du 14 décembre 1984 de l'inspecteur du travail de l'Essonne et du 24 mai 1985 du ministre dutravail, de l'emploi et de la formation professionnelle autorisant lelicenciement de M. Y... sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à l'Etablissement national Antoine Koenigswarter et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 92563
Date de la décision : 07/07/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - INSTITUTIONS REPRESENTATIVES DU PERSONNEL - DELEGUES DU PERSONNEL.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - BENEFICE DE LA PROTECTION - DELEGUES DU PERSONNEL.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE.


Références :

Code du travail L421-1, L425-1, L421-5
Loi 86-76 du 17 janvier 1986 art. 23


Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 1993, n° 92563
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Aguila
Rapporteur public ?: Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:92563.19930707
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