Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 6 novembre 1992, présentée par M. KOTTO X..., demeurant ... ; M. KOTTO X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 septembre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 2 septembre 1992 par lequel le préfet de police de Paris a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris n'a pas eu connaissance des données de fait nécessaires au jugement du recours porté devant lui ; que, par ailleurs, les conditions de notification de sa décision sont en tout état de cause sans incidence sur la régularité de celle-ci ; que le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et notamment des dispositions des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 selon lesquelles les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; que M. KOTTO X... n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait intervenu sur une procédure irrégulière faute par le préfet d'avoir respecté la procédure instituée par l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 ;
Considérant que l'arrêté préfectoral attaqué, qui expose les éléments de droit et de fait qui sont le fondement de la mesure de reconduite, est suffisamment motivé ;
Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. KOTTO X..., ressortissant camerounais, s'est maintenu sur le territoire pendant plus d'un mois à compter de la notification de la décision par laquelle le préfet de police de Paris lui a refusé le renouvellement de la carte de séjour temporaire qu'il détenait en qualité d'étudiant et l'a invité à quitter le territoire ; que, par suite, il se trouvait dans le cas, prévu à l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que le préfet de police n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que M. KOTTO X..., qui a échoué deux années de suite au baccalauréat, été inscrit trois années consécutives en première année de capacité de droit et n'a, finalement, obtenu aucun diplôme depuis son arrivée en France en 1983, ne pouvait être regardé comme ayant la qualité d'étudiant ;
Considérant que M. KOTTO X... ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui sont inapplicables au contentieux de la reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ne résulte pas de la circonstance que M. KOTTO X... est marié et que son épouse se trouve en France, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, que l'arrêté discuté porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, aucun droit protégé par la convention européenne des droits de l'homme n'ayant été méconnu, le requérant ne saurait utilement se prévaloir de l'article 13 de ladite convention ;
Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que le préfet de police a fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle du requérant ;
Considérant que le détournement de procédure allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. KOTTO X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête ;
Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit condamné à payer à M. KOTTO X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. KOTTO X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. KOTTO X..., au préfet de police de Paris et au ministre d'Etat, ministrede l'intérieur et de l'aménagement du territoire.