Vu la requête enregistrée le 24 février 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Marthe X..., demeurant au lieudit "Le Poirier" à Barenton (50720) ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 12 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 6 mars 1989 par laquelle le préfet de la Manche lui a refusé le bénéfice de l'indemnité versée aux producteurs qui s'engagent à abandonner définitivement la production laitière en application du décret n° 87-278 du 21 avril 1987 ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité en date du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne ;
Vu le protocole additionnel à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 16 décembre 1991, notamment son article 1er ;
Vu le règlement n° 857/84 du Conseil des Communautés européennes du 31 mars 1984 ;
Vu le règlement n° 1371/84 de la Commission des Communautés européennes du 16 mai 1984 ;
Vu le décret n° 87-278 du 21 avril 1987 modifié par le décret n° 87-1151 du 24 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Daussun, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Roger, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant que pour refuser à Mme X..., par sa décision du 6 mars 1989, le bénéfice de l'indemnité de cessation d'activité laitière instituée par le décret susvisé du 21 avril 1987 au titre des terres qu'elle exploitait en fermage à Barenton, le préfet de la Manche s'est fondé sur ce que les terres en cause avaient fait l'objet d'un congé ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris cette décision après que les propriétaires de l'exploitation lui aient fait savoir par une lettre du 7 décembre 1988 qu'ils avaient donné congé à Mme X... en raison de son âge et lui aient transmis un document portant la date du 15 novembre 1988 d'après lequel Mme X... aurait elle-même pris l'initiative de résilier le bail ; que ce dernier document dont la partie portant la signature de Mme X... ne comportait pas de date n'établissait ni la réalité d'un congé donné par les bailleurs ni celle d'une résiliation par le preneur ; que le motif sur lequel repose la décision attaquée est, dès lors, entaché d'inexactitude matérielle ; qu'il suit de là que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 12 novembre 1991 et la décision du préfet de la Manche en date du 6 mars 1989 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Marthe X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.