Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 1993 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la S.A. DYNAMIS, dont le siège est ..., représentée par ses représentants légaux ; la société demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 septembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'autorisation accordée par le ministre délégué à la santé à la société Clinique Lamarque en vue de la création d'un centre de réadaptation fonctionnelle de 60 lits à Saint-Denis de la Réunion ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette autorisation ;
3°) condamne l'Etat et la clinique Lamarque à lui verser la somme de 30 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991, notamment son article 34 ;
Vu la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 ;
Vu le décret n° 88-460 du 22 avril 1988 ;
Vu l'arrêté du 9 décembre 1988 relatif à la fixation d'un indice de besoins pour les moyens d'hospitalisation en moyen séjour et en réadaptation fonctionnelle ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-984 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de L'Hermite, Auditeur,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de la S.A. DYNAMIS et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la S.A. Clinique Lamarque,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 31 de la loi susvisée du 31 décembre 1970 : "Sont soumises à autorisation : 1° La création ou l'extension de tout établissement sanitaire privé comportant des moyens d'hospitalisation" ; que l'article 33 de la même loi dispose que : "L'autorisation est accordée si l'opération envisagée : 1° Répond aux besoins de la population, tels qu'il résultent de la carte prévue à l'article 44" ; qu'en vertu de l'article 34, si l'autorité compétente ne notifie pas sa décision au demandeur dans le délai de six mois à compter du dépôt de la demande, "l'autorisation est réputée acquise" ;
Considérant que par une décision du 9 janvier 1992, le ministre délégué à la santé a refusé à la société Clinique Lamarque l'autorisation de créer un centre de réadaptation fonctionnelle à Saint-Denis de la Réunion ; que par une décision du 13 février 1992 ledit ministre a retiré ce refus et constaté que la clinique avait acquis une autorisation tacite ; que la société DYNAMIS fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'autorisation accordée à la société Clinique Lamarque ;
En ce qui concerne la décision du 13 février 1992 :
Considérant qu'il est constant qu'aucune décision du ministre délégué à la santé n'a été notifiée à la société Clinique Lamarque dans le délai de six mois suivant le dépôt de sa demande d'autorisation ; que dès lors, en vertu des dispositions précitées de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1970, ladite société a, à l'expiration de ce délai, acquis une autorisation tacite dont l'intervention a entraîné le dessaisissement du ministre ; qu'ainsi la décision du 9 janvier 1992 rejetant la demande d'autorisation était entachée d'illégalité ; que le ministre, saisi dans le délai du recours contentieux d'un recours gracieux dirigé contre cette décision, était tenu d'y faire droit ; qu'il suit de là que la SOCIETE DYNAMIS n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 février 1992 retirant la décision du 9 janvier 1992 ;
En ce qui concerne l'autorisation tacite :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les moyens tirés de ce que le dossier présenté à l'appui de la demande d'autorisation aurait été incomplet et de ce que le ministre n'aurait pas consulté la commission nationale de l'hospitalisation manquent en fait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'annulation par un jugement du 4 mai 1994 du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, confirmé par une décision du Conseil d'Etat en date du 14 décembre 1994, d'une autorisation délivrée le 9 janvier 1992 à la SOCIETE DYNAMIS, le projet pour lequel la société Clinique Lamarque a obtenu une autorisation tacite répondait aux besoins de la population en moyens d'hospitalisation pour la réadaptation fonctionnelle, évalués en fonction des indices définis par l'arrêté susvisé du 9 décembre 1988 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'autorisation acquise par la société Clinique Lamarque ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la société Clinique Lamarque, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la requérante la somme qu'elle demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de condamner la SOCIETE DYNAMIS à verser à la société Clinique Lamarque la somme de 5 000 F ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE DYNAMIS est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE DYNAMIS est condamnée à verser à la société Clinique Lamarque la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.A. DYNAMIS, à la S.A. Clinique Lamarque, à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion et au ministre du travail et des affaires sociales.