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29/12/1995 | FRANCE | N°114995

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 29 décembre 1995, 114995


Vu 1°), sous le n° 114 995, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février 1990 et 20 juin 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS, dont le siège est situé ... ; le syndicat requérant demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 90-67 du 17 janvier 1990 pris pour l'application de l'article 27-3° de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication et fixant les principes généraux de diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovi

suelles ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffus...

Vu 1°), sous le n° 114 995, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février 1990 et 20 juin 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS, dont le siège est situé ... ; le syndicat requérant demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 90-67 du 17 janvier 1990 pris pour l'application de l'article 27-3° de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication et fixant les principes généraux de diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffuseurs ;
Vu 2°), sous le n° 115 499, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 mars 1990 et 16 juillet 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE TF1 ; la SOCIETE TF1 demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret n° 9067 du 17 janvier 1990 pris pour l'application des articles 27-3° de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication et fixant les principes généraux de diffusion des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffuseurs ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 17 janvier 1989 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Laigneau, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS et de la SCP Boré, Xavier, avocat de la SA Télévision Française 1 - T.F.1.,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées tendent à l'annulation du même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 17 janvier 1989 dispose que : "Compte tenu des missions d'intérêt général des organismes du secteur public et des différentes catégories de services de communication audiovisuelle diffusées par voie hertzienne terrestre ou par satellite, des décrets en Conseil d'Etat fixent les principes généraux définissant les obligations concernant : ( ...) 3° la contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle et les dépenses minimales consacrées à l'acquisition de droits de diffusion d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffuseurs" ; que le décret n° 90-67 du 17 janvier 1990 pris pour l'application du 3° de l'article 27 de la loi précitée du 30 septembre 1986 fixe les principes généraux concernant la contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffuseurs ;
Sur la requête de l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS :
Considérant que l'article 1 du décret attaqué qui définit le chiffre d'affaires annuel net des sociétés de télévision servant de base au calcul de leurs obligations dispose que : "Ne sont pas pris en compte dans le chiffre d'affaires annuel net d'une société ou d'un service de télévision : 2°/ la commission et les frais de régie publicitaire ; 3°/ La taxe au profit du compte de soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie des programmes audiovisuels prévue par l'article 36-I de la loi de finances pour 1984 ( ...) 5°/ la part consacrée à la programmation d'émissions sur une zone géographique dont la population recensée est inférieure à 6 millions d'habitants" ;
Considérant, d'une part, que l'article attaqué, qui n'a ni pour objet ni pour effet de se substituer à la définition du chiffre d'affaires fixée par l'article 276-1-1 du code général des impôts, se borne à fixer, à partir du chiffre d'affaires net, la base de calcul des obligations pesant sur les sociétés et services de télévision ; que, d'autre part, le décret pouvait, sans méconnaître la portée de l'habilitation donnée par l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 etsans porter atteinte au principe d'égalité, exclure les éléments mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l'article 1er de la définition du chiffre d'affaires annuel net servant de base au calcul des obligations des chaînes en matière cinématographique et audiovisuelle ; que cet article n'est donc pas entaché d'illégalité ;

Considérant que l'article 7 du décret attaqué dispose que : "Les contrats d'achats de droits de diffusion d'une oeuvre cinématographique passés dans les conditions définies au 2° de l'article 5 déterminent un prix d'acquisition distinct pour chaque diffusion ou rediffusion de cette oeuvre" ; que si des dispositions identiques ne s'appliquent pas à l'acquisition d'oeuvres audiovisuelles, le décret attaqué pouvait, sans porter atteinte au principe d'égalité, traiter de façon différente l'acquisition des oeuvres audiovisuelles et celle des oeuvres cinématographiques, en raison des différences qui les séparent en ce qui concerne les conditions de leur production ;
Considérant que l'article 9 du décret attaqué dispose que : "Afin de contribuer au développement de la production audiovisuelle, les sociétés et les services mentionnés à l'article 8 du présent décret sont tenus : a) Soit de consacrer chaque année au moins 15 p. 100 du chiffre d'affaires annuel net de l'exercice précédent à la commande d'oeuvres audiovisuelles d'expression originale française et de diffuser un volume horaire annuel minimum de cent vingt heures d'oeuvres audiovisuelles d'expression originale française en première diffusion en clair en France et dont la diffusion débute entre 20 heures et 21 heures ; b) Soit de consacrer chaque année au moins 20 p. 100 du chiffre d'affaires annuel net de l'exercice précédent à la commande d'oeuvres originaires de la Communauté économique européenne et au moins 15 p. 100 de ce même chiffre d'affaires à la commande d'oeuvres audiovisuelles d'expression originale française" ;
Considérant que le choix ainsi offert permet de tenir compte des différences de situation existant entre les différents services de télévision et relève de la fixation des principes généraux assignée par la loi au pouvoir réglementaire ; qu'un tel choix n'est pas contraire au principe d'égalité ; qu'il ne vas pas à l'encontre des objectifs de la directive communautaire du 3 octobre 1989 qui ne prévoit aucune obligation de commande d'oeuvres audiovisuelles d'expression communautaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS n'est pas fondée à demander l'annulation des articles 1, 7 et 9 du décret attaqué ;
Sur la requête de la société TF1 :
Considérant que la société TF1 conteste la légalité de la définition de l'oeuvre audiovisuelle donnée par l'article 1er du décret attaqué par référence à l'article 4 du décret 90-66 du 17 janvier 1990 qui dispose que : "Constituent des oeuvres audiovisuelles les émissions ne relevant pas d'un des genres suivants : oeuvres cinématographiques, journaux et émissions d'information, variétés, jeux, émissions autres que de fiction majoritairement réalisées en plateau, retransmissions sportives, messages publicitaires, télé-achat, auto-promotion, services de télex" ;

Considérant qu'en excluant des oeuvres audiovisuelles les journaux et émissions d'information, les variétés ainsi que les émissions autres que de fiction majoritairement réalisées en plateau, lesquels ne présentent pas dans leur conception ou leur réalisation une part de création de nature à les faire entrer dans cette catégorie, le gouvernement n'a pas méconnu les objectifs poursuivis par le législateur et fixés dans l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée précitée ;
Considérant qu'en fixant le pourcentage minimum du chiffre d'affaires annuel net de l'exercice précédent que les sociétés et services de télévision doivent consacrer au développement de la production d'oeuvres cinématographiques d'expression originale française, l'article 3 du décret attaqué n'a pas empiété sur la compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel et n'est donc pas entaché d'illégalité ;
Considérant que les articles 2 et 8 du décret attaqué disposent que les dispositions des titres I et II du décret attaqué "sont applicables : 1°) Aux sociétés nationales de programmes Antenne 2 et France Région 3 ; 2°) Aux services de télévision autorisés diffusée en claire par voie heztzienne terrestre" ; que la SOCIETE TF1 soutient que ces dispositions sont illégales en tant qu'elles exonèrent la société Canal Plus des obligations découlant du décret attaqué ;
Considérant qu'en application de l'article 79 de la loi du 29 juillet 1982 modifiée la société "Canal Plus" est titulaire d'une concession pour l'exploitation de la 4ème chaîne hertzienne terrestre assortie d'un cahier des charges approuvé par le décret du 28 mars 1988 ; qu'il ressort des travaux préparatoires de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée par la loi du 17 janvier 1989 que le législateur n'a pas entendu appliquer les dispositions de cet article à la société "Canal Plus" qui à cette date comme à celle du décret attaqué demeurait régie par les dispositions de son cahier des charges ; que, dans ces conditions, la société TF1 ne saurait utilement soutenir que le décret attaqué est illégal en ce qu'il a exclu la société "Canal Plus" de son champ d'application ;
Considérant que la société TF1 soutient que les articles 5, 9 et 10 du décret attaqué méconnaîtraient les pouvoirs que le Conseil supérieur de l'audiovisuel tient de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée en tant qu'ils fixent la part du chiffre d'affaires des sociétés de télévision consacrée à la diffusion d'oeuvres cinématographiques françaises, à la commande de ces oeuvres ou à celles d'oeuvres audiovisuelles produites par des producteurs indépendants, définitions qui relèveraient, selon la société requérante, du domaine de la convention particulière à chaque chaîne ; qu'un tel moyen ne peut être accueilli dès lors que si l'article 28 de la loi susmentionnée précise qu'une convention "fixe les règles particulières applicables au service", cette convention ne peut le faire que dans "le respect de l'honnêteté et du pluralisme de l'information et des programmes et des règles générales fixés en application de la présente loi et notamment de son article 27 ..." ; qu'au nombre de ces règles générales figurent celles fixées par le décret attaqué pris en application de l'article 27 ;

Considérant que l'article 12 du décret attaqué qui dispose que : "Les montants des commandes retenues pour l'application de l'article 9 sont ceux qui figurent aux contrats de production des oeuvres audiovisuelles dont le tournage débute au cours de l'exercice, signés par les sociétés ou les services de télévision et effectivement inscrits dans leurs propres comptes" ne contient aucune disposition contraire à la liberté de la communication ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société TF1 n'est pas fondée à demander l'annulation des articles 1, 2, 3, 5, 8, 9, 10 et 12 du décret attaqué ;
Article 1er : Les requêtes de l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURS DE PROGRAMMES AUDIOVISUELS et de la SOCIETE TF1 sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'UNION SYNDICALE DES PRODUCTEURSDE PROGRAMMES AUDIOVISUELS, à la SOCIETE TF1 et au ministre de la culture.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 114995
Date de la décision : 29/12/1995
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - LOI - ABSENCE DE VIOLATION.

RADIODIFFUSION SONORE ET TELEVISION - REGLES GENERALES - REGIME D'EMISSION.


Références :

CGI 276-1-1
Décret du 28 mars 1988
Décret 90-66 du 17 janvier 1990 art. 4
Décret 90-67 du 17 janvier 1990 art. 1, art. 7, art. 9, art. 3, art. 2, art. 8, art. 5, art. 10, art. 12
Loi 82-652 du 29 juillet 1982 art. 79
Loi 86-1067 du 30 septembre 1986 art. 27, art. 28
Loi 89-25 du 17 janvier 1989

Cf. décision du même jour : 114994, 115498


Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 1995, n° 114995
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Laigneau
Rapporteur public ?: Mme Pécresse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1995:114995.19951229
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