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10/01/1996 | FRANCE | N°153477

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 10 janvier 1996, 153477


Vu l'ordonnance en date du 28 octobre 1993, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 novembre 1993, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour pour M. Michel X..., demeurant ... ;
Vu la demande enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 18 octobre 1993, présentée pour M. X... et tendant à :
1°) l'annulation du jugement du 15 juillet

1993, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa ...

Vu l'ordonnance en date du 28 octobre 1993, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 novembre 1993, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour pour M. Michel X..., demeurant ... ;
Vu la demande enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 18 octobre 1993, présentée pour M. X... et tendant à :
1°) l'annulation du jugement du 15 juillet 1993, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre la décision, en date du 28 janvier 1993, de l'inspecteur d'académie de l'Ain excluant ses trois enfants de tout établissement scolaire aussi longtemps qu'ils n'auront pas subi les vaccinations obligatoires ;
2°) l'annulation de ladite décision ;
3°) la condamnation de l'Etat au versement d'une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 74-360 du 3 mai 1974 portant publication de la conventioneuropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950, et de ses protocoles additionnels n° 1, 3, 4 et 5, signés les 20 mars 1952, 6 mai 1963, 16 septembre 1963 et 20 janvier 1966 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi du 28 mars 1882 ;
Vu l'ordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 51-953 du 9 juillet 1951 ;
Vu le décret n° 52-247 du 28 février 1952 ;
Vu le décret n° 65-213 du 19 mars 1965 ;
Vu le décret n° 53-1169 du 28 novembre 1953 modifié, notamment par le décret n° 72-143 du 22 février 1972 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Colmou, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 6 du code de la santé publique : "La vaccination antidiphtérique par l'anatoxine est obligatoire. Les parents ou tuteurs sont tenus personnellement de l'exécution de ladite mesure, dont justification devra être fournie lors de l'admission dans toute école, garderie, colonie de vacances ou autre collectivité d'enfants" ; qu'aux termes de l'article L. 7 du même code : "La vaccination antitétanique par l'anatoxine est obligatoire et doit être pratiquée en même temps et dans les mêmes conditions que la vaccination antidiphtérique prescrite à l'article 6 ci-dessus" ; qu'aux termes de l'article L. 7-1 du même code : "La vaccination antipoliomyélitique est obligatoire, sauf contre-indication médicale reconnue, à l'âge et dans les conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat ( ...). Les personnes qui ont le droit de garde ou la tutelle des mineurs sont tenues personnellement de l'exécution de cette obligation" ; qu'aux termes de l'article 12 du décret du 28 février 1952 sur l'organisation du service des vaccinations antidiphtérique-antitétanique et antityphoparatyphoïdique, susvisé, également applicable à l'organisation du service de vaccination antipoliomyélitique obligatoire en application de l'article 3 du décret susvisé du 19 mars 1965 : "L'admission dans tout établissement d'enfants, ayant un caractère sanitaire ou scolaire, est subordonnée à la présentation soit du carnet de vaccination, soit des certificats médicaux attestant que l'enfant a été soumis aux vaccinations obligatoires ou en a été dispensé pour contreindication médicale. Au cas où de tels certificats ne peuvent être produits, les vaccinationsréglementaires seront effectuées dans les trois mois qui suivent l'admission" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu subordonner, dans l'intérêt de la protection de la santé publique, l'admission des enfants dans tout établissement scolaire public ou privé, ainsi d'ailleurs que dans toute autre collectivité d'enfants, à la justification que les intéressés ont satisfait aux prescriptions ainsi édictées ;
Considérant qu'il est constant qu'à la date de la décision attaquée les enfants de M. X... : Simon, né le 13 décembre 1983, Camille, née le 3 novembre 1985 et Ellyn, née le 23 avril 1987, n'avaient pas encore subi les vaccinations prévues aux articles L. 6, L. 7 et L. 7-1 précités du code de la santé publique sans qu'il fût justifié, dans les formes prévues aux articles 12 du décret susvisé du 28 février 1952 d'une contre-indication d'ordre médical ; que, dès lors, l'inspecteur d'académie a pu, sans méconnaître l'obligation scolaire posée par la loi susvisée du 28 mars 1882 et par l'ordonnance susvisée du 6 janvier 1959, décider de ne plus admettre dans un établissement scolaire les enfants des requérants aussi longtemps qu'il ne serait pas satisfait auxdites dispositions ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : "Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction. L'Etat, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques" ;
Considérant, d'une part, que le droit à l'instruction garanti par la première phrase dudit article 2 n'interdit pas une réglementation de son exercice par les Etats signataires pour des motifs d'intérêt général ; que, par suite, les dispositions législatives précitées qui, dans l'intérêt de la santé publique, subordonnent l'accès aux établissements scolaires à diverses vaccinations ne sont pas incompatibles avec la stipulation du protocole qui garantit le droit à l'instruction ;
Considérant, d'autre part, que la deuxième phrase de l'article 2 précité est sans application à des mesures qui ne relèvent pas de l'exercice par l'Etat des fonctions qu'il assure dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement et de l'obligation de donner à cette éducation et à l'enseignement un contenu qui respecte les convictions religieuses et philosophiques des parents ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 28 janvier 1993, par laquelle l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale de l'Ain, a exclu ses trois enfants de tout établissement scolaire aussi longtemps qu'ils n'auraient pas subi les vaccinations obligatoires ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X... et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 153477
Date de la décision : 10/01/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - DROITS GARANTIS PAR LES PROTOCOLES.

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS GENERALES - QUESTIONS GENERALES CONCERNANT LES ELEVES.

SANTE PUBLIQUE - PROTECTION SANITAIRE DE LA FAMILLE ET DE L'ENFANCE - PROTECTION MATERNELLE ET INFANTILE - PROTECTION DES ENFANTS.


Références :

Code de la santé publique L6, L7, L7-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 1er protocole additionnel 1952-03-20 art. 2
Décret 52-247 du 28 février 1952 art. 12
Décret 65-213 du 19 mars 1965 art. 3
Loi du 28 mars 1882
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 59-45 du 06 janvier 1959


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jan. 1996, n° 153477
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Colmou
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:153477.19960110
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