La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/01/1996 | FRANCE | N°152786

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 17 janvier 1996, 152786


Vu, la requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 octobre 1993, présentée par le PREFET DU VAL D'OISE ; le PREFET DU VAL D'OISE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 septembre 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 20 septembre 1993 décidant la reconduite à la frontière de M.Lahcen X... ;
2°) de rejeter la demande de M. X... devant le tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la co

nvention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondam...

Vu, la requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 octobre 1993, présentée par le PREFET DU VAL D'OISE ; le PREFET DU VAL D'OISE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 septembre 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 20 septembre 1993 décidant la reconduite à la frontière de M.Lahcen X... ;
2°) de rejeter la demande de M. X... devant le tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 23 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X..., de nationalité marocaine, est entré en France le 7 avril 1989, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa d'une durée de trente jours ; qu'il s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa sans régulariser sa situation ; qu'ainsi, l'intéressé se trouvait dans le cas où, en application de l'article 22-I-1° de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que si M. X... a prétendu que le PREFET DU VAL D'OISE avait voulu le priver de la possibilité d'obtenir une carte de résident de plein droit, en prenant à son encontre le 20 septembre 1993 une mesure de reconduite à la frontière alors qu'il était sur le point de se marier, les dispositions de l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, qui sont relatives aux conditions d'entrée des étrangers en France, sont opposables à ceux d'entre eux qui demandent à bénéficier, sur le fondement de l'article 15, d'une carte de résident de plein droit ; qu'il n'est pas contesté que M. X... est entré irrégulièrement en France en 1989 et que les conditions irrégulières de son entrée en France se seraient opposées à la délivrance de la carte de résident de plein droit ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en prenant l'arrêté de reconduite à la frontière, le PREFET DU VAL D'OISE a voulu mettre fin à la présence irrégulière de M. X... sur le territoire et non contrecarrer le projet de mariage de celui-ci avec une ressortissante française ; que cette mesure n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir ;
Considérant, par ailleurs que si, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 20 septembre 1993 décidant la reconduite à la frontière, M. X... a soutenu que la mesure d'éloignement prise à son encontre faisait obstacle à son projet de mariage, l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière ne peut avoir ni pour effet ni pour objet d'interdire à M. X... de se marier et ne crée à son détriment aucune discrimination illégale ; qu'ainsi l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui énoncent que l'homme et la femme d'âge nubile ont le droit de se marier ;

Considérant, en outre, que si M. X... a fait valoir, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 20 septembre 1993 ordonnant sa reconduite à la frontière, qu'il était sur le point de se marier avec une ressortissante française avec laquelle il vivait en concubinage depuis 1990, qu'à la date de la décision attaquée, sa compagne était enceinte de sesoeuvres et que par acte reçu le 21 septembre 1993 devant l'officier d'état civil de la ville d'Argenteuil, il avait reconnu l'enfant à naître, il ressort des pièces du dossier que, compte-tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. X... et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DU VAL D'OISE en date du 20 septembre 1993 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue duquel a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 20 septembre 1993 décidant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que M. X... a fait valoir qu'il n'avait jamais fait l'objet de condamnations pénales, cette circonstance à la supposer établie est sans incidence sur la légalité de l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement en date du 22 septembre 1993, du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL D'OISE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 152786
Date de la décision : 17/01/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE (ART - 8) - CONTROLE DU JUGE.

ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8, art. 12
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 5, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 17 jan. 1996, n° 152786
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M VIGOUROUX
Rapporteur public ?: M. Delarue

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1996:152786.19960117
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award