Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE enregistré le 5 octobre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision implicite rejetant la demande présentée par M. Y...
X... en vue de la prise en compte dans le calcul de son ancienneté de ses services militaires, et a condamné l'Etat à verser à M. X... la somme de 65 000 F en réparation du préjudice subi ;
2°) de rejeter la demande de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 65-550 du 9 juillet 1965 ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Touraine-Reveyrand, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que pour annuler la décision implicite de rejet, opposée par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE à la demande de M. Y...
X..., recruté dans un emploi de la police, et tendant à la prise en compte, pour le calcul de son ancienneté, de l'intégralité du temps qu'il a passé sous les drapeaux en qualité de militaire engagé, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé, dans le jugement attaqué, sur les dispositions des articles 95 à 97 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;
Considérant que pour apprécier la législation applicable aux militaires engagés accédant à un emploi public, l'administration est tenue de se placer à la date de l'accès des intéressés audit emploi ;
Considérant que M. X... a servi comme militaire engagé et rengagé du 29 septembre 1961 au 29 septembre 1966 ; qu'il a été recruté dans la police le 1er janvier 1967, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 13 juillet 1972, qui ne comporte pas de dispositions rétroactives relatives à son application ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur la loi du 13 juillet 1972 pour annuler la décision implicite du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Considérant que les articles 30, 31 et 32 de la loi n° 65-550 du 9 juillet 1965 susvisée, en vigueur à la date à laquelle M. X... a accédé au corps des gardiens de la paix, disposent : "Les jeunes gens qui souscrivent un engagement ou un rengagement pour accomplir des obligations d'une durée supérieure à celle du service actif sont régis par des dispositions particulières qui leur sont applicables dès que le contrat d'engagement est devenu définitif. Ils bénéficient des dispositions relatives aux emplois réservés ... Pour l'accès initial par concours ou examen à un emploi de l'Etat, des collectivités locales, des établissements publics et des entreprises publiques dont le personnel est soumis à un statut réglementaire, les jeunes gens visés au premier alinéa de l'article précédent bénéficient, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, des dispositions suivantes : 1. - La limite d'âge supérieure pour l'accès à ces concours ou examens est reculée dans la limite de dix années, d'un temps égal à celui qui a été passé effectivement sous les drapeaux ; 2. - Pour l'accès auxdits concours ou examens, les diplômes et qualifications militaires pourront être substitués aux titres et diplômes exigés par les statuts particuliers ... Le temps passé sous les drapeaux par les bénéficiaires de l'article précédent est compté pour l'ancienneté : a) Pour les emplois de catégorie C et D, ou de même niveau de qualification, pour sa durée effective jusqu'à concurrence de dix ans" ... ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les militaires engagés pour une durée supérieure à celle du service actif ont droit, lorsqu'ils accèdent, postérieurement à l'entrée en vigueur desdites dispositions, à un corps de la fonction publique appartenant à la catégorie C ou D, à ce que le classement initial prenne en compte l'ensemble des services militaires qu'ils sont accomplis, dans la limite de dix ans, quelle que soit la date à laquelle leur contrat d'engagement a été souscrit ; qu'ainsi, M. X... qui avait servi sous contrat dans l'armée du 29 septembre 1961 au 29 septembre 1966, était en droit de prétendre à un rappel d'ancienneté à ce titre ; que, par suite, le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision implicite de rejet de la demande en ce sens de M. X... à cet effet ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. Y...
X....