Vu la requête enregistrée le 27 juin 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES YVELINES ; le PREFET DES YVELINES demande au président de la section du Contentieux ;
1°) d'annuler le jugement du 19 juin 1995 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 6 juin 1995 décidant la reconduite à la frontière de M. Masoud X... Nia ;
2°) de rejeter la demande de M. X... Nia ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 15-12° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour ... à l'étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant"" ;
Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que M. X... Nia est entré en France en décembre 1984, à l'âge de 13 ans en accompagnant ses parents auxquels un titre de séjour a été délivré ; qu'en vertu des dispositions de l'article 9 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction en vigueur à l'époque, la possession d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident n'était imposée qu'aux seuls étrangers en séjour en France âgés de plus de seize ans ; que la circonstance que M. X... Nia, alors mineur, ne soit pas entré en France à la suite de la procédure du regroupement familial ne saurait lui être opposée, alors qu'il n'est pas venu rejoindre ses parents déjà installés en France mais les a accompagnés lors de leur entrée en France, et ne saurait par suite avoir pour effet de faire regarder le séjour qu'il a accompli en France avant l'âge de seize ans comme irrégulier ; que le point de départ de la période à prendre en compte pour le calcul de la période de dix ans mentionnée à l'article 15-12° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 se situe donc en décembre 1984 ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte également des pièces du dossier et qu'il n'est pas non plus contesté que M. X... Nia a disposé depuis le 1er janvier 1987 d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant puis, à partir de 1989 et jusqu'au 27 septembre 1994, en qualité de visiteur ; qu'il ne peut donc être opposé à M. X... Nia que, pendant toute la période de son séjour en France, il aurait été titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" et entrerait dans le champ de l'exception prévue à l'article 15-12° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... Nia doit être regardé comme ayant séjourné en France dans des conditions régulières de décembre 1984, date de son entrée en France, jusqu'au 17 mars 1995, date à laquelle lui a été notifiée une décision de refus de renouvellement de titre de séjour en qualité de visiteur et de délivrance d'une carte de résident, soit pendant une période supérieure à dix ans ; qu'il en résulte que ladite décision était entachée d'illégalité ; que celle-ci n'étant pas devenue définitive, M. X... Nia était recevable à exciper de cette illégalité à l'appui du recours qu'il a formé contre l'arrêté du 6 juin 1995 par lequel le PREFET DES YVELINES a ordonné sa reconduite à la frontière ; que la décision de refus de séjour étant le fondement légal unique de l'arrêté de reconduite à la frontière, l'illégalité de cette décision entraîne par voie de conséquence celle dudit arrêté ; qu'il en résulte que le PREFET DES YVELINES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 19 juin 1995, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 6 juin 1995 décidant de reconduire M. X... Nia à la frontière ;
Article 1er : La requête du PREFET DES YVELINES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES YVELINES, à M. Mazoud X... Nia et au ministre de l'intérieur.